Cette thèse propose trois essais empiriques consacrés à l'analyse des grèves en France, à partir de données récentes d'établissements et d'entreprises et l'utilisation de méthodes économétriques variées. Très peu d'études quantitatives, d'inspiration économique, ont été menées sur ce sujet en France, contrastant avec une littérature anglo-saxonne particulièrement étendue sur l'analyse économique des grèves. Le déclin de la syndicalisation et de l'action collective des salariés a néanmoins conduit à un déplacement progressif de l'intérêt des chercheurs anglo-saxons, en économie du travail et en relations industrielles (ou industrial relations), vers l'étude des relations de travail individuelles entre salariés et employeurs. L'individualisation des emplois et des relations de travail dans les entreprises est souvent considérée comme orthogonale à l'action collective des salariés. Le déclin des grèves et autres formes collectives de conflit a pu notamment être associé, dans la littérature anglo-saxonne, à une augmentation des manifestations individuelles de conflit et de la dispersion ou inégalité globale des salaires dans les entreprises. Nous proposons, dans cette thèse, une analyse originale des grèves en France, en lien avec ces deux aspects, caractéristiques de l'individualisation des emplois et des relations de travail dans les entreprises. Le premier chapitre s'intéresse à la relation existant entre l'expression collective de conflit, dont les grèves, et des formes individuelles de conflit croissantes dans les établissements français, i.e. les recours aux prud'hommes et l'action disciplinaire. L'analyse conduite révèle une relation de substitution entre l'expression collective de conflit et le recours aux prud'hommes des salariés, tandis que les grèves et autres conflits collectifs tendent parallèlement à s'associer à un recours accru des employeurs à l'action disciplinaire. Le deuxième chapitre considère explicitement cette relation, plus spécifiquement entre les grèves et l'absentéisme des salariés, dans l'estimation et l'analyse de l'effet des grèves sur la productivité du travail des entreprises françaises. L'occurrence de grèves sur la période récente passée tend à s'associer à un gain de productivité du travail dans les entreprises concernées par une faible fréquence de grèves, sous condition que celles-ci soient associées à une expression individuelle de mécontentement des salariés (i.e. absentéisme) plus faible.Le troisième chapitre examine le rôle de la dispersion salariale intra-firme dans les variations de l'activité de grève entre les établissements français. Si une forte dispersion des salaires au sein de la main d'oeuvre s'avère être un frein à la mobilisation collective des salariés dans des grèves, elle apparaît néanmoins être à l'origine d'une activité de grève plus soutenue, en termes de fréquence et de durée des grèves, dans certains établissements. / This thesis consists of three essays on the analysis of labor strikes in France, using recent data on workplaces and firms and applying various econometric methods. Very few quantitative studies, in economics, have been conducted on this issue in France, in contrast with a particularly large Anglo-saxon literature on the economic analysis of strikes. The decline of unionization and collective action of employees led however to a progressive shift in the interest of Anglo-saxon researchers, in labor economics and industrial relations, towards the study of individual labor relations between employees and employers. The individualization of jobs and labor relations is often considered as orthogonal to employee collective action. The decline of strikes and other collective disputes may have been linked, in the Anglo-saxon literature, to an increase in individual expressions of conflict and in the overall wage dispersion or inequality within firms. We propose, in this thesis, an original analysis of strikes in France, in connection with these two facets, linked to the individualization of jobs and labor relations in firms. The first chapter documents the relationship between the collective expression of conflict, including strikes, and growing individual forms of conflict in French workplaces, i.e. Employment Tribunal (or prud'hommes) claims and disciplinary action. It is shown that the collective expression of conflict and Employment Tribunal claims are substitutes in French workplaces, while strikes and other collective disputes increase the employer use of disciplinary action. The second chapter deals explicitly with this relationship, more specifically between strikes and employee absenteeism, in estimating and analyzing the effect of strikes on labor productivity in French firms. Strike occurrence during the recent past period tends to be associated with a surplus in labor productivity in firms affected by a low strike frequency, conditionally to a weaker employee expression of discontent (i.e. absenteeism). The third chapter discusses the role of within-firm wage dispersion in variations of strike activity between French workplaces. If a great wage dispersion among the workforce proves to be an obstacle to employee collective organization in strikes, it seems however to result in a more intense strike activity, in terms of frequency and of duration, in some workplaces.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2012GRENA036 |
Date | 06 December 2012 |
Creators | Tanguy, Jérémy |
Contributors | Grenoble, Musso, Patrick, Salmon, Claire |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French, English |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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