Ce mémoire, tant dans l'écriture poétique que dans la réflexion qui l'accompagne, cherche à mettre en lumière la tension vitale entre l'indifférence et l'inquiétude une fois que nous sommes mis devant le spectacle de notre destruction. Parier sur le poème, en ce sens, c'est supposer qu'il soit un facteur de progrès social. Je l'entrevois donc comme un élément actif au sens critique et politique. Si encore aujourd'hui on disqualifie le poème en prétextant qu'il ne sert à rien, sinon à nous divertir (ce qui est assez négligeable compte tenu du nombre incalculable de divertissements déjà présents autour de nous), c'est précisément qu'on veille à ce qu'il en soit ainsi, c'est-à-dire qu'on le définit ontologiquement par son inutilité. Comment se fait-il alors qu'un tel fossé se soit creusé entre le lecteur et le poète? Et comment se fait-il que cette dépréciation totale d'une forme de liberté (de pensée et de discours) soit devenue « si naturelle» ? Il faut dès lors dire d'un poème ce que Gaston Miron disait de la littérature: ce « n'est pas qu'une expression, [mais] aussi un acte, et son action un dévoilement de l'aliénation [...] ». Pierre Mertens prévient toutefois qu'entre la complaisance de celui qui se satisfait de n'être qu'un producteur de divertissement et le narcissisme du «charlatan» qui s'admire parce que la cause qu'il défend provoque l'admiration, il n'y a aucune différence de nature. L'engagement ne se résume pas au simple fait d'embrasser une cause -on assisterait alors à l'assujettissement causal de l'art. Bien que je me considère en « détention » dans un système de valeurs néolibérales, je n'ai aucunement l'intention ni même la prétention de proposer un autre système. J'espère tout au plus, au bout du chemin que le lecteur et moi aurons parcouru ensemble, qu'il pourra partager avec moi l'inquiétude et la vigilance existentielle nécessaires à la formation de toute subjectivité. Parce que le poème s'opère malgré tout en réclusion, c'est-à-dire qu'il est à l'écoute d'une souffrance dans un corps cellulaire (le plus intime des pénitenciers), dont il est impossible de s'évader autrement que par la prise de parole. Le travail du langage a lieu précisément là où nous sommes confinés, dans le silence d'une peine commune. Dans ces conditions, la liberté d'expression prend un sens politique qui outrepasse les limites du simple fait de pouvoir dire n'importe quoi en vue de plaire ou de divertir. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Empathie, Engagement, Espoir, Éthique, Inquiétude, Poésie, Politique, Vigilance.
Identifer | oai:union.ndltd.org:LACETR/oai:collectionscanada.gc.ca:QMUQ.1009 |
Date | January 2008 |
Creators | Plourde, Danny |
Source Sets | Library and Archives Canada ETDs Repository / Centre d'archives des thèses électroniques de Bibliothèque et Archives Canada |
Detected Language | French |
Type | Mémoire accepté, PeerReviewed |
Format | application/pdf |
Relation | http://www.archipel.uqam.ca/1009/ |
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