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La construction institutionnelle de régimes de travail contraint au Canada : les cas des immigrants permanents et des migrants temporaires : quelles mobilisations possibles?Malhaire, Loïc 08 1900 (has links)
Dans le contexte de l'effritement de la société salariale (Castel 1995), on constate au Canada une prolifération de statuts d'emplois atypiques, une flexibilisation et une précarisation du travail, ainsi qu'une augmentation du nombre de travailleuses et travailleurs pauvres. Deux formes d’emploi semblent particulièrement illustrer la pauvreté et la précarité en emploi : le travail immigrant en agence de placement temporaire et le travail migrant temporaire. Alors que le travail en agence de placement (TAP) constitue un marché du travail précaire, on y retrouve un grand nombre d’immigrants reçus, de demandeurs d’asile ou de réfugiés, employés dans des emplois sous-qualifiés, malgré des niveaux de scolarité souvent élevés. Par ailleurs, le programme fédéral des travailleurs étrangers temporaires peu-spécialisés (PTET-PS), permet aux employeurs canadiens le recrutement d’une main-d’œuvre étrangère pour des postes déclarés non pourvus par une main-d’œuvre locale, établissant des normes spécifiques d'emploi et de migration et constituant un marché du travail transnational et fortement concurrentiel au travail salarié.
La thèse interroge les processus institutionnels de construction des conditions d’accès à l’emploi pour ces deux catégories de travailleurs non natifs du Canada que sont (1) les immigrants reçus et les réfugiés insérés en emploi d’agences de placement dans le secteur de l’entreposage et (2) les travailleurs étrangers temporaires peu-spécialisés travaillant dans un abattoir. Une immersion ethnographique effectuée sur le mode de la participation observante pendant près de deux ans au Centre des travailleuses et travailleurs immigrants (CTI) à Montréal, complétée par une série d’entretiens semi-directifs réalisés auprès de travailleurs, de personnes ressources et d’intervenants du secteur communautaire, montrent que la construction de ces régimes de travail doit être analysée (1) au croisement des politiques publiques d'immigration, de la régulation du travail, des mesures d’insertion en emploi des immigrants et de l’encadrement du regroupement familial, (2) au regard des pratiques des acteurs du marché du travail (entreprises, agences de placement/recrutement, organisations professionnelles et sectorielles) et (3) en considérant les manières dont les travailleurs intègrent les conditions structurelles de l’emploi immigrant à leurs stratégies de vie personnelles et familiales.
Il ressort que l’association de statuts juridiques d’immigration et de certaines formes d’emploi structure des régimes de travail caractérisés par la captivité en emploi, construits relativement aux enjeux et aux besoins immédiats des secteurs d’activité et légitimés par une législation entravant de façon systémique l’accès des travailleurs aux droits et libertés. On observe ensuite que ces régimes de travail contraint produisent des conditions d’accès à l’emploi définies sur un continuum allant de la qualification des personnes, à leur déqualification professionnelle, à leur disqualification sociale. Alors que les travailleurs rencontrés ont la particularité d’être fixés à leur emploi précaire par des contraintes liées à leur exclusion des emplois valorisés et/ou à leurs statuts juridiques d’immigration, la thèse interroge finalement les formes possibles de mobilisation et de défense collective de leurs intérêts à travers une étude de cas portant sur des actions collectives soutenues par un groupe communautaire en lien avec des syndicats. / In the context of the erosion of the “société salariale” (wage-earning society, Castel 1995), in Canada as elsewhere, we are witnessing the proliferation of atypical employment conditions, the flexibilisation and casualization of work, and an increase in the number of working poor. Two forms of employment best illustrate poverty and precariousness in employment: immigrants working in temporary placement agencies (temp agencies) and temporary foreign workers (TFWs).
The precarious labour market of temp agency work harnesses a large number of highly educated landed immigrants, refugees and asylum seekers employed in low-skilled jobs. Moreover, the federal program for low-skilled temporary foreign workers (TFWP-LS), allows Canadian employers to recruit foreign workers for positions unfilled by the local workforce. The TFWP-LS establishes specific employment and immigration standards, thereby institutionalizing a transnational labour force competing with domestic wage-earners.
This thesis examines the institutional processes that create the terms of access to employment for two categories of foreign-born workers in Canada: (1) landed immigrants and refugees working in warehouses through temporary placement agencies and (2) low-skilled temporary foreign workers in slaughterhouses. A nearly two-year ethnographic immersion at the Immigrant Workers Centre (IWC) in Montreal, based on the “observant participation” method, complemented by a series of semi-structured interviews with workers, key informants and community sector stakeholders, showed that the construction of these work arrangements is complex. An understanding of these categories of work requires an analysis: (1) at the intersection of immigration policies, labour regulations, employment integration measures for immigrants, and regulations related to family reunification; (2) in relation to the practices of labour market actors (companies, placement/recruitment agencies, professional and sectorial organizations); and (3) in consideration of the ways in which workers incorporate the structural conditions of im/migrant employment in their personal and family life strategies and choices.
Results show that immigration status has intersected with certain forms of employment to structure work arrangements characterized by forced labour. Those work arrangements are built on the short-term needs of industries and are legitimized by legislation that systemically impedes workers' access to rights and freedoms. These constrained work arrangements lead (im)migrant workers through a deleterious process, starting with their qualification as an (im)migrant to Canada, then professional de-skilling and finally social disqualification. While the workers met in the context of this project are constrained in their precarious jobs due to their exclusion from qualified jobs and/or by their legal immigration status, the thesis concludes by exploring the possible forms of mobilization and collective defense of their interests through a case study of collective action supported by a community group in connection with trade unions.
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