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Construire des ponts, rompre des liens : repenser les solidarités entre groupes féministes majoritairement blancs et féministes racisées et musulmanesBranthonne, Adeline 09 1900 (has links)
Le 8 mars 2023, la Coalition Avenir Québec refuse à l’Assemblée nationale du Québec de débattre d’une motion sur la Journée internationale des droits des femmes qui propose d’encourager l’usage de l’analyse différenciée selon les sexes dans une perspective intersectionnelle (ADS+) « afin de défendre les droits de toutes les femmes au Québec ». Le refus de débattre de cette motion déposée par Québec Solidaire sous la demande du Collectif 8 mars, composé de la Fédération des femmes du Québec et de plusieurs organisations syndicales féministes, provoque une levée de boucliers de multiples organisations féministes majoritairement blanches. Des féministes noires et racisées s’en amusent : à quel point la notion d’intersectionnalité a-t-elle été blanchie, vidée de sa substance, pour qu’on attende d’un gouvernement qui refuse de reconnaitre le racisme systémique qu’il l’endosse?
L’intersectionnalité est devenue extrêmement populaire dans de nombreuses organisations féministes majoritairement blanches et est souvent utilisée pour tenter de repenser leurs solidarités avec des militantes et des groupes de féministes racisées. Cette thèse se penche sur la manière dont des organisations féministes majoritairement blanches s’adaptent ou résistent aux critiques formulées par des femmes racisées et musulmanes dans leurs pratiques de solidarités en leur sein et avec d’autres organisations. Elle se concentre sur la Fédération des femmes du Québec en tant qu’organisme majeur de la scène féministe québécoise mais aussi pour son adoption officielle de la notion en 2015 et son refus progressif de participer au « rituel d’empowerment de la gouvernementalité blanche » (Bilge 2015) qui trace les frontières de la nation sur le corps des femmes musulmanes.
Cette thèse s’appuie sur une littérature classique sur les alliances de mouvements sociaux et sur des littératures féministes et des critical race studies sur la construction de solidarités qui s’attaquent plus frontalement la question des relations de pouvoir en leur sein. Elle étudie l’effet du contexte politique en s’appuyant sur les approches du processus politique et de la mobilisation des ressources tout en montrant la façon dont les cadrages de ces opportunités, menaces et ressources influencent ces solidarités. Cette recherche explore les luttes de sens autour de ces processus au travers des notions de cadrages et de structures d’opportunités discursives. Enfin, elle analyse la façon dont ces solidarités, définies à partir d’une perspective intersectionnelle, sont traduites en termes de pratiques organisationnelles et de dynamiques émotionnelles au sein de la fédération.
L’apport principal de la thèse se situe dans sa manière d’articuler les dimensions structurelles, discursives, pratiques mais aussi émotionnelles du travail de construction de solidarités en questionnant particulièrement leur dimension conflictuelle, non comme un obstacle à surmonter mais comme un révélateur de chantiers essentiels au féminisme. / On March 8th 2023, the Coalition Avenir Québec declined debating a motion on International Women’s Day advocating for the use of a gender differentiated policy evaluation tool through an intersectional lens (« Analyse différenciée selon les sexes ») in order to defend the rights of every woman in Quebec. This refusal to debate this motion introduced by Québec solidaire for the Collectif 8 mars, a collective formed by the Fédération des femmes du Québec and several feminist unions, caused the outcry of many (predominantly white) feminist organisations. A few black and racialized feminists were quite (and not so quite) amused at that outrage: Is this how far intersectionality whitening have gone? The notion has been emptied of its essence to the point many expect a government that refuses to acknowledge systemic racism to endorse it.
Intersectionality has become extremely popular in numerous predominantly white feminist organisations and is often used to try to rethink their solidarities with racialized women’s groups and activists. This dissertation examines the ways in which predominantly white feminist organizations adapt or resist criticisms formulated by racialized and Muslim women in their solidarity practices within themselves and with other organizations. It focuses on the Fédération des femmes du Québec as a major organization on the Quebec feminist scene, but also because of its official adoption of the notion in 2015 and its gradual refusal to participate in the “empowerment ritual of white governmentality” (Bilge 2015) which traces the borders of the nation on Muslim women’s bodies.
Drawing on social movement theory on coalition building and also on feminist and critical race studies on solidarities, this dissertation focuses on the inner workings of power struggles in its praxis. Building on political process and resource mobilization theories, it focuses on the effects of political context while showing how the framing of political opportunities, threats and resources influence the praxis of solidarity. Looking into struggles for meaning around those processes, it shows how the realities of a “fractioned discursive opportunity structure” helps us to understand framing activities beyond a trade-off between cultural resonance and a movement’s set of ideals.
Articulating structural, discursive, practical but also emotional dimensions of solidarity building through an intersectional lens, this dissertation centers on conflictual aspects of those solidarities not as an obstacle to overcome but as a revealer of the blind spots that needs to be worked on, of feminism as a work in progress.
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