Le titre de notre thèse prend appui sur l’une des caractéristiques principales de notre corpus, constitué des quatre poètes que sont Henri Michaux, René Char, Edmond Jabès et Philippe Jaccottet : l’existence d’une modalité prescriptive à valeur éthique particulièrement forte dans leur production littéraire d’après-guerre, au point de justifier chez les critiques de tout acabit le recours au terme de « moraliste » pour les désigner. La thèse que nous avons entreprise se propose donc de donner des assises légitimes et raisonnées à ce qui n’a l’air a priori que d’une formule flirtant avec la subversion et le paradoxe. Qu’implique une telle caractérisation pour la lecture de nos poètes ? N’est-ce pas risquer de trahir leur esthétique poétique, mais aussi de trahir la définition même du moraliste ? L’hypothèse moraliste ne nous pousse-t-elle pas en effet à négliger le substrat métapoétique consubstantiel à l’écriture de nos auteurs ? Ce portrait du poète en moraliste, dès lors qu’il n’est plus une simple formule mais une véritable hypothèse de lecture, ne permet sans doute pas de prendre en compte la complexité du phénomène prescriptif, qui se décline également sur un mode métapoétique. Non seulement ces deux modalités de prescription ne sont pas exclusives l’une de l’autre, mais elles tendent à coïncider l’une avec l’autre ; s’il est des principes de vie énoncés par le poète, ils sont indissociables et superposables à des règles d’écriture nettement établies. Les poètes de notre corpus, loin d’hériter de la morale et de l’esthétique du Grand Siècle, seraient bien les héritiers du XXe siècle, et l’existence d’une indéniable teneur éthique au cœur même de leur poésie se justifierait sans doute par d’autres modèles littéraires… et sapientiaux. / The idea behind the work “Prescribing & writing: questioning the portrait of the poet as a moralist (Michaux, Char, Jabès & Jaccottet)” came from the observation of a misleading but incredibly frequent use of the term “moralist” in the 20th Century literary criticism, specially when applied to describe poets. The misuse of the term “moralist” turned out to be the consequence of its impressionist and versatile definition in the field of the 20th Century studies. Referring to a 20th century writer as a moralist implies, without anachronism intended, that there is some sort of continuity of this type of writing from the Grand Siècle to modern times. In addition, the very artificial link we could indeed try to establish between the two poetics, through the hypothesis of a trans-secular moralist poetics, seems indeed to leave aside a whole other aspect of our poets’ work. If the elements of an ethic we may find in their work are undeniable, the metapoetic reflection is just as important, if not more. The hypothesis of these poets as moralists do not enable the critics to read together the ethic and the poetics which cannot be dissociated, because they are one. The common denominator of our four poets is their incredible ability to create an “art poétique who is also an “art de vivre” and conversely. Michaux, Char, Jabès and Jaccottet shape an ethic which is a poetics and a poetics which is an ethic, so that the relationship to the reader they program also corresponds with the relationship to the other, inside the human community. Don’t these corresponding shapes of the ethic and the poetics evoke another sapiential and literary model than the seventeenth century moralists?
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2019SORUL093 |
Date | 14 November 2019 |
Creators | Meydit-Giannoni, Valentine |
Contributors | Sorbonne université, Jarrety, Michel |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text, Image |
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