Diogène de Sinope, principal représentant du cynisme ancien, affirme dans une de ses œuvres qu’« il mettait la liberté au-dessus de tout ». Il n’est pas question ici du sens politique de la liberté, mais plutôt de son acception morale et individuelle, dont les origines remontent au moins au VIe s. av. J.-C. et peut-être à la racine même du mot ἐλεύθερος. Retracer l’histoire de cette notion révèle diverses influences sur le cynisme, que ce soit la figure de l’« esclave libre » chez les tragiques, ou la correspondance entre nature et liberté chez les Sophistes et Démocrite. Pour atteindre l’autarcie et l’apathie, les deux caractéristiques de la liberté cynique, Diogène doit soumettre son corps à un entraînement de nature physique, seul moyen de s’émanciper des chaînes de la civilisation. Socrate, surtout chez Xénophon et dans une certaine mesure chez Platon, avait déjà fait des exercices corporels une condition d’acquisition de la liberté. Toutefois, l’émancipation de l’individu débouche avec Socrate sur l’apprentissage du savoir qu’il juge nécessaire à la vertu. Les Cyniques, quant à eux, rejettent la vertu-connaissance et limitent leur activité philosophique à la pratique d’une ascèse corporelle rigoureuse, de sorte que la liberté mène sans détour à la vertu et au bonheur au point de s’y identifier. Les Cyniques se différencient donc de leurs prédécesseurs socratiques en ne prolongeant pas leur quête philosophique au-delà du moment de la libération et, par le fait même, font de la liberté la véritable marque distinctive de leur philosophie. / Diogenes of Sinope, the main representative of ancient Cynicism, says in one of his works that « he preferred freedom above everything ». He does not mean here freedom in its political sense, but rather in its moral and individual meaning, which dates back at least to the sixth century BC and perhaps to the very root of the word ἐλεύθερος. Tracing the history of this notion reveals diverse influences on Cynicism, whether the figure of the « free slave » of the tragedians, or the correspondence between nature and freedom of the Sophists and Democritus. To reach self-sufficiency and apathy, the two characteristics of Cynic freedom, Diogenes must submit his body to physical training, it being the only way to break free from the chains of civilization. Socrates, especially in Xenophon and to a certain extent in Plato, had already made physical exercises a condition for acquiring freedom. However, with Socrates the emancipation of the individual ends in gaining knowledge that he deems necessary to virtue. Cynics, for their part, reject virtue-knowledge and limit their philosophical activity to the practice of a rigorous physical asceticism, so that freedom leads directly to virtue and happiness to the point of identifying with it. Therefore, Cynics differ from their Socratic predecessors by not extending their philosophical quest beyond the moment of liberation and thereby make freedom the true hallmark of their philosophy.
Identifer | oai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/18718 |
Date | 04 1900 |
Creators | Chouinard, Isabelle |
Contributors | Dorion, Louis-André |
Source Sets | Université de Montréal |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Thèse ou Mémoire numérique / Electronic Thesis or Dissertation |
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