Return to search

"Alerte à la pilule". Politiques contraceptives et régulation du risque au prisme du genre / Pill Scare. Contraceptive and risk management policies through a gender perspective

En décembre 2012, une controverse sur les risques accrus de thrombose veineuse profonde associés aux pilules contraceptives dites de nouvelles générations éclate en France. Cette controverse conduit à l’expression d’une critique à l’égard de la pilule en France, érigée jusqu’alors comme symbole de l’émancipation féminine. Près d’une femme sur cinq abandonne la pilule au profit d’autres méthodes, déstabilisant le modèle contraceptif français centré sur la promotion de ce contraceptif. Malgré son intensité, la controverse est tardive. Dès 1995, les risques associés avaient été identifiés dans de nombreux pays européens, dont le Royaume-Uni.Cette thèse cherche à comprendre le confinement des risques pendant près de vingt années en France. Elle s’appuie sur une enquête par entretiens semi-directifs (n=74) conduits auprès d’acteur·rice·s français·es et européen·ne·s de la contraception, complétée par une analyse des archives du Ministère de la Santé et par une revue de la littérature scientifique et institutionnelle. L’analyse de la controverse britannique de 1995 apporte un éclairage sur les spécificités de la situation française.L’analyse de cette controverse permet de retracer les politiques contraceptives françaises des années 1980 à nos jours. Cette histoire met en évidence la structuration d’un espace de la contraception construit autour d’un schéma hormonal et genré d’appréhension des corps reproducteurs. Il fait apparaître le rôle central des laboratoires pharmaceutiques et l’influence importante de la gynécologie médicale en France. Ces éléments permettent de mieux comprendre la minimisation des risques associés aux contraceptifs hormonaux en France.Outre les stratégies de dissimulation du risque, la trajectoire de cette controverse témoigne aussi d’une division sexuelle du risque, notamment en matière de régulation du médicament. De nombreux travaux ont documenté les effets de la (bio)médicalisation de la contraception sur sa féminisation. Rares sont ceux qui proposent une analyse de la régulation du médicament en général et des contraceptifs en particulier dans une perspective de genre. Les logiques scientifiques, institutionnelles et politiques de définition, mesure et traitement du risque médicamenteux se sont pourtant construites autour d’une appréhension genrée des corps féminin et masculin. La controverse de 2012-2013 met en lumière une distinction et un partage inégal du risque contraceptif entre les sexes, une asymétrie qui repose sur l’essentialisation du travail contraceptif et reproductif. / In December 2012, a controversy broke out in France over the increased risks of deep vein thrombosis associated with new generation contraceptive pills. This controversy led to the expression of an intense criticism of the pill in France, which until then had been a symbol of female emancipation. Nearly one in five women thus dropped the pill in favor of other methods. This has destabilized a French contraceptive model focused on the promotion of the pill. Despite its intensity, this controversy happened in France with quite a delay. As early as 1995, the associated risks had been identified in many other European countries, including the United Kingdom.The aim of this research is to understand the ignorance of these risks in France for nearly twenty years. It is based on interviews (n=74) conducted with French and European actors committed in birth control. An analysis of the Ministry of Health’s archives and a review of the scientific and institutional literature have also been led. The analysis of the 1995 British controversy sheds light on the specificity of the French situation.The analysis of this controversy leads to describe the contraceptive policies from the 1980s to the present days. It reveals how the contraceptive space has been structured around a hormonal and gendered perception of the reproductive bodies. This analysis highlights the central role played by the pharmaceutical companies but also by medical gynecology in France. These first results help to better understand the minimizing of risks associated with hormonal contraceptives in France.The trajectory of this controversy shows more broadly a sexual division of risk, especially in matters of drugs regulation. Many studies have depicted how the (bio)medicalisation of birth control has led to its feminization. But few offer a gender analysis of drugs regulation in general and contraceptives regulation in particular. The scientific, institutional and political logics of definition, evaluation and handling of drugs risks are nevertheless embedded in a gendered perception of female and male bodies. The 2012-2013 controversy reveals the distinction and unequal sharing of contraceptive risks between sexes, an inequality that also relies on an essentialism of contraceptive and reproductive work.

Identiferoai:union.ndltd.org:theses.fr/2019SACLS532
Date02 December 2019
CreatorsRouzaud-Cornabas, Mylène
ContributorsParis Saclay, Bajos, Nathalie, Bénamouzig, Daniel
Source SetsDépôt national des thèses électroniques françaises
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
TypeElectronic Thesis or Dissertation, Text

Page generated in 0.002 seconds