Parmi les écailles constituant ce domaine qualifié aujourd'hui de " zone subbriançonnaise", il en est une qui semble étrangère à ses voisines: la zone du Versoyen. Située à l'W. du col du Petit-Saint-Bernard, s'allongeant entre Bourg-Saint-Maurice (Savoie) et le village de la Thuile (Province d'Aoste), cette unité est enclavée entre la zone des Brèches de Tarentaise à l'W. et au N.-W., et le "front " du domaine houiller briançonnais, vers l'E. et le S.-E., mais séparée de lui par la zone du Petit-Saint Bernard. La zone du Versoyen doit son individualité à une très grande abondance d'ophiolites plus ou moins métamorphiques, y compris des serpentinites, et à quelques " écailles" importantes de gneiss. La plupart des auteurs ont jugé nécessaire d'écarter momentanément le Versoyen et ses ophiolites des hypothèses paléogéographiques portant sur le domaine pennique. Deux hypothèses s'affrontent en effet pour expliquer la présence de ces roches volcaniques et de ces gneiss dans la zone subbriançonnaise, par ailleurs quasi dépourvue de ces faciès: on peut envisager tout d'abord une parenté paléogéographique avec les unités subbriançonnaises environnantes; nous pourrions peut-être avoir ainsi, en quelque sorte, la prolongation vers le S.-W. de l'eugéosynclinal valaisan selon R. TRÜMPY (1955b, 1960) ; mais on pourrait postuler au contraire sa présence en tant que klippe prise en involution au front de la Nappe du Grand-Saint-Bernard (zone briançonnaise s. lato) et appartenant à une unité supérieure, d'origine interne, largement charriée et localement érodée aujourd'hui (Nappe des schistes lustrés s. lato). Cette dernière explication est celle qui est admise pour le Mont-Jovet, unité assez proche du Versoyen. Nous avons subdivisé notre travail en deux parties descriptives : la première concerne l'ensemble du Versoyen avec ses ophiolites et ses schistes, ainsi que d'autres phénomènes. La deuxième partie est consacrée à la description de la Pointe-du-Clapey ; cette montagne possède des caractéristiques pétrographiques exceptionnelles, mais est en même temps, par certains côtés, le prototype des massifs situés à la bordure interne (dans le sens alpin du terme) de la zone du Versoyen.

La region étudiée s'étend de Bourg St-Maurice (Savoie) à la Thuile (Val d 'Aoste-Italie) , entre la vallée du Reclus et le torrent du Versoyen. Elle correspond à la partie centrale de la zone du Roignais-Versoyen définie par Antoine (1971). . L'Etude pétrographique et géochimique des roches volcaniques basiques a été détaillée grâce aux analyses à la microsonde électronique des pyroxènes reliques et aux dosages des éléments de transition en traces (Cr, Ni, Co, V). Le volcanisme du Versoyen, d 'extension limiitée, s'est mis en place sous forme de sills dans une série pélitique meuble. Au sein des sills les plus épais (10 à 80 m) a été mise en évidence l' existence d'une différenciation sous faible pression partielle d'oxygène, à partir d'un magma tholéiitique hybride (caractère océanique avec quelques tendances continentales). Une spilitisation affecte, au cours de leur refroidissement, les dolérites cristallisées; il s'agit d'un processus hydrothermal se traduisant par la destabilisation de l'olivine, du plagioclase et dans une moindre mesure,du pyroxène, avec un gain en Na, Li, H20 et une perte en Ca, Sr, K, Ba, Rb. L'existence de sources hydrothermales liées à la spilitisation est établie. L'ensemble de ces formations a subi des recristallisations métamorphiques poussées lors de la phase éoalpine (plisse- ments isoclinaux d 'axe N50°). Une paragenèse Schistes Verts à glaucophane précède une paragenèse Schistes Verts de molndre pression. Le contrôle chimique de l'apparition de la première paragenèse est très marqué. Le massif basique de la Pointe du Clapey, au Sud de la région étudiée, est distingué du volcanisIne crétacé du Versoyen, sur des critères pétrographiques géochimiques et structuraux. Afin d 'expliquer la genèse de ce massif, l'hypothèse d 'un volcanisme liasique dans le bassin des calcschistes du Petit St - Bernard est proposée. Les volcanismes liasique et crétacé qui ne constituent en aucune manière des complexes ophiolitiques, sont dus à la distension d'une bordure continentale fragile.