Alors que de nombreux travaux ont déjà mis en lumière la circulation de musiciens et de genres musicaux italiens au Nord des Alpes durant les XVIIe et XVIIIe siècles, la musique française est encore largement perçue, pour reprendre l'expression de Rousseau, comme « indéchiffrable pour toute autre nation ». Reconduisant le paradigme d'un isolement musical de la France au sein d'une Europe baroque tout acquise à la musique italienne, l'historiographie a eu tendance à sous-estimer le rôle des transferts musicaux depuis la France dans la vie musicale européenne, et singulièrement allemande. Plusieurs phénomènes témoignent pourtant d'une intensification des échanges musicaux entre la France et les territoires germaniques du Saint Empire autour de 1700 : l'embauche de musiciens français dans plusieurs cours d'Allemagne, la diffusion et la copie de sources imprimées de musique française, l'exécution d'œuvres françaises ou d'inspiration française dans les grands centres musicaux de l'espace germanique, ainsi que la formation d'un discours théorique de langue allemande sur la musique française constituent autant de modalités essentielles de la circulation des hommes, des œuvres, des savoirs et des pratiques musicales dans l'Europe moderne. La Basse-Saxe et la Saxe offrent deux cas d'étude exemplaires où la migration des musiciens français, qui fait d'abord l'objet d'une analyse prosopographique à travers une reconstruction des réseaux et des trajectoires individuelles, peut ensuite être mise en parallèle avec la circulation de nombreuses sources musicales transmettant des œuvres du répertoire français. Au carrefour de la musicologie et de l'histoire sociale des migrations, ce travail vise ainsi à éclairer les différentes facettes d'un transfert culturel, en restituant à ce concept une chair humaine dont il est trop souvent privé. / Many studies have highlighted the spread of Italian musicians and musical genres across the Alps during the 17th and 18th centuries, but French music remains time and again perceived as « undecipherable for any other nation », as Rousseau once put it. The historiography has long held fast to the idea of an isolated France within a European musical market shaped by the pervasive diffusion of Italian music, thus overlooking the role played by French music and musicians on the European and indeed the German musical scene. However, a few facts strongly indicate that musical exchanges between France and certain German territories of the Holy Roman Empire were becoming increasingly important around 1700 : several courts hired French bands, scores of French music were copied and disseminated throughout Germany, musical works genuinely French or emulating French models were performed in all major musical centers, and a coherent discourse on French music was further articulated in German theoretical production. Those facts are essential to our understanding of the mobility of people, works, ideas and practices in the Early-Modern Europe. Lower-Saxony and Saxony provide two case studies in order to show how the migration of French musicians, subjected to a prosopographical investigation that points out social networks and individual odysseys, can be connected to the dissemination of actual sources of French music. Bringing together musicology and social history of migrations, this study examines different aspects of a cultural transfer and ultimately reveals that human flesh is always part of it.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2015POIT5004 |
Date | 11 December 2015 |
Creators | Delpech, Louis |
Contributors | Poitiers, Favier, Thierry, Heinemann, Michael |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text, Image, StillImage |
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