La présente recherche entend analyser les emplois occupés par des migrants dits « sans-papiers », originaires majoritairement de la vallée du fleuve Sénégal, à Paris, à la lumière des processus de régularisation par le travail dont ils sont l'objet. En mobilisant les notions d'« identités de papiers » (Dardy [1991] 1998 ; Noiriel, 1998, 2007 ; Bruno, 2010) et d'« interstices de jeu », la thèse, basée sur une approche sociologique qualitative et inductive, cherche à mettre à jour les mécanismes et logiques à l’œuvre dans la mise au travail d'une population particulière qui est celle d'étrangers en situation irrégulière. Aussi, l'absence d'un titre de séjour en règle a-t-il pour effet la mise en relation de ces migrants avec des secteurs d'emploi déterminés dans un espace économique particulier, et pour lesquels les emplois observés relèvent du marché du travail dit secondaire, voire exogène, aux formes d'emploi précaires et instables. Si les migrants rencontrés acceptent ces emplois précaires et quelque peu dévalorisés, c'est parce que le travail (et le salariat qu'il permet) définit les situations migratoires observées. Pour autant, l'adéquation entre une offre et une demande de travail tire en partie sa légitimité de l'État français. Aussi, les processus de régularisation par le travail en viennent-ils à déterminer partiellement la rencontre entre cette offre et cette demande de travail, la justifier en la normalisant pour partie. Du reste, si l’État en vient à légitimer cette rencontre, c'est aussi au moyen d'une récupération au profit d'une « instrumentation » (Lascoumes, 2003) de la figure du « Travailleur Sans-papiers », énoncée et revendiquée par la grève de 2008-2010. En somme, l'observation des situations d'emploi (notamment dans la répétition des postes occupés et des formes d'emploi) amène à considérer la constitution d'une population au travail, permise par la reconnaissance par l’État de la figure du « Travailleur Sans-papiers ». Les procès de régularisation au titre du travail dessinent la figure du « Travailleur Sans-papiers » et décident si l'étranger en situation irrégulière peut être régularisé par le travail ou non, par le jeu de catégorisations que produit l’État. Et la thèse défendue est la suivante : l'emploi des migrants dits « sans-papiers » s'arrime à des logiques économiques qui assurent la mise en place et la permanence de formes d'emploi particulières. Ces formes d'emploi se nourrissent de la précarité des postes occupés et de la relation salariale contractée. Dans le cas des migrants rencontrés, elles renvoient à la production de formes d'infra-citoyenneté, sous-tendues par des logiques politiques (dans la gestion des flux migratoires et des politiques de main-d’œuvre) que la régularisation par le travail vient couronner. La figure du « Travailleurs Sans-papiers » telle que l'a promue la grève de 2008-2010, mais reprise dans les processus de régularisation au titre du travail, est alors l'archétype du travailleur régularisable et le travail des sans-papiers en est sa logique-même. Ils sont tous deux déterminés par un dispositif singulier de biopolitique. / This research deals with the employment of undocumented people from the Senegal valley, in Paris and the legalization processes. Mobilizing the two concepts of "identify of papers" Dardy [1991] 1998; Noiriel, 1998, 2007; Bruno, 2010) and "interstices of game", this doctoral thesis, based on an sociological and inductive approach, highlights the mechanisms and logics that are inherent to putting undocumented people into work. From there, the lack of residence permit implies the inscription of these migrants in specific sectors of activities. Therefore, employments are registered in the secondary labour market, if not an exogenous market, where employment and its forms are very precarious. If migrants take these jobs, it is because work is the key parameter in the migratory situations. The balance between supply and demand of labour draws its legitimacy from the French State. Indeed, leglization processes determine this balance, and justify it by normalizing it. The legitimacy of French State is allowed by a recovery and "instrumentation" (Lascoumes, 2003) of the figure of "Undocumented Worker", which was first introduced during the strike of 2008-2010. In other words, the employment situations lead to discuss of the production of a specific labour force by the State. The legalization processes are based on the figure of "Undocumented Worker" and by this manner elect the alien in an irregular situation who will be regularized. This lead to formulate the following argument: the employment of undocumented migrants is due to economic logics which establish specific forms to putting undocumented people into work. This is guaranteed by precariousness of status employments, enables to produce forms of a low citizenship that political logics reinforce. Thus, the legalization process supports this perspective. The figure of "Undocumented Worker", from the strike of 2008-2010, is used by the French State to justify the legalization process by work. All these elements are included by a manner of governing that is attached to a particular scheme of biopolitic.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2016USPCB215 |
Date | 23 November 2016 |
Creators | Zougbede, Emeline |
Contributors | Sorbonne Paris Cité, Agulhon, Catherine |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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