Entre la plate-forme urgonienne et la bordure septentrionale du bassin vocontien, les assises barrémo-bédouliennes du Vercors, de la zone de Borne et du Dévoluy sont caractérisées par des variations constantes d'épaisseur et de faciès dues à une évolution paléogéographique complexe. L'étude stratigraphique est basée sur la répartition des Orbitolinidés et des Ammonites d'une part, sur l'analyse séquentielle d'autre part. Du point de vue paléontologique, les associations d 'Ammoni tes, plus riches en grandes espèces circalittorales que les successions pélagiques de la coupe stratotypique d'Angles, de même que les Orbitolinidés representés par 43 espèces, permettent de définir trois périodes de stabilité de faune (Barrémien inférieur, Barrémien supérieur, Bédoulien) séparées par trois périodes de renouvellement de durée apparemment plus courte (Bil, Bi6 sommital-Bs1, BsAi-Ai1 basal). Les périodes de stabilité du Barrémien inférieur et du Barrémien supérieur ont été elles-mêmes subdivisées en deux niveaux grâce à l'examen du degré d'évolution des Orbitolinidés et du contenu spécifique des associations tant d'Orbitolinidés que d'Ammonites. Du point de vue séquentiel, la succession Hauterivien terminal - Bédoulien inférieur a été découpée dans toute cette région en 38 séquences de deuxième ordre regroupées en 13 séquences de troisième ordre (= membres) et quatre mégaséquences. Ces dernières permettent la définition de trois formations carbonatées superposées : les calcaires bioclastiques de Borne,* les calcaires à débris de Glandasse et les calcaires urgoniens. L'étude sédimentologique aboutit à la mise en évidence de deux modèles de sédimentation carbonatée - haut-fond et plate-forme - ainsi qu'à la description des remaniements synsédimentaires sur la bordure du bassin vocontien. Les hauts-fonds, de surface restreinte, sont caractérisés par une sédimentation bioclastique et oolitique de milieux marins modérément à fortement agités, non confinés, appartenant au moins à l'étage infralittoral (hauts-fonds du Trièves et du Vercors méridional entre l'Hauterivien terminal et le Barrémien supérieur basal). La plate-forme, d'une superficie souvent très importante, se distingue du haut-fond par la présence d'un domaine interne généralement très développé, caractérisé par des milieux temporairement émergés (médio- à supralittoral) ou marins peu profonds (médio- à infralittoral), mais toujours parfaitement protégés et fréquemment confinés (plate-forme urgonienne au Barrémien supérieur et au Bédoulien inférieur). Dans les deux cas les faciès à Cnidaires peu développés ne constituent pas de barrière morphologique entre le domaine interne et le talus externe. Les remaniements gravitaires affectent principalement les faciès bioclastiques du talus externe des hauts-fonds ou de la plate-forme urgonienne. Resédimentés dans le bassin vocontien, ils correspondent principalement à des coulées sableuses dans lesquelles se distinguent des séquences proximales d'épaisseur plurimétrique et des séquences distales décilnétriques, semblables à des turbidites. Plus rarement s'observent des coulées boueuses dans lesquelles le mélange vase autochtone-sable allochtone est complet. L'importance croissante de ces remaniements synsédimentaires entre la base et le sommet de chaque membre et, surtout, de chaque mégaséquence paraît indépendante de la mobilité du socle et témoigne d'une instabilité croissante des dépôts bioclastiques sur le talus externe pendant les périodes de progradation des faciès de plate-forme. L'étude paléogéographique a permis de détailler les trois grandes étapes de l'évolution de ce secteur entre le sommet de l'Hauterivien et l'Aptien. De l'Hauterivien terminal au Barrémien basal (membres HsBi-Bi1, sommet de la mégaséquence 5) les coulées sableuses constitutives des calcaires bioclastiques de Borne proviennent d'un haut-fond, apparu et développé à cette époque dans le Trièves méridional le long de la faille de Menée (haut-fond du Trièves), mais dont on ne connaît pas les caractères sédimentologiques en raison de l'érosion des assises correspondantes. Du Barrémien basal au Barrémien supérieur basal (membres Bi2-Bs1, mégaséquence 6) le Vercors méridional est caractérisé, au voisinage de la faille de Menée et sur la bordure septentrionale du bassin vocontien, par l'apparition, puis le développement du haut-fond du Vercors méridional. Outre les faciès bioclastiques qui dominent, ce haut-fond est caractérisé par l'importance des faciès oolitiques et l'existence de nombreuses petites bioconstructions à Cnidaires. La progradation des faciès, faible vers le SE, est au contraire très importante vers le NW. Du Barrémien supérieur au Bédoulien (membres Bs2-Ai2, mégaséquences 7 et 8) la superficie couverte par la sédimentation carbonatée s'accroît considérablement tandis que les faciès se différencient. Les faciès à Rudistes qui étaient absents sur les hauts-fonds, caractérisent le domaine interne de la plateforme. Développée d'abord à partir du haut-fond du Vercors méridional,la plateforme urgonienne englobe rapidement d'autre hauts-fonds apparus à cette époque plus au Nord en bordure de la basse Isère et enfin s'anastomose aux platesformes voisines pour constituer une vaste plate-forme urgonienne péri-vocontienne. Cette évolution est perturbée au début du Bédoulien par des arrivées massives de matériel terrigène, responsables de l'individualisation d'une sédimentation localement détritique (marnes inférieures à Orbitolines). Une deuxième perturbation, beaucoup plus importante (transgression du Bédoulien terminal , interrompt définitivement cette évolution de la sédimentation carbonatée. D'un point de vue plus général, deux types de passages latéraux ou verticaux de faciès ont été reconnus entre le domaine interne de la plate-forme (ou le sommet des hauts-fonds) et le talus externe : - à l'Est et au SE le premier est caractérisé par la prépondérance des faciès bioclastiques grossiers et l'absence généralisée des bioconstructions à Cnidaires conservées (secteur "au vent" situé face à la houle mésogéenne) ; - au Sud, le second est caractérisé par l'importance des bioconstructions à Cnidaires, la prépondérance des faciès bioclastiques fins et la rareté des faciès bioclastiques grossiers (secteur relativement protégé, situé "sous le vent"). L'étude paléostructurale a montré que deux grands accidents NE-SW paraissent avoir fonctionné à cette époque: les failles de l'Isère au NW et de Menée au SE. Traduite par l'effondrement de leurs compartiments SE et la stabilité ou la surrection de leur compartiment NW, cette mobilité tectonique paraît responsable : - de la création des hauts-fonds du Trièves et du Vercors méridional à l'Hauterivien terminal et au Barrémien basal; - de l'inversion régionale des vitesses de subsidence au début du Barrémien supérieur (crise du Barrémien supérieur basal), phénomène ayant permis le développement de la plate-forme urgonienne ; - de l'effacement progressif de la sédimentation carbonatée dans le Vercors SE entre le Barrémien supérieur et l'Aptien terminal. La coïncidence des paroxysmes relatifs de la mobilité du socle, des limites des mégaséquences et des périodes de renouvellement des faunes d'Orbitolinidés et d'Ammonites n'est probablement. pas un effet du hasard. Il semble qu'elle soit due à l'influence d'événements géologiques majeurs agissant sur la sédimentation et les peuplements de la plate-forme urgonienne et de la bordure nord-vocontienne. Ces derniers pourraient appartenir à deux catégories : - des événements atectoniques, d'origine eustatique, tel que la transgression du Bédoulien terminal responsable des lacunes finibédouliennes du Vercors, du développement des faciès urgoniens dans les Pyrénées et surtout de la disparition des faciès à Rudistes sur les plates-formes urgoniennes du SE de la France ; - des événements tectoniques, locaux ou régionaux, échos possibles des vicissitudes de l'expansion océanique dans l'Atlantique (crises de la limite Hauterivien - Barrémien, du Barrémien supérieur basal, de la limite BS3-BsAi).

Ce travail aborde le Nummulitique alpin et consiste en une étude détaillée d'une coupe implantée dans la partie orientale de la structure d'Annot : coupe du Fa. Il s'agit d'une aire de sédimentation à caractères très particuliers.

La couverture paléogène du Pelvoux (zone externe des Alpes occidentales françaises) a été étudiée du col du Lautaret au Champsaur oriental. Une analyse séquentielle, une étude des micro faciès et des microfaunes ont été réalisées sur 49 coupes complètes levées dans cette région après qu'une cartographie détaillée en ait été dressée. Une analyse structurale fine et une étude géochimique ont complété l'examen de quelques secteurs . .\ :. La trilogie nummulitique (dépôts successifs de sédiments de nature calcaire puis marneuse et enfin gréseuse) est transgressive sur le socle cristallin du Pelvoux ou sur des lambeaux de Mésozoïque conservés malgré les érosions antérieures. La découverte d'une microfaune bartonienne dans le SE du massif (où le plus souvent la base du Paléogène est priabonienne) et les reconstitutions paléogéographiques que nous avons effectuées, permettent de cerner le diachronisme de la transgression qui chemine du S vers le N et d'E .Un détritisme omniprésent se manifeste dans la série,provoqué par deux facteurs : 1- une alimentation en débris fins provenant, d'une part, des affleurements de Cristallin constituant à l'époque un Pelvoux embryonnaire, et d'autre part, des nappes internes qui se mettent en place dans la partie orientale du bassin marin tertiaire. 2- une alimentation en détritiques grossiers,d'origine très locale et liée à l'existence de fractures à jeu synsédimentaire Nl70-l8O. L'héritage structural triasique, liasique, néocrétacé et/ou paléocène, joue un rôle fondamental dans la paléogéographie éocène de cette région, comme d'ailleurs lors de la structuration postnummulitique du Pelvoux. Il consiste plus particulièrement en une fracturation probablement issue du rifting téthysien (N30- 40 et NI70- I8O) et, à l'E, par la reprise en chevauchement avant le Nummulitique, de grands accidents subméridiens tel celui du rocher de l'Vret. La situation géographique de ce dernier au front du poinçon que représente le Pelvoux, a permis son écaillage postérieurement au dépôt des sédiments tertiaires. Au SE, on observe la reprise dextre de fractures N50- 60, le faisceau des Grésourières qui s'engagent dans l'accident d'Ailefroide (N30-40) dont le jeu décrochant permet le chevauchement du Sirac vers l'WSW sur le synclinal de Morges . Ces déformations s'accompagent d'un train de plis dans les Grès du Champsaur, d'une schistosité de flux et d'un étirement des Marnes nummulitiques qui constituent un niveau au décollement privilégié dans la série tertiaire, et enfin de dissolutions importantes dans les calcaires nummulitiques. Tous ces phénomènes sont essentiellement liés à la progression des nappes internes versl'extérieur de l'orogène . Ils sont beaucoup plus discrets au N où l'on note seulement le jeu sénestre du faisceaude failles du Lautaret N110, symétrique de celui de Grésourières, au sud du poinçon du Pelvoux.

Le Lias ardéchois montre d ' importantes variations de faciès et d'épaisseur. De plus la coexistence de faciès détritiques grossiers et de faciès carbonatés marins laisse supposer une activité tectonique synsédimentaire intense. Je me suis donc consacrée à l'étude du Lias inférieur et moyen du bassin de Privas , dans lequel les formations de cette période affleurent relativement bien. Il s'agira ici de rassembler le maximum de données (paléontologiques,stratigraphiques et sédimentolog iques) avec deux objectifs principaux : -la reconstitution paléogéographique du bassin aux divers étages étudiés; -la mise en évidence de l'activité tectonosédimentaire par l'in termédiaire de l'analyse Séquentielle de la série, basée sur des observations détaillées tant sur le terrain qu'en laboratoire.

Le but de cette étude sédimentologique et biostratigraphique est de définir l'évolution des paléoenvironnements des Calcaires urgoniens du domaine delphino-helvétique, de part et d'autre de la vallée de l'Arve, pour la période comprise entre l'Hauterivien supérieur et l'Aptien. Trois coupes ont fait l'objet de recherches particulièrement poussées: dans la zone la plus interne du massif des Bornes stricto sensu (Rocher de Cluses), dans la chaîne des Aravis (Bella Cha et Grande Forclaz), massif de Platé (Flaine). Dans ces régions, l'étude de la mise en place de la plate-forme. urgonienne à l'Hauterivien supérieur et au Barrémien inférieur a conduit à reconnaître trois domaines marins (hors des domaines subaériens): le talus, la plate-forme externe et la plate-forme interne. Au sein de ceux-ci, sept milieux de dépôt ont été définis: milieu de bassin et de pente, marin ouvert (circa- et infralittoral), lagon plus ou moins ouvert et protégé, lagunaire à lacustre, et milieu "transgressif'. Ces différents environnements sont caractérisés par 23 types de microfaciès, recensés et décrits dans ce travail. L'étude biostratigraphique et l'analyse séquentielle ont permis de proposer un découpage des dépôts de cette plate-forme carbonatée, complètement inédit. La nouvelle biozonation basée sur les orbitolinides, proposée par SCHROEDER & al., et calée sur l'échelle des ammonites, constitue un nouvel outil stratigraphique, en tout cas pour les dépôts de l'Hauterivien supérieur et du Barrémien inférieur. De ce fait, les unités reconnues dans les différentes coupes de Calcaires urgoniens ont été datées à la zone d'ammonites près, ce qui autorise la corrélation des milieux carbonatés de plate-forme avec ceux qui caractérisent le bassin. D'autre part, les nouvelles connaissances acquises en stratigraphie séquentielle permettent de proposer des coupures au sein du grand cycle régressif de 2ème ordre qui débute à l'Hauterivien inférieur (fin de la Zone à Radiatus) et se termine au Barrémien supérieur (Zone à Feraudi). En effet, un certain nombre de séquence de 3ème ordre ont été reconnues et identifiées en se fondant soit sur des critères basés sur l'évolution des milieux de dépôt, soit sur des données paléontologiques (échinides, ammonites, orbitolinides), soit sur des connaissances à la fois sédimentologiques et paléontologiques. Ainsi dans la coupe des Calcaires urgoniens du Rocher de Cluses, ont pu être identifiées les séquences Ha6, Ha7 et Bal, Ba2, Ba4, Bdl, Bd2; ici a donc été mis en évidence l'absence de dépôts durant les périodes des séquences Ba3 et BaS. A Flaine, les séquences ont été reconnues pour Ha7, Bal, Ba2, Ba4 et BaS; la séquence Ba3 étant peut être représentée par quelques mètres de sédiments. Dans la chaîne des Aravis, les coupes de Bella Cha et de la Grande Forclaz ont permis de reconnaître respectivement les séquences HaS, Ha6, Ha7, Bal, Ba2 et HaS, Ha6, Bal, Ba2, Ba3, Ba4, BaS.

La série du Mont Ventoux, datée du Cretace inferieur, montre l'installation progressive de faciès urgoniens. La paléogeographie est controlée par des mouvements de blocs basculés profonds. Ce système est determiné par des failles normales dont la présence guide la structuration cénozoique. Lors des compressions pyrénéennes et alpines, la deformation de ce cadre donne naissance aux grandes failles en coulissement ainsi qu'aux chevauchements qui correspondent ainsi à des failles-pli. La reconstitution du profil paléogéographique permet de comparer et de quantifier les phénomènes sédimentaires. Les rythmes hémipélagiques sont mis en correspondance avec les alternances pélagiques tandis que leur spécificité s'identifie par les paramètres de composition de la matière organique. Toutes ces études s'appuient sur la cartographie de détail de cette région, réalisée dans le cadre de la carte géologique de la France au 1/50000, feuille Vaison-la-Romaine

Les complexités locales de la tectonique, la nécessité de préciser l ' importance et les effets de chaque phase orogénique m'ont conduit à insister particulièrement sur la stratigraphie (série allant de l' Oxfordien au Pliocène) pour: - Obtenir, d'une part, une série parfaitement identifiée et datée; - Pouvoir, d'autre part, identifier avec certitude, quant à leur âge, certains affleurements isolés qui constituaient des points clés. Dans ce but 150 points fossilifères environ ont été étudiés; de même,plus de 300 échantillons ont été recueillis en vue d ' études micropaléontologiques et pétrographiques. Le lien étroit existant entre les mouvements orogéniques et les facteurs paléogéographiques (variations de facies et mode de dépôt) m'ont conduit à adopter le plan suivant pour la présentation des résultats obtenus : Pre m i è re par t i e, Stratigraphie: description de la série et corrélations avec les régions voisines. Deu xi ème partie, Description tectonique : présentation des faits observés sans interprétation. Troisième partie, Paléogéographie: interprétation des données de la première partie et d 'une partie de celle de la seconde quand les faits stratigraphiques sont conditionnés par les phases orogéniques antérieures. Quatrième partie, Age des mouvements : interprétation définitive et reconstitution de l'histoire géologique du massif de Suzette.

Le travail qui m'a été confié comportait deux principaux axes de recherche. Il s'agissait tout d'abord de mettre au point des méthodes d'analyse quantitatives, pour étudier les processus de mise en piace des sédiments. Ensuite, d'utiliser toutes les informations enregistrées dans le sédiment pour reconstituer la paléogéographie du bassin . Le terrain servant de support à cette étude est localisé dans les chaînes subalpines méridionales, entre Saillans et la Tinée, et de Gap à Castellane . La période étudiée comporte deux étages, le Valanginien et l'Hauterivien Situés entre les deux pôles calcaires symétriques du Tithonique et du Barrémien, ils sont le domaine des alternances marno-calcaires, le pôle marneux correspondant au Valanginien moyen . Les alternances sont interrompues par des faisceaux contournés dont l'abondance et la diversité justifiera une étude particulière. Les sédiments détritiques (calcarénite, brèche) sont relativement rares. Ils seront ici essentiellement considérés par le biais de leurs relations avec le phénomène de l'alternance et du glissement synsédimentaire . Leur importance paléogéographique, non négligeable, sera soulignée.

La série stratigraphique du Jurassique briançonnais est caractérisée notamment par : - une lacune entre Lias et Dogger, correspondant à l'émersion temporaire de la plate-forme carbonatée .. héritée du Trias - le retour à la sédimentation de plateforme, intervenant au cours du Bathonien - le passage à la sédimentation pélagique profonde , réalisé dès l'Oxfordien moyen, Les preuves de l'émersion du Lias-Dogger résultent d'arguments indirects, réunis également dans les Préalpes et la Vanoise. Les formations dites "sidérolitiques" de la région de Briançon ne peuvent cependant pas être rattachées à cet épisode malgré l'interprétation traditionnelle ; il semble qu'elles datent plutôt de la fin du Tertiaire ou du début du Quaternaire . L'analyse stratigraphique et sédimentologique détaillée de la série transgressive du Jurassique moyen briançonnais a permis de reconnaître plusieurs discontinuités sédimentaires soulignées par des surfaces d'érosion et de discordance avec conglomérats, hard-grounds et filons sédimentaires, permettant de définir trois termes (ou séquences) principaux datés du Bathonien supérieur pour l'essentiel et par endroitde la base du Malm pour le plus élevé. La sédimentation de cette troisième séquence est contemporaine d ' une tectogenèse distensive qui détermine d'une part un début d'enfoncement et de l'autre la différenciation d'une morphologie marquée, responsable de la production de brèches, de l'existence de lacunes et d'érosions profondes atteignant par endroit le substratum siliceux, permo-werfénien . Ces évènements vont conduire au passage à la sédimentation en milieu pélagique profond, passage enregistré par une succession de faciès caractéristiques à partir des dépôts de plate-forme du Bathonien. Un tel enchaînement de faciès a été repéré en de nombreux endroits et à diff érentes époques dans le Jurassique méditer ranéen il permet de comprendre de quelle façon un domaine de plate-forme a été i ntégré progressivement à la marge continentale puis au domaine bathypélagique de l'océan Téthysien

Cette étude a pour but de retracer l'évolution paléogéographique du bassin delphino-helvétique savoyard et de sa marge jurassienne du Tithonique au Valanginien. Elle consiste en une analyse biostratigraphique et sédimentologique détaillée des séries continentales à marines d'âge tithonique à valanginien du Jura franco - suisse et des chaînes subalpines septentrionales du SE de la France. Grâce à l'imbrication des faciès marins et continentaux qui caractérise le Jura méridional durant le Berriasien, les échelles biostratigraphiques mésogéennes d'ammonites et de calpionelles utilisées pour dater les faciès hémipélagiques du domaine deiphino- helvétique ont pu être corrélées avec une biozonation continentale mise au point récemment par mon collègue P.O. Mojon (Univ. Genève) sur la plateforme jurassienne à l'aide des charophytes et des ostracodes d'eau douce. A l'échelle régionale, cet outil de corrélation a permis de préciser la position stratigraphique de la limite Jurassique-Crétacé, de comprendre quels étaient, en domaine de plate-forme, les mécanismes à l'origine des érosions sous-marines, des resédimentations et des condensations mises en évidence dans le bassin subalpin puis de proposer une reconstitution paléogéographique ainsi qu'un découpage séquentiel de la marge jurassienne de la Téthys selon les concepts de la stratigraphie physique. La mauvaise corrélation entre le découpage Séquentiel des dépôts du Jurassique terminal- Crétacé basal des domaines jurassien, présubalpin et subalpin et celui proposé par HAQ et al. (I987) suggère que l'évolution paléogéographique du bassin delphino-helvétique (domaine subalpin) et de sa marge jurassienne entre le Kimméridgien et l'Hauterivien inférieur, ne dépendait pas des seules variations du niveau marin. Un contrôle tectonique est venu moduler le signal eustatique à plusieurs reprises, notamment au passage Jurassique-Crétacé (limite des Zones A et B), au cours du Berriasien inférieur-moyen (Zone B supérieure-terminale) et durant le Valanginien inférieur. Il a retardé, atténué ou annulé les effets des variations eustatiques négatives tandis que les remontées relatives du niveau marin continuaient de s'enregistrer fidèlement. Parallèlement, une structuration, héritée ou non, de type blocs basculés, a contrôlé l'organisation sédimentaire du bassin delphino- helvétique savoyard. Durant le Berriasien et le Valanginien, l'architecture de ce dernier s'articulait alors autour de deux sillons d'accumulation sédimentaire d' orientation SSW-NNE qui étaient séparés, dans la partie septentrionale du domaine d'étude, par le haut-fond du massif cristallin des Aiguilles Rouges. La sursédimentation et l'organisation sédimentaire des dépôts berriasiens et valanginiens qui ont assuré le comblement du sillon occidental sont caractéristiques d'un prisme d'accumulation sédimentaire situé en bordure de plate-forme. Ce dernier correspond à la zone présubalpine dont la différentiation paléogéographique est intervenue dès le Berriasien inférieur. Ces résultats montrent que pendant la période d'accrétion océanique téthysienne, amorcée à la fin du Dogger et/ ou au début du Malm (LEMOINE 1982), la marge jurassienne de la Téthys continuait d'enregistrer une activité tectonique synsédimentaire distensive dont les effets sont particulièrement bien visibles au sein des dépôts du Crétacé basal.