Le présent travail souhaite apporter un éclairage sur la manière dont la littérature politique de l'absolutisme français a envisagé la place de la contingence et du hasard dans l’expérience historique. Cette étude comprend deux versants : d’une part, l’examen des contextes d’écriture du Ministre d'Estat (1631), traité politique que Jean de Silhon consacre à la défense du ministère de Richelieu ; d’autre part, une analyse des aspects épistémologiques et anthropologiques de l’usage des maximes, des préceptes et des exemples dans les ouvrages historiques et politiques. Cette double approche se justifie par les circonstances de la réception de Silhon, que nous étudions à partir de la présence de ses ouvrages dans certains recueils de manuscrits, relatifs à la politique française du premier XVIIe siècle. Pour ce faire, nous considérons le manuscrit comme un médium, qui révèle à la fois le fonctionnement de l’espace public et celui de l’intimité des lectures personnelles. Dans ce travail, la collecte des lieux communs et des sentences est vu comme un moyen d’ordonner l’hétérogénéité des expériences historiques sous la forme d’un savoir utile. Nous commençons par analyser le concept de contingence historique, à travers le topos de fortuna, tel qu’il est décrit dans les ouvrages de Silhon et de ses contemporains. Il semble qu’une tension se dégage entre deux tendances antinomiques au sein de cette oeuvre : l’auteur défend, en matière d’État, une exigence de modernité, celle d’une émancipation de la politique de ses modèles antiques et d’une affirmation de son caractère rationnel ; pourtant, le topos archaïque de fortuna reste profondément ancré dans son oeuvre, y compris en lien avec la figure du ministre d’État au XVIIe siècle. Ce constat est renforcé par l'étude de la réception du Ministre d'Estat en Italie et dans le Saint-Empire. Nous parcourons ensuite les extraits manuscrits collectés dans le cabinet de Richelieu et dans les collections de Philippe de Béthune et d’Henri II de Mesmes, avant de présenter la collection ouvertement francophile du duc Auguste le Jeune de Wolfenbüttel. Nous examinons enfin l’œuvre de Nicolas Zrínyi, homme d’État croato-hongrois, qui intègre, dans sa théorie politique et militaire, deux influences contradictoires : la lecture tacitiste de l’histoire antique et le modernisme de Silhon. Son Capitaine vaillant (1650-53), méditation manuscrite, représente, au niveau de l'invention et de la disposition de ses matériaux, les méthodes propres à l’humanisme traditionnel, tandis que, dans l’usage de l’Histoire, il partage les doutes de l’humanisme tardif. / The purpose of this work is to present the way the political literature of French absolutism explained contingency and chance in historical experience. This study comprises two tasks: firstly, it analyses the different contexts of the Ministre d’Estat (1631), a political treatise written by Jean de Silhon to defend Richelieu’s government; secondly, it deals with the epistemological and anthropological aspects of using maxims, precepts and examples written on historical or political matters. To demonstrate the relevance of this double approach, the study aims to reconstruct the history of Silhon’s reception by discussing the presence of his works in manuscript miscellanies which contain excerpts on French politics in the first half of the 17th century. For this purpose, manuscript is interpreted as a medium which reveals both the functioning of the public space and the privacy of personal readings. Collecting common places and sentences is considered to be a method of organising divergent historical experiences into useful knowledge. In the first part, this study analyses the notion of historical contingency as described with the topos of fortuna in works by Silhon and his contemporaries. I suggest that there is a tension between two opposite tendencies in Silhon’s work: although he declares a claim for modernity in state affairs in order to liberate politics from antique models and to assure its rationality, the archaic topos of fortuna keeps resurfacing in his work and in the figure of the state minister in the 17th century. This statement can be confirmed by observing the reception of the Ministre d’Estat in Italy and in the Holy Roman Empire. The second part discusses manuscript excerpts from Richelieu’s cabinet and from the collections of Philippe de Béthune and Henri II de Mesmes, concluding with the presentation of the openly Francophile collection of August the Younger, duke of Wolfenbüttel. The third part considers the work of Nicolas Zrínyi, a Croatian-Hungarian politician, who integrated two contradictory influences in his political and military theory: the Tacitist reading of ancient history and Silhon’s modernism. His Valiant Captain (1650-53), an unpublished meditation, represents the methods of classical humanism in the inventio and dispositio of its matters while sharing late humanism’s doubts concerning the uses of history.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2017PA040034 |
Date | 20 March 2017 |
Creators | Förköli, Gábor |
Contributors | Paris 4, Eötvös Loránd tudományegyetem (Budapest), Ferreyrolles, Gérard |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text, Image |
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