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La femme du récit légendaire québécois : de la jeune fille victime à la dame blanche secourable

« L'étude porte sur la représentation du personnage féminin de la légende québécoise. A partir d'un corpus rassemblant deux cent quinze récits issus de la tradition orale ou de la littérature, l'auteur explore l'hypothèse selon laquelle une femme jouant le rôle principal serait négativement perçue par le groupe d'appartenance. Elle s'expose d'emblée à être une victime lorsqu'elle ne se conforme pas aux normes établies par la collectivité ou qu'elle ne remplit pas les fonctions maternelles. Une grille d'analyse divisant les récits selon qu'i ls mettent en scène un personnage non corporel ou corporel, positif ou négatif, actif ou passif et volontaire ou non volontaire, s'est avérée particulièrement significative pour élucider l'hypothèse en jeu. Ainsi, sur deux cent quinze légendes, cent cinquante et une, soit 70,2%, illustrent une femme réelle, c'est-à-dire dotée d'un corps. Ce personnage apparaît davantage négatif (quatre-vingt-quatre récits) et passif, donc victime, dans cent deux versions. Il se montre volontaire dans cent dix versions. C'est dire que la femme corporelle présente une image surtout négative et elle devient facilement victime à cause d'une conduite le plus souvent volontaire et répréhensible. Ordinairement, il s'agit d'une jeune fille dont les gestes étranges troublent l'ordre établi. Elle agresse son entourage par des attitudes réprobatives. Le groupe ne peut tolérer pareil comportement, c'est pourquoi il punit cette femme et en fait une victime. Des deux cent quinze récits, soixante-quatre ou 29,8% mettent en scène des personnages sans corporéité. Quarante-cinq versions illustrent un être irréel, positif et actif contre dix-neuf où les éléments négatif et actif prévalent. Le personnage non corporel est toujours volontaire. Cette catégorie présente des Dames blanches secourables telle une bonne mère ou des sorcières menaçantes. Cependant, l'être imaginaire positif sous les traits d'une Vierge ou d'une mère apaisante est prédominant. Les résultats de cette analyse montrent que l'héroïne de la légende québécoise est corporelle, négative, passive et volontaire ou bien elle est non corporelle, positive, active et volontaire. C'est un portrait antithétique de la femme que laisse entrevoir le récit légendaire. Les éléments "corporel" et "non corporel" ont été les plus révélateurs. Ils ont suscité maintes questions. La représentation féminine apparaît davantage positive et active dans l'imaginaire, alors qu'elle se révèle négative et passive dans le réel. Des approches psychologiques suggèrent une interprétation permettant une explication plausible. Dans la réalité, la femme est souvent infériorisée. Il en est autrement dans l'inconscient de tout un chacun. Pour G. Rubin "...dès que l'on quitte le domaine du réel, du quotidien, la femme change de rôle: dans le réel, esclave; dans le phantasme, maîtresse toute-puissante." Elle démontre également que par les productions artistiques, les mythes, les légendes, les rêves, etc., se manifeste l'inconscient et en lui subsiste une figure féminine d'une écrasante supériorité. Cet écart justifierait les résultats obtenus. Les propos de Rubin sont éclairants et offrent quelques éléments de réponses aux interrogations soulevées. D'une part, les données confirment l'hypothèse de départ: une femme qui détient un rôle principal dans un récit est davantage vécue comme négative par ses pairs. Le moindre geste répréhensible l'expose à l'état de victime et par conséquent au rejet du groupe. L'autre partie de ce postulat voulant que le récit légendaire assure protection à la femme-mère est resté plus difficile à cerner. Les versions illustrant des mères dans un rôle central sont au nombre de vingt-cinq. Aussi cette proportion minime du corpus permet de soutenir qu'une mère est rarement victime. Sa présence plus accentuée dans la catégorie des non corporels soutient cet énoncé. La légende québécoise sert davantage à contrôler les conduites déviantes, c'est pourquoi elle raconte souvent l'histoire d'une jeune fille "légère". L'image de la bonne mère reste cependant prégnante et apparaît en filigrane dans de nombreuses versions. »--Pages préliminaires

Identiferoai:union.ndltd.org:LAVAL/oai:corpus.ulaval.ca:20.500.11794/54215
Date16 May 2024
CreatorsMercier, Lucie, Mercier, Lucie
ContributorsDu Berger, Jean
Source SetsUniversité Laval
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
Typemémoire de maîtrise, COAR1_1::Texte::Thèse::Mémoire de maîtrise
Formatxvi, 88 feuillets, application/pdf
CoverageQuébec (Province)
Rightshttp://purl.org/coar/access_right/c_14cb

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