Les récits de vie d’Annie Ernaux, Pierre Michon, Pierre Bergounioux et François Bon tentent de témoigner des figures oubliées de l’arbre généalogique et des figures laissées pour compte de la société contemporaine. En écho aux mutations épistémologiques des sciences humaines dans les années 1960-1970, ces quatre auteurs entendent écrire l’Histoire non plus du point de vue des hommes illustres, mais du point de vue des anonymes. La mise en récit des sans-voix participe d’un renouvellement des paradigmes de la narration dans les dernières décennies du XXème siècle. Les figures sans histoire semblent en effet induire des processus de réduction et de marginalisation du genre romanesque. La trame des vies muettes se déroule sur le mode de l’éclat, bribes de la mémoire ou jaillissement incisif d’un réel à vif. La ténuité des archives, le maintien d’un soupçon éthique et poétique quant à la reconfiguration narrative de ces vies réelles conduisent l’écrivain à délaisser les formes périmées du roman réaliste. Ils le poussent aussi à questionner l’écart social et culturel avec ces demi-autres, mués en autant de miroirs de soi en éclats. Travaillées d’hypothèses personnelles, analytiques ou fantasmatiques, ces narrations au genre hybride font apparaître une figure d’auteur majuscule problématique, latérale et brisée, nourrie d’une incertitude épistémique majeure. Ces identités narratives diffractées – personnages et auteurs – interrogent en retour l’histoire de la littérature, sa place et sa puissance de résistance dans la société d’aujourd’hui. / Annie Ernaux, Pierre Michon, Pierre Bergounioux and François Bon's life-narratives attempt to bear witness to the genealogical tree of forgotten names and overlooked figures of contemporary society. In dialogue with the epistemological mutations of the social sciences in the 1960's and 1970's, these four authors will work to write History, not from the point of view of the illustrious, but from the point of view of the anonymous. Telling the stories of the voiceless contributes to the renewal of narrative paradigms in the last decades of the 20th century. These figures without history seem to conduce to a process of reduction and marginalization of the novelistic genre itself. The plot of these muted lives unfolds in the form of fragments, snatches from memory or sudden surges of raw reality. The scarcity of archives, the sustained suspicion, both ethical and poetical, regarding the narrative reconfiguration of these real lives lead the writer to abandon the outdated forms of the realistic novel. Such factors also question the social and cultural gap with these « half-others », turned into so many reflections of the self in a shattered mirror. Wrought with personal hypotheses, whether analytical or fantasised, these hybrid narratives reveal a problematic image of the Author, as a lateral and broken entity, informed by major epistemic doubts. In return, these diffracted narrative identities – characters as well as authors – raise questions as to the history of literature, its place and its power of resistance in today's society.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2010PA030104 |
Date | 19 November 2010 |
Creators | Adler, Aurélie |
Contributors | Paris 3, Blanckeman, Bruno |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
Page generated in 0.0018 seconds