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Normes émotionnelles et jugement social: étude de l'influence de la perception du sentiment de culpabilité d'un transgresseur sur les processus d'attribution d'une peine en fonction de son appartenance culturelleLeys, Christophe 06 April 2011 (has links)
Juger est un processus particulièrement ardu. Malgré le cadre légal, le cerveau humain est soumis à de nombreuses influences. Il recueille, consciemment ou non, des informations de provenances variées lorsqu’il est face à une situation. De nombreux travaux ont mis en évidence des influences externes aux faits, comme la beauté du prévenu, l’aspect horrible des preuves ou les caractéristiques physiques des noirs par rapport aux blancs, qui influenceraient les jurys populaires aux Etats-Unis. En revanche, peu de travaux se sont intéressés aux émotions du prévenu et à l’influence qu’elles pourraient avoir sur les juges. Dans cette optique, deux chercheurs de l’Université libre de Bruxelles, Christophe Leys et Laurent Licata, ont étudié l’influence de la perception de la culpabilité, en tant qu’émotion, sur le jugement pénal.<p><p>Ils ont accepté de résumer pour Justice-en-ligne le fruit de leurs recherches.<p><p>Le sentiment de culpabilité est essentiel dans le cadre d’un jugement parce qu’il induit celui qui la ressent à réparer son tort, que ce soit symboliquement, par des excuses, ou concrètement par des actes, comme le remboursement des dommages occasionnés.<p><p>Une première étude a montré qu’un prévenu, pris en flagrant délit, se sentant coupable sera moins sévèrement condamné que s’il ne se sent pas coupable, car il est perçu comme plus sociable, que son délit a tendance à être attribué à des circonstances externes, et qu’il semble moins susceptible de récidiver. Dans une seconde approche nous avons voulu savoir si l’influence des sentiments de culpabilité et de colère était la même en fonction de l’origine ethnique du prévenu, belge ou maghrébine. Lorsque l’on teste la présence ou l’absence de culpabilité et de colère, on obtient quatre comportements possibles du prévenu, qui peut :<p><p> se sentir coupable et ne pas être en colère ;<p> se sentir coupable et être en colère ;<p> ne pas se sentir coupable ni être en colère ;<p> ne pas se sentir coupable et être en colère.<p><p>Le premier et le dernier comportement sont attendus :la culpabilité va de pair avec une absence de colère et inversement. Par contre, la présence conjointe de culpabilité et de colère, ou l’absence de culpabilité et de colère sont des comportements surprenants. Dans le cas d’un prévenu belge, les comportements attendus conduisent à une sanction sévère, alors que les comportements surprenants conduisent à une peine plus modérée. Paradoxalement, exprimer de la culpabilité et pas de colère n’est donc pas une stratégie payante pour le prévenu car elle revient à reconnaître les faits sans évoquer de circonstances atténuantes. En revanche, un prévenu qui se sent coupable mais qui est en colère contre la société induit l’idée qu’il a compris sa transgression, mais que des circonstances atténuantes l’excusent partiellement.<p><p>Dans le cas d’un prévenu maghrébin, la situation diffère légèrement. Les Maghrébins souffrent de deux stéréotypes culturels (c’est-à-dire des croyances répandues dans la société à propos de leur groupe) négatifs à propos de ces émotions :ils sont perçus comme se mettant facilement en colère et comme se sentant rarement coupables. Il semble que les participants soient influencés, consciemment ou non, par ces stéréotypes. La condition cohérente, qui joint l’absence de culpabilité à la présence de colère conduit, comme pour le prévenu belge, à une peine sévère. Rien d’illogique :si un prévenu ne se sent pas coupable et de plus se rebelle, il ne doit pas s’attendre à de la clémence. Par contre, les deux conditions inattendues qui mènent à une peine moins sévère au prévenu belge n’ont pas cet effet chez le prévenu maghrébin. Tout se passe comme si, dès qu’il agit en accord avec ne fût-ce qu’un des stéréotypes négatifs de son groupe, il est puni sévèrement. Dès lors, s’il ressent de la colère ou qu’il ne se sent pas coupable, la peine est sévère. Par contre, lorsqu’il contredit ces stéréotypes, qu’il se sent coupable et n’est pas en colère, il est moins sévèrement puni. De toutes les conditions, Belges et Maghrébins confondus, c’est la situation qui conduit à la peine la plus basse. Il semble que, pour les prévenus maghrébins, les participants ne se soient pas tant centrés sur l’attribution de facteurs externes que sur une autre dimension, non pertinente chez un prévenu belge :le niveau d’intégration à la culture belge. Un maghrébin qui se sent coupable et n’est pas en colère est perçu comme bien intégré à la culture belge et moins condamné.<p><p>Peut-on parler de discrimination ?<p><p>Dans l’état actuel des recherches, il n’est pas question de discrimination, mais bien de raisonnements différents. Pour pouvoir invoquer la discrimination, il faudrait mettre en évidence plusieurs éléments :d’une part, ces études concernent essentiellement un échantillon de personnes qui ne sont pas magistrats, bien qu’une partie de l’échantillon était formée au droit. Même si aucune différence n’a été observée entre cet échantillon et le reste des participants, formés à d’autres disciplines que le droit, il se peut que les magistrats aient développé, par l’expérience, des stratégies de contrôle de ces effets.<p><p>D’autre part, la peine dépend avant tout du comportement émotionnel ;dès lors, si l’on imagine une situation dans laquelle tous les prévenus réagissent sans se sentir coupables et en étant en colère, la peine sera uniformément sévère quelle que soit l’origine. Par contre, si tous les prévenus réagissaient en se sentant coupables et en n’étant pas en colère, nos études sugèrent que ce sont les prévenus belges qui seraient discriminés. Les prévenus maghrébins seraient également discriminés si, par exemple, tous les prévenus réagissaient de manière inattendue. Mais nous n’avons que peu d’informations sur ces comportements lors des procès.<p><p>Quelques données supplémentaires<p><p>Outre les expériences, quelques observations de terrain ont soulevé des points qui peuvent alimenter le débat. Trois approches ont été réalisées :l’observation de procès, l’entretien avec des ex-détenus et l’entretien avec des magistrats. Les deux premières visaient avant tout à investiguer la gestion des émotions en fonction de l’origine culturelle. Les prévenus d’origine maghrébine ont-ils tendance à se sentir plus ou moins coupables que les prévenus d’origine belge ?Existe-t-il des différences culturelles quant aux normes relatives à la présentation d’excuses lorsque l’on a commis un délit ?Tous les prévenus ont-ils les moyens d’observer des rituels d’excuses complexes ?<p><p>L’observation de nombreux procès révèle une corrélation très forte entre les aptitudes linguistiques perçues du prévenu et sa tendance à présenter des excuses. Plus un prévenu éprouve des difficultés à s’exprimer en français, moins les stratégies d’excuses seront utilisées. A l’inverse, les Belges semblent s’excuser plus souvent, presque systématiquement même, dès lors qu’ils ne nient pas les faits.<p><p>Les ex-détenus, indépendamment de leur origine, ne se sentent a priori jamais coupables des délits qui leur ont été reprochés. Par contre, certains disent avoir présenté des excuses au tribunal. La culpabilité, lorsqu’elle était ressentie, concernait plutôt les conséquences du délit, comme les difficultés financières auxquelles étaient confrontées les familles des détenus, la violence imprévue durant les faits, ou encore, pour un cas, le délit lui-même (vente de stupéfiant) mais justifié par le fait que l’ex-détenu était toxicomane lors des faits. Il en ressort que, dans la plupart des cas, une justification morale avait déjà été trouvée lorsque les faits ont été commis, ce qui pose la question de l’intérêt d’un éventuel repentir et de l’impact qu’il faudrait lui donner sur la peine.<p><p>Les magistrats pensent pour la plupart qu’ils sont influencés par les émotions comme le seraient le commun des mortels. Seul un magistrat estime que l’expérience permet aux magistrats de maîtriser cet effet. Cependant, aucun ne peut quantifier l’importance de l’effet sur la peine. Certains l’estiment fort limité, d’autres plus important.<p><p>Conclusions<p><p>Ces recherches et observations posent les questions suivantes :doit-on prendre en compte, de manière contrôlée voire légiférée, l’effet des émotions comme la culpabilité sur la peine et, si oui, comment ?Dans certains pays, comme le Japon, les excuses ne peuvent pas être prises en compte. En effet, un prévenu s’excusera dans 99 % des cas, simplement parce que les normes de l’honneur l’imposent. Dès lors, alors que les excuses pourraient être interprétées comme un aveu de la transgression, elles ne sont pas autorisées car même un innocent pourrait s’excuser normativement. A quelles conclusions arriverions-nous si nous devions lever ce débat en Belgique ? / Doctorat en Sciences Psychologiques et de l'éducation / info:eu-repo/semantics/nonPublished
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Conceptions et expériences des hommes amérindiens ayant vécu des incidents de violence conjugale au QuébecEllington, Lisa 23 April 2018 (has links)
La violence conjugale est une problématique sociale très répandue au sein des peuples autochtones (Jones, 2008). Malgré ce constat, les travaux de recherche sur le sujet ne sont pas légion et ont été majoritairement réalisés auprès de femmes ou d’intervenants, le discours des hommes étant éclipsé par la perception qu’ont les chercheurs de la problématique. Cette recherche vise alors à rendre compte de l’expérience et du point de vue des hommes amérindiens ayant vécu des incidents de violence conjugale au Québec. L’analyse de contenu des neuf entrevues réalisées suggère la nécessité de considérer l’interaction dynamique et l’influence mutuelle de différents facteurs (historiques, environnementaux, individuels et culturels) qui façonnent les conceptions de la violence conjugale et les logiques d’action des hommes amérindiens. Ce mémoire met également en lumière la diversité des rôles joués par ces derniers lors des incidents, qu’ils soient les instigateurs et/ou les victimes, à travers les différents types de violence dans lesquels ces rôles s’inscrivent (violence conjugale situationnelle ou terrorisme conjugal).
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Genre et carrière professionnelle: enjeux identitaires et dilemmes normatifs dans le phénomène du "plafond de verre" / Gender and professional career: identity stakes and normative dilemmas in the "glass ceiling" phenomenonCasini, Annalisa 31 October 2008 (has links)
Ce travail propose une réflexion sur les obstacles, souvent "invisibles", qui contribuent à maintenir les femmes aux niveaux inférieurs de la hiérarchie professionnelle. Ce phénomène a été baptisé « plafond de verre ». L’asymétrie des profils professionnels entre hommes et femmes est interrogée à partir d’une approche constructiviste multidisciplinaire profitant des contributions conjointes de l’histoire, de la philosophie, de la sociologie et de la psychologie sociale. L'introduction théorique propose une réflexion sur les déterminants historiques et psychosociaux de l’asymétrie du masculin et du féminin dans leurs rapports au pouvoir et au travail. Les théories des Représentations Sociales (Moscovici, 1961), de l'Identité Sociale (Tajfel & Turner, 1986) serviront de cadre conceptuel à l’ensemble du travail. Les antécédents psychosociaux du « plafond de verre » sont étudiés au travers d’une série de 6 études. La première explore le vécu et les représentations des femmes évoluant dans un contexte professionnel masculin tel que la politique et montre l’existence chez elles d’une tension entre les normes instrumentales en vigueur dans ce contexte et l’approche relationnelle qu’elles voudraient promouvoir. La deuxième et la troisième études explorent respectivement les représentations sociales de l’« emploi idéal pour soi » et de la « réussite » chez des jeunes universitaires (garçons et filles) en partant du présupposé qu’afin de mieux comprendre les stratégies différenciées de mobilité ascendante chez les deux sexes, il est important d’interroger les représentations sociales liées à la sphère professionnelle que les uns et les autres possèdent avant d’y être intégré-e-s. Enfin, trois études empiriques testent l’hypothèse générale selon laquelle la sous-représentation des femmes aux niveaux supérieurs de la hiérarchie sociale pourrait résulter des discordances qui existent entre, d’une part, les normes de genre endossées par les individus (i.e. féminine vs. masculine) ainsi que le niveau d’identification au genre et, d’autre part, les normes sous-tendant la culture des organisations. Les résultats suggèrent l’existence d’une telle incompatibilité normative et de son impact potentiel sur les stratégies de mobilité ascendante./Adopting a constructivist and multidisciplinary perspective, the present dissertation questions the “hidden obstacles” contributing to maintain women in the lower positions of the professional ladder, a phenomenon called “glass ceiling”. Framing our work in the social representations theory (Moscovici, 1961) and the social identity theory (Tajfel & Turner, 1986), we address the asymmetry in men’s and wome’s careers trough 6 study. Study 1 explores the representations of Belgian politician women with regard to their personal professional experiences and their relation to the normatively masculine political functioning. Furthermore, a second set of studies starts from the idea that, in order to understand women’s and men’s professional mobility strategies, we have to take social representations related to the professional domain into account. Hence, study 2 and 3 explore respectively the social representations of « an own ideal job » and of « a successful life » amongst young students of both sexes. Finally, studies 4, 5, and 6 test the general hypothesis that the lack of women in positions of power could be partially due to the incongruence between potentially conflicting social norms. Namely, while work settings seem to induce a social norm favoring instrumental social orientations, women socialization is still characterized by the existence of prescriptions about relational orientations. Results suggest the existence of this normative inconsistency together with its potential impact on women’s professional mobility strategies. / Doctorat en Sciences Psychologiques et de l'éducation / info:eu-repo/semantics/nonPublished
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La cognition sociale à l'adolescenceh[ressource électronique] : aspects comportementaux, cliniques et cérébrauxTousignant, Béatrice 14 September 2024 (has links)
La cognition sociale comprend un ensemble de processus cognitifs spécialisés dans le traitement des stimuli sociaux, nous permettant d’interagir adéquatement avec autrui. L’adolescence est un stade développemental où ces fonctions cognitives sont particulièrement sollicitées, alors que les relations sociales augmentent en importance et en complexité. Il s’agit par ailleurs d’une période où les changements hormonaux et cérébraux sont fort susceptibles de moduler le fonctionnement cognitif. Pourtant, on n’en sait que très peu sur la capacité à décoder et interpréter les informations sociales à cet âge, et encore moins sur la façon dont une atteinte cérébrale peut altérer ces fonctions. Ainsi, la présente thèse avait pour principal objectif de mieux comprendre le fonctionnement de la cognition sociale à l’adolescence en l’examinant sous plusieurs angles. D’abord, en utilisant des mesures neuropsychologiques, la première étude a pu démontrer une plus faible capacité à reconnaître des expressions faciales émotionnelles chez les adolescents par rapport aux adultes, mais une habileté similaire à se mettre dans la perspective d’un personnage pour lui inférer divers états mentaux. Paradoxalement, un questionnaire d’empathie a révélé une tendance moindre à prendre la perspective des autres chez les adolescents, le tout suggérant une possible distinction entre l’habileté à se mettre à la place de l’autre lorsque mesurée directement et la propension à le faire dans un contexte réel. La seconde étude a ensuite démontré qu’un traumatisme craniocérébral modéré ou sévère subi à l’adolescence altère encore davantage cette tendance à prendre la perspective des autres dans la vie de tous les jours, tel que rapporté dans le questionnaire d’empathie. La dernière étude a donc utilisé un paradigme s’approchant davantage d’une interaction sociale réelle et a examiné, via la neuroimagerie fonctionnelle, la réaction empathique d’adolescents et d’adultes face à une exclusion sociale. Les résultats ont montré que dans un tel contexte, les adolescents ont effectivement moins tendance à prendre la perspective de l’autre, à ressentir sa détresse et agir de façon prosociale. Les données de cette thèse ont donc permis de dresser un portrait détaillé de la cognition sociale à l’adolescence en précisant les fonctions qui apparaissent développées, celles qui ne le sont pas complètement, et celles qui sont le plus susceptibles d’être compromises par une atteinte cérébrale. Au-delà de ces constatations, la thèse a surtout mis en lumière une plus faible tendance à utiliser ces ressources cognitives dans un contexte où d’autres pairs sont présents. En définitive, les résultats soulignent l’importance d’intervenir de façon préventive sur la cognition sociale à cet âge, tant chez les adolescents ayant un développement normal que ceux dont le développement est menacé par une atteinte cérébrale. / Social cognition refers to a set of cognitive functions specialized in the processing of social stimuli, allowing us to interact adequately with others. Adolescence is a developmental stage in which these cognitive functions are particularly solicited, as social relationships increase in importance and complexity. It is also a time when hormonal and brain changes are very likely to modulate cognitive functioning. However, very little is known about the ability to decode and interpret social information at this age, and even less about how brain damage can alter these functions. Thus, the main objective of this thesis was to better understand the functioning of social cognition in adolescence by examining it from various angles. Using neuropsychological measures, the first study was able to demonstrate a lower capacity to recognize emotional facial expressions in adolescents compared to adults, but a similar ability to put oneself in the perspective of a character and infer various mental states. Paradoxically, a self-reported empathy questionnaire revealed a lower tendency to take the perspective of others in adolescents, overall suggesting a possible distinction between the ability to put oneself in the place of others when measured directly and the propensity to do so in real life. The second study then demonstrated that a moderate or severe traumatic brain injury sustained during adolescence further alters this tendency to take the perspective of others in everyday life, as reported in the empathy questionnaire. The third study therefore used an experimental paradigm that is closer to real-life social interactions and examined, through functional neuroimaging, the empathic response of adolescents and adults towards social exclusion. The results showed that in such a context, adolescents are less likely to take the perspective of others, to feel their distress, and to act prosocially. The data of this thesis can thus be integrated into a detailed picture of social cognition in adolescence by specifying the functions that appear developed, those that are not fully developed, and those that are most likely to be compromised by a brain injury. Beyond these findings, the thesis has also highlighted a lower tendency to use these cognitive resources in a context where other peers are present. Ultimately, the results emphasize the importance of intervening on social cognition at this age, both in adolescents with normal development and those whose development can be compromised by brain damage.
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