Une récente théorie de la mémoire a proposé que lorsqu'un souvenir déjà bien consolidé est réactivé, il redevient labile et susceptible aux modifications avant d'être restabilisé (reconsolidé) en mémoire à long terme. Ce nouveau modèle réfute le modèle classique de la consolidation qui propose qu'une fois consolidés, les souvenirs soient permanents et donc résistants aux effets des agents amnésiques. Les études validant la théorie de la reconsolidation abondent chez les animaux, mais encore peu d'études ont été réalisées chez les humains.
L'objectif de cette thèse est de vérifier, dans une population de sujets sains et de sujets souffrant de trouble de stress post-traumatique (TSPT), l'efficacité d'un agent pharmacologique, le propranolol (un β-bloquant noradrénergique) à atténuer des souvenirs émotionnels nouvellement acquis ou déjà bien consolidés.
Plus spécifiquement, nous avons mené un essai clinique contrôlé à double insu chez des sujets sains en leur administrant du propranolol (vs du placebo) lors de l'acquisition d'un nouveau souvenir et une semaine plus tard, lors de sa réactivation. L'objectif du premier article était d'évaluer l'efficacité du propranolol à diminuer la consolidation et la reconsolidation d'un souvenir émotionnel. Par ailleurs, puisque les études chez les animaux ont démontré que ces deux processus mnésiques s'effectuent à l'intérieur d'une fenêtre temporelle précise, le moment de l'administration du propranolol fut pris en considération. Les résultats ont démontré que le propranolol est en mesure de diminuer la consolidation et la reconsolidation d'une histoire émotionnelle tel que démontré par un pourcentage de bonnes réponses plus faible que le groupe contrôle lors des rappels. Toutefois, pour que cet effet soit observé, le propranolol doit être administré une heure avant la présentation des stimuli, pour la consolidation et une heure avant leur réactivation, pour la reconsolidation.
En outre, les études portant sur la consolidation et la reconsolidation chez les animaux et chez les humains obtiennent parfois des résultats contradictoires. Ceci pourrait s'expliquer par le type de stimuli utilisé. Ainsi, l'objectif du second article était de préciser quel type d'information est le plus susceptible d'être affecté par le propranolol lors de son acquisition (consolidation) et lors de sa réactivation (reconsolidation). Pour ce faire, les éléments de l'histoire émotionnelle ont été divisés en fonction de leur valence (émotionnel ou neutre) et de leur centralité (central ou périphérique). Les résultats ont démontré le propranolol affecte l'ensemble des informations centrales lors du blocage de la consolidation, mais qu'il affecte plus spécifiquement les éléments émotionnels centraux lors de la reconsolidation.
Notre groupe ayant précédemment démontré que le traitement avec le propranolol est en mesure de réduire les symptômes de TSPT chez une population clinique, nous nous sommes interrogés sur son efficacité à diminuer la mémoire implicite d'un événement traumatique. Le propranolol a été administré aux participants à 6 reprises (une fois par semaine sur une période de 6 semaines) lors de la réactivation de leur trauma. Les résultats ont révélé que le traitement avec le propranolol est en mesure de diminuer la réponse psychophysiologique des participants à l'écoute du compte rendu de leur trauma une semaine et 4 mois suivant la fin du traitement.
En somme, cette thèse démontre que le propranolol est en mesure de bloquer la consolidation et la reconsolidation de souvenirs émotionnels chez l'humain lorsqu'il est administré une heure avant l'acquisition ou la réactivation des souvenirs. Il arrive en outre à atténuer un souvenir déclaratif émotionnel chez des sujets sains, mais également un souvenir implicite chez des sujets souffrant de TSPT. Ainsi, ces résultats ouvrent la voie à la création de nouveaux traitements pour les psychopathologies ayant comme étiologie un souvenir émotionnel intense. / A recent theory of memory proposes that when a well-consolidated memory is reactivated, it becomes labile again and susceptible to change before being restabilized (reconsolidated) in long-term memory. This new memory theory refutes the classical model of consolidation, which suggests that once consolidated, memories are permanent and hence resistant to the effects of amnestic agents. Studies validating reconsolidation theory in animals abound, but fewer studies have been conducted in humans.
The objective of the current thesis is to verify the potential of the pharmacological agent propranolol (a β-blocker) to impair newly acquired or already consolidated emotional memories in healthy subjects and subjects suffering from posttraumatic stress disorder (PTSD).
We conducted a double blind controlled trial where propranolol (vs. placebo) was administered to healthy subjects during the acquisition of a new memory (an emotionally valenced story) and one week later, during its reactivation. The aim of the first paper was to evaluate the efficacy of propranolol to reduce the consolidation and reconsolidation of emotional memories. Furthermore, since animal studies have shown that these two memory processes occur within a given time window, the timing of the propranolol administration was taken into consideration. The results showed that propranolol was able to dampen the consolidation and reconsolidation of an emotional story as evidenced by a lower percentage of correct answers at recall compared to the control group. However, to observe this effect, the propranolol needed to be administered one hour before the presentation of the story at consolidation and one hour before it’s reactivation at reconsolidation.
While consolidation and reconsolidation studies in animals and humans have yielded conflicting results, this may depend on the type of stimuli used. The objective of the second paper of this thesis was to determine what type of information is most likely to be affected by propranolol during acquisition (consolidation) and reactivation (reconsolidation). To do this, the elements of the emotional story were divided according their emotionality (emotional vs. neutral) and centrality (central vs. peripheral). The results demonstrated that propranolol blocks the consolidation of all central information, but it affects selectively the central-emotional story elements at reconsolidation.
Our group previously demonstrated that treatment with propranolol is able to reduce the symptoms of PTSD in a clinical population. In this thesis, we investigated whether it could also reduce the implicit memory of a traumatic event. Propranolol was administered on 6 different occasions (once a week over a period of 6 weeks) to participants upon reactivation of their traumatic event. The results unveiled that treatment with propranolol was able to decrease the participants’ psychophysiological responses to their traumatic script at one week post-treatment and at the 4 months follow-up.
In sum, this thesis reports results suggesting that propranolol is able to block the consolidation and reconsolidation of emotional memories in humans when it is administered one hour before acquisition or before reactivation. Furthermore, this thesis suggests that propranolol impairs selectively central-emotional type of information and that it has the ability to dampen declarative emotional memory in healthy subjects, but also implicit memory in subjects suffering from PTSD. Hence, these results open the way to create new treatments for psychopathologies having at their core an intense emotional memory
Identifer | oai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/11671 |
Date | 08 1900 |
Creators | Thomas, Émilie |
Contributors | Brunet, Alain |
Source Sets | Université de Montréal |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Thèse ou Mémoire numérique / Electronic Thesis or Dissertation |
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