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Que veut dire richesse ? Du Travail, de l'Argent, du Don et du Vivre Ensemble à Bokokopé (Togo). Une analyse des politiques et pratiques de développement à partir des institutions.

N'Djambara, Mahamondou 06 June 2014 (has links) (PDF)
" Eyu ", l'Homme, naît riche, c'est la société qui l'appauvrit par le biais des institutions qui établissent les catégories de pensée et les règles sur lesquelles les individus s'appuient pour penser et agir. À Bokokopé au Togo, des migrants de l'ethnie dite kabyè bénéficient de projets de développement, notamment en agriculture et en élevage. Le but de ces projets est d'augmenter le revenu de ces paysans, garanti d'une amélioration de conditions de vie et de bien-être. Mais les différents acteurs de ce processus ne partagent pas ce style de pensée qui lie le bien-être au revenu. Ce qui entraine, des difficultés à s'entendre sur les indicateurs à adopter lors des différentes évaluations. L'outil principal des techniciens du développement est le cadre logique. Il s'agit d'un tableau à double entrées qui enregistre, d'un côté la logique interne de l'activité à mener, et de l'autre les critères de mesure. Toute action non-logique et non mesurable est par conséquent presque exclue. C'est ainsi que, lorsque Hazou décide par exemple de revendre sa chèvre "à perte" en justifiant qu'il "gagnait en amitié", cela suscite interrogation. Pourquoi résiste-t-il au calcul de rentabilité, moyen incontournable pour améliorer son revenu ? Cette réticence à tout calculer, tout quantifier et tout marchandiser peut se comprendre en se référant à la perception du monde qu'ont les acteurs en présence à Bokokopé ainsi que des rapports qu'ils entretiennent avec le travail et l'argent dans une perspective du vivre ensemble. Leurs actions sont déterminées par plusieurs mondes de pensée qui fluctuent entre des principes marchands portés essentiellement par certaines organisations de développement, et des principes non-marchands véhiculés principalement par des mythes ou des rites auxquels adhèrent les membres de la communauté. Pour les techniciens du développement qui accompagnent ces paysans, la richesse se mesure en argent et en quantité de biens et services produits ou acquis. Les biens difficilement quantifiables et les services gratuits en sont exclus. Dans le monde de pensée dominant à Bokokopé, la richesse, " ñɩm ", ne saurait se limiter à la seule dimension quantitative et mesurable en argent et en biens accumulés qui n'est qu'une manifestation de la représentation de l'Univers Réel (matériel) à côté duquel se mêlent l'Humanité réelle (psychique), l'Univers Sur-réel (religieux) et l'Humanité Sur-réelle (spirituel). La richesse, " ñɩm ", serait donc une eurythmie de ces quatre dimensions qui pré-existe à " Eyu ", l'Homme.

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