La situation actuelle est passablement éprouvante à la Société Radio-Canada (SRC). Depuis 2009, le radiodiffuseur public canadien a aboli plus de 3000 postes en raisons de pressions financières de plus en plus importantes. Toutefois, le gouvernement libéral, élu en octobre 2015 promet d’injecter 675 millions $ au budget du le diffuseur public, ce qui devrait grandement accroître sa marge de manœuvre. La stratégie 2020, Un espace pour nous tous annonce un plan de réduction de la main d’œuvre et, malgré les promesses du gouvernement, la direction garde le cap sur les coupures de postes. La SRC espère ainsi naviguer à travers les profondes transformations en cours dans l’industrie des médias. De nouvelles habitudes de consommation s’implantent au sein de la population et, dans son plan stratégique 2020, Radio- Canada affiche clairement son intention de changer ses façons de faire pour s’adapter au nouvel écosystème médiatique. Comment Radio-Canada compte-t-elle effectuer les changements nécessaires tout en continuant de remplir son mandat? Est-ce que les restrictions financières limiteront les ambitions des dirigeants? Des rencontres avec des employés et des dirigeants de la SRC offrent un éclairage important sur la stratégie de l’entreprise et ce qu’elle sera en mesure d’offrir au public comme mode de transmission de l’information. En mobilisant les théories du surplus cognitif (Clay Shirky), de la longue traîne (Chris Anderson), de la créativité (Teresa M. Amabile) et des contraintes (Eliyahu Goldratt) nous dresserons un portrait ponctuel des défis qui attendent Radio-Canada et de la façon dont le diffuseur public compte les relever.

L’écosystème médiatique canadien est en pleine ébullition. La fragmentation des marchés rend graduellement obsolète le concept de télévision généraliste. Le numérique amène une netamorphose de la consommation et de l’usage que nous faisons des plateformes traditionnelles. S’ajoute un effritement des revenus publicitaires et des parts de marchés. Comme ses compétiteurs, la Société Radio-Canada (SRC) doit se réinventer. Un défi de taille s’ajoute à son fardeau : son budget se voit considérablement diminué depuis les cinq dernières années. Alors que les attentes envers la SRC sont hautes à cause de son mandat défini par la Loi sur la radiodiffusion, mais aussi par les exigences du CRTC, certains observateurs commencent à craindre que la société de la Couronne n’arrive plus à réaliser son mandat. Dès lors, une bataille de l’opinion publique s’est mise en branle. Nous avons identifié quatre acteurs qui sont appelés à réagir à cette situation. À l’aide de l’analyse de discours, nous nous sommes intéressés à la composition des différents discours, des trames narratives de chacun et de leur place dans la sphère publique. Nous cherchons à déterminer les liens et les dichotomies entre les différents discours afin de mieux comprendre comment et pourquoi les acteurs ont su transmettre les informations nécessaires à leur position dans l’enjeu.

Dans le cadre de cette thèse, nous nous sommes intéressés à la radiodiffusion publique canadienne dans un contexte où l’évolution technologique de même que des facteurs financiers obligent Radio-Canada à se réinventer par le biais de l’innovation. L’objectif de la recherche est de mieux comprendre comment s’implante l’innovation à Radio-Canada, et plus spécifiquement au sein d’une station régionale, puisque les conditions y sont plus précaires et que la polyvalence des employés y est grandement sollicitée. Les témoignages recueillis lors d’entrevues auprès de douze employés et trois cadres nous permettent de dresser un portrait détaillé de l’innovation à ICI Ottawa-Gatineau. Des stratégies de gestion adéquates apparaissent comme essentielles au succès de l’implantation d’innovations dans un contexte de convergence où les ressources sont limitées et les employés débordés. Nous présentons ainsi un aperçu de la radiodiffusion publique canadienne en région et nous analysons l’efficacité des stratégies et des choix qui en infléchissent son évolution.

En novembre 2013, une entente de 12 ans pour les droits de diffusion de hockey au Canada, d’une valeur de 5,32 milliards de dollars, entre Rogers Communications Inc. et la Ligue nationale de hockey marque un point de bascule pour la Société d’État. CBC doit alors renoncer au contrôle éditorial de son émission à succès Hockey Night in Canada et désormais gérer un manque à gagner d’environ 130 millions de dollars en revenus publicitaires annuels que lui procurait l’émission. Onze ans plus tôt, Radio-Canada perdait les droits de diffusion en français du hockey, lesquels passaient aux mains du RDS. Notre recherche étudie les défis de la Société sous la perspective de la théorie de l’économie politique des médias. Nous soulevons la question principale suivante : Qu’ont en commun et comment se distinguent les réactions de Radio-Canada et de CBC, des médias et de Patrimoine canadien à l’annonce de la disparition du hockey – d’abord en 2002 puis en 2013 – des ondes de la Société? Pour y répondre, nous avons privilégié l’approche qualitative de l’analyse de contenu. Au final, alors que la perte des droits en 2002 relève d’une question plus culturelle, en 2013, elle est généralement perçue comme étant le résultat d’un cumul de compressions budgétaires.