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Une « liberté souvenante » : la langue romanesque de Marguerite Duras / A « recollective liberty ». The novelistic language of Marguerite DurasVaudrey-Luigi, Sandrine 18 November 2011 (has links)
Les romans durassiens confrontent tout lecteur à deux évidences intuitives et contradictoires : il y a à la fois un style et des styles de Marguerite Duras. Peut-on dès lors déceler sous une apparente hétérogénéité une unité qui permettrait de reconnaître un « style d’auteur » ? La difficulté vient assurément du fait que le style de Marguerite Duras ne cesse d’évoluer, invitant par là à lire son itinéraire de création comme dirigé vers les textes de fin. Position tenable mais naïve, dans la mesure où toute sa génération a effectué ce trajet d’une langue travaillée, largement héritée du roman de la seconde moitié du XIXe siècle, à une langue prétendument non travaillée, parfois décalée par rapport à une norme stylistique. Notre démarche consiste à interroger l’illusion téléologique en mettant d’abord à plat les configurations langagières récurrentes dans la langue romanesque. On montre que la contradiction de la diversité sous l’unité du style durassien est largement levée par la reconnaissance de patrons stylistiques : la « belle langue » et le modèle vocal. Ces catégories épilinguistiques et épistylistiques, toujours actives dans l’imaginaire de l’écrivain, ainsi que leur corollaire, le gauchissement, sont à la fois opposables, concurrentes, complémentaires, et aimantent l’ensemble de la production romanesque. Est alors interrogée la notion même d’idiolecte afin de mesurer si les récurrences observées relèvent d’une pratique générique. Plus largement, il convient de mener plusieurs confrontations qui engagent le genre, l’époque, l’histoire, afin de mesurer la part prise par Marguerite Duras à la reconfiguration du champ littéraire de la seconde moitié du XXe siècle. / Durassian novels confront the reader with two intuitively obvious but contradictory features : Duras has simultaneously both a style and multiple styles. Is it possible then to detect beneath this apparent heterogeneity a unity which would allow one to recognize a single « authorial style » ? The difficulty arises from the fact that Duras’ style never ceased to evolve, thereby inviting us to read her creative itinerary as being directed towards her final texts. This may be a tenable position, but it is also naive, given that her entire generation made the same journey from acrafted language, largely inherited from the novel of the second half of the nineteenth century, to a supposedly uncrafted language. Our approach is to question this teleological illusion by initially reconsidering from first principles the linguistic configurations that recur in the language of the novel. We show that the contradiction of diversity beneath the unity of the Durassian style is largely removed by the recognition of certain stylistic patterns :the « belle langue» and the vocal model. These epistylistic categories, and their corollary, distortion, are simultaneously opposable, competing, complementary, and magnetize the entire novelistic production. Questioned next is the very notion of idiolect, in order to determine whether the observed recurrences are the traces of a generic practice. More broadly, it is necessary to carry out multiple comparisons involving genre, period, history, in order toevaluate the part played by Duras in the reconfiguration of the literary field in the second half of the twentieth century.
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