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La figure de la savante ignorante dans la Relation de 1654 de Marie de l’Incarnation et la Vie par elle-même de Madame Guyon

Le XVIIe siècle français connaît un engouement pour la mystique, qui se pense alors comme une « Science des Saints » et développe ses pratiques, ses discours et son propre champ disciplinaire. Cette science mystique prône une approche anti-intellectuelle de la connaissance, une abnégation de la pensée et une indéfinition du savoir, dont le sens, difficilement accessible, doit demeurer caché. Les mystiques, et particulièrement les femmes, présentent ainsi un rapport paradoxal à la connaissance. Parce qu’elles sont reconnues pour entretenir un lien direct avec Dieu et pour leur cheminement religieux marqué par l’extraordinaire, les femmes de ce courant spirituel apparaissent favorisées. Leur ignorance, caractère déjà rattaché à la spiritualité mystique, mais plus accentué chez elles en raison de la nature de leur sexe, les élève au rang de sujet spirituel privilégié. François de Sales a notamment pensé ce renversement de valeurs, en insistant sur la « savante ignorance » de ces saintes. À partir de ce paradoxe, ce mémoire s’attache à dégager une figure de la savante ignorante dans deux autobiographies spirituelles du XVIIe siècle, la Relation de 1654 de Marie Guyart, dite de l’Incarnation et la Vie par elle-même de Jeanne-Marie Bouvier de La Motte, dite Madame Guyon. Il propose d’étudier la façon dont ces deux autrices font leur et transforment, chacune à sa façon, cette figure. Bien plus qu’une simple désignation, le double caractère « savant » et « ignorant » de la femme mystique pose une tension entre des manières d’être, des approches du monde, des attitudes et des compétences opposées. Le paradoxe établi par François de Sales mérite en ce sens d’être déplié et approfondi. Nous nous y appliquerons, en suggérant qu’il traverse tout le sujet, influençant sa construction et sa représentation et qu’il implique l’ensemble de l’œuvre : la figure de la savante ignorante se trouve à même les formes de discours, les procédés d’énonciation et les tours stylistiques, elle s’incarne dans la narration et la structure du récit et appelle à différentes stratégies de légitimation. / The French 17th century nourishes a keen interest for mysticism, conceived as a “Science of the
Saints”, with its own disciplinary field, practices and discourses. This mystic science advocates an
anti-intellectual approach to knowledge, a denial of thought as theory and differentiation, a process
difficult to fathom and better kept hidden. The mystics, and women in particular, have a paradoxical
relation to knowledge. Believed to have a direct connection do God and a religious path marked
by the extraordinary, the women of this spiritual movement appear privileged. Their ignorance, a
trait already attached to the mystic way, but more accentuated in their case due to the nature of
their gender, raises them to the rank of a privileged subject. François de Sales reflected this value
reversal by insisting on the “savante ignorance” when speaking of these holy women. On the basis
of this paradox, this thesis seeks to present the figure of a “savante ignorante” in two spiritual
autobiographies of the 17th century: the Relation of 1654 by Marie Guyart, also known as Marie de
l’Incarnation, and Life by herself by Jeanne-Marie Bouvier de La Motte, also known as Madame
Guyon. It proposes to study the way these two authors address this figure and transform it in their
own way. More than a simple designation, the double nature of the mystic woman as “savante” and
“ignorante” creates a tension between opposite ways of being and of approaching the world, and
within attitudes and skills. In this sense, the paradox established by François de Sales deserves to
be developed and deepened. We will apply ourselves to do so by proposing that this paradox cuts
through every aspects of the subject, influencing the construct and the representation of the self,
and ultimately influencing the entire work of the author: the figure of the “savante ignorante” can
be found throughout the forms of the discourse, the processes of enunciation and the stylistic
choices; it is embedded in the narrative structure and calls for different strategies of legitimation.

Identiferoai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/27904
Date08 1900
CreatorsGuité-Verret, Stéphanie
ContributorsSribnai, Judith
Source SetsUniversité de Montréal
Languagefra
Detected LanguageFrench
Typethesis, thèse
Formatapplication/pdf

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