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Beyond the Brouillard: Les représentations linguistiques chez les jeunes adultes émergeants en situation francophone minoritaire

Dans la communauté de langue française à Halifax, on dit que les jeunes qui y sont scolarisés en français « disparaissent dans le brouillard » après la fin de leurs études secondaires. L'expression qui sous-entend qu'au départ du milieu scolaire, au moment de la transition vers l'âge adulte, ces jeunes vont mener une vie complètement en anglais, langue majoritairement parlée en Nouvelle-Écosse. Pour tenter de mieux comprendre ce « brouillard » et les jeunes adultes qui y « disparaissent », j'ai mené un projet d'étude en sociolinguistique, avec une approche critique. Selon les études menées il y a trente ans sur les transitions de phase de vie et les représentations linguistiques, les représentations linguistiques à l'adolescence seraient en flux constant, pour ensuite se stabiliser à l'âge adulte. Cependant, cette conception du parcours de la vie qui suppose un passage direct de l'adolescence à la vie adulte n'est plus d'actualité dans le contexte nord-américain. Là, les recherches soulignent que le passage vers une vie adulte normative est non seulement prolongé, mais que les marqueurs typiques de la vie adulte sont remis en question, principalement due aux contraintes socio-économiques structurelles vécues par les jeunes adultes d'aujourd'hui. On dénomme ce prolongement comme « Emerging Adulthood ». D'ici, je pose la question: qu'arrive-t-il aux représentations linguistiques lors de l'Emerging Adulthood, surtout dans le contexte des jeunes adultes qui ont été scolarisés à l'école de langue française à Halifax qui, pour emprunter l'expression, « disparaissent dans le brouillard »?
Ayant effectué des entretiens semi-dirigés avec 7 jeunes adultes issus de la communauté de langue française d'Halifax, on constate que les représentations linguistiques vis-à-vis de la langue française sont ambivalentes; Ces représentations sont informées par les diverses expériences personnelles liées au français, notamment par le parcours scolaire à l'école de langue française. Cette expérience scolaire lègue aux participant.e.s un bagage linguistique particulier: elle est à la fois un point rassembleur identitaire pour les participant.e.s et aussi un rappel constant de leur rapport d'altérité avec les identités des majorités, en particulier, les locuteurs de l'anglais à Halifax ainsi que les locuteurs du français venant de milieux où le français est la langue majoritaire. Également, les participant.e.s à l'étude ont tou.te.s exprimé.e.s avoir vécu des conflits avec les idéologies normatives des idéologies linguistiques véhiculées par les institutions de langue française à Halifax, les mettant alors à l'écart des milieux dans lesquels iels ont grandi.
Bien qu'iels démontrent une versatilité linguistique entre l'anglais et le français, les participant.e.s de l'étude font preuve d'insécurité linguistique à la fois par une invalidation identitaire et linguistique dans les instances de contact avec des francophones d'ailleurs, mais aussi de la part de la communauté de langue française d'Halifax. Les participant.e.s font partie de deux mondes, tout en étant identifié.e.s comme « autre » dans chacun d'eux.
Cela dit, ces représentations linguistiques développées à l'adolescence, qui ont largement informé les trajectoires des participant.e.s quant à la gestion des langues dans leur quotidien, ne sont pas nécessairement déterminantes de leurs représentations et comportements linguistiques à l'âge adulte. La capacité de naviguer différents espaces ayant de différentes influences linguistiques permet aux participant.e.s de construire et s'approprier leurs identités linguistiques à l'âge adulte, de manières uniques et dans les espaces qui comptent pour eux. Or, le fait d'être Emerging Adult, c'est-à-dire, ne pas être ancré de manière fixe dans des circonstances de vie liées aux marqueurs normatifs de la vie adulte, permet aux participant.e.s une flexibilité quant à l'appropriation du français dans leur quotidien, pourvu que ces espaces soient accessibles et linguistiquement inclusifs. Ceci leur permet de tisser un rapport avec la langue française au-delà des expériences vécues lors de leurs années formatrices à l'adolescence.

Identiferoai:union.ndltd.org:uottawa.ca/oai:ruor.uottawa.ca:10393/45940
Date09 February 2024
CreatorsBoutin, Daniel Jean-Pierre
ContributorsMcLaughlin, Mireille
PublisherUniversité d'Ottawa / University of Ottawa
Source SetsUniversité d’Ottawa
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
TypeThesis
Formatapplication/pdf
RightsCC0 1.0 Universal, http://creativecommons.org/publicdomain/zero/1.0/

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