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Emploi et préférences de fécondité en zones urbaines en Afrique subsaharienne

Zinvi, Degnon Dossou Firmin 12 1900 (has links)
La transition de la fécondité en Afrique subsaharienne a débuté tardivement et ses caractéristiques diffèrent des autres régions du monde à l’instar de l’Asie et de l’Amérique Latine, d’où le qualificatif de « African exceptionalism » qui a été avancé par Caldwell et collègues et bien d’autres auteurs. Selon les estimations des Nations Unies, l’indice synthétique de fécondité en Afrique subsaharienne est passé de 6,3 en 1990 à 4,6 enfants par femme en 2021. Sa population est estimée à 1,15 milliard en 2022, passera à 2,09 milliards en 2050 puis à 3,44 milliards en 2100. L’Afrique subsaharienne serait considérée comme la locomotive de la croissance démographique mondiale selon les projections de population des Nations Unies. Beaucoup d’études s’accordent à dire que cette forte fécondité est motivée en grande partie par une forte préférence pour les familles nombreuses. Comprendre les facteurs qui influencent les préférences de fécondité est d’une importance capitale pour anticiper la demande potentielle en matière de planification familiale, évaluer les disparités de fécondité entre les pays et les régions, et anticiper les tendances futures en matière de fécondité. Dans le même temps, une large proportion de femmes en Afrique subsaharienne participe activement au marché du travail, soit 62,2 % contre 47,4 % au niveau mondial et variant de 18,2 % au Djibouti à 83,7 % à Madagascar en 2022. L’emploi est au cœur des politiques de développement et est considéré comme un catalyseur des changements de comportements en matière de reproduction. Cette thèse examine la nature des liens entre l’emploi et la fécondité, spécifiquement le désir d’enfant additionnel, afin de mieux comprendre la dynamique de la transition de la fécondité en milieu urbain. Trois articles sont élaborés en vue d’apporter des éclaircissements sur des aspects moins étudiés de cette thématique en Afrique subsaharienne. Le premier article examine comment la relation entre l'emploi des femmes et leur désir de fécondité évolue dans le temps. L’article utilise 30 enquêtes démographiques et de santé issues du milieu urbain de 15 pays qui ont au moins deux enquêtes dont la première se situe autour de l’année 1990 et la seconde après 2010. Les résultats descriptifs suggèrent qu’une baisse du désir d’enfant additionnel est observée dans neuf pays sur 15 parmi les femmes en union allant de 0,05 % au Ghana à 0,53 % en Zambie en moyenne annuelle alors que sur la même période, le taux d’emploi des femmes a augmenté dans 12 pays sur 15, variant de 0,8 % en Tanzanie à 9,8 % au Malawi. Globalement, cette étude ne trouve pas de preuve convaincante de l’effet de l’emploi des femmes sur le désir d’enfant additionnel d’enfants en milieu urbain africain, avec peu de résultats significatifs, malgré des raisons assez fortes de s'attendre à des relations claires. Le deuxième article évalue dans quelle mesure l’effet de l’emploi de la femme sur le désir d’enfant additionnel varie selon le type d’emploi du conjoint. Le type d’emploi du conjoint, souvent non pris en compte dans les études, est susceptible de modifier la relation entre l’emploi de la femme et son désir de fécondité. Pour ce faire, nous mobilisons les récentes données des enquêtes démographiques et de santé du milieu urbain de 33 pays d’Afrique subsaharienne. Les résultats des analyses multivariées de cette étude soulignent qu’il n’existe pas un effet clair et généralisé de l’emploi des femmes sur le désir d’enfant additionnel. Cependant, certaines particularités se dégagent. Dans un premier temps, l’emploi rémunéré de la femme en dehors de l’agriculture est, d’une part, négativement associé au désir d’enfant additionnel au Burundi, en Tanzanie, au Zimbabwe, et au Tchad, et d’autre part, positivement associé au désir d’enfant additionnel en Côte d’Ivoire, au Nigéria et en Sierra Léone. Dans un second temps, un effet systématique de l’emploi salarié des femmes sur le désir additionnel d’enfant n’émerge pas pour chaque type d’emploi du partenaire. Cela suppose qu’il n’existerait pas d’effet d’interaction entre l’emploi de la femme et l’emploi de l’homme. Par ailleurs, l’effet de l’emploi de la femme sur le désir d’enfant additionnel serait plus élevé que celui de l’emploi de l’homme. Le troisième article examine quant à lui le lien entre la perception des mauvaises conditions économiques dans le contexte de résidence et le désir d’enfant additionnel dans le contexte urbain du Bénin. Nous testons l’hypothèse qu’une perception négative va avoir un effet négatif sur le désir d’enfant additionnel. Pour ce faire, nous combinons, à partir des informations géospatiales détaillées des ménages (coordonnées géographiques), les données de l’enquête démographique et de santé 2017-18 du Bénin et les données Afrobaromètre de 2016 sur les enquêtes d’opinion. Les données de l’Afrobaromètre permettent de mesurer la perception des conditions économiques. Nous limitons une fois encore les analyses au milieu urbain du Bénin. Les résultats des analyses suggèrent que les femmes qui résident dans des contextes dans lesquels les perceptions des conditions économiques sont fortement négatives sont plus susceptibles de désirer un enfant additionnel. Par contre, cette association est modérée par le niveau d’éducation des femmes. Les femmes qui ont un niveau d’éducation secondaire et plus sont susceptibles de moins désirer une prochaine naissance que leurs homologues qui n'ont pas atteint le niveau d’éducation secondaire lorsqu’elles résident dans des contextes dans lesquels l’incertitude économique est élevée. La tendance s’inverse lorsque l’incertitude économique est basse. Cette thèse s’intéresse à la dichotomie entre l’emploi des femmes et leur désir d’enfant additionnel en milieu urbain africain. Elle suscite deux questionnements que nous n’avons pas pu totalement discerner et qui pourront faire l’objet de futurs travaux. En premier lieu, la faible relation ou l’inexistence de relation entre l’emploi des femmes et le désir d’enfant additionnel exprime une réalité sociologique et économique. D’un côté, l’emploi dans ces milieux n’est pas transformateur de genre pour permettre aux femmes de décider librement, de l’autre, l’emploi demeure dans le secteur informel qui permet de le concilier plus facilement avec la fécondité. En second lieu, il se peut que les données EDS ne permettent pas de mieux cerner les nuances dans la mesure de l’emploi des femmes et des hommes. Il y manque par exemple, le nombre d’heures travaillé pour mesurer l’intensité du travail, la formalisation (contrat de travail, registre comptable, bulletin de paie) pour identifier efficacement les emplois formels et informels, le revenu de l’emploi, le lieu de travail, le travail domestique et de soins ou la pluriactivité. Nous espérons néanmoins que les résultats de cette thèse vont servir à susciter le débat sur l’emploi des femmes en Afrique. / The fertility transition in sub-Saharan Africa began later and has different characteristics compared to countries in other regions, such as Asia and Latin America. This has led to the term 'African exceptionalism' as proposed by Caldwell and colleagues and other authors. According to United Nations estimates, the total fertility rate in sub-Saharan Africa decreased from 6.3 in 1990 to 4.6 children per woman in 2021. The population of the region is projected to reach 1.15 billion in 2022, 2.09 billion in 2050, and 3.44 billion in 2100. Sub-Saharan Africa is the driving force of global population growth. Many studies agree that this high fertility rate is primarily motivated by a strong preference for large families. Understanding the factors influencing fertility preferences is important for anticipating potential demand for family planning, understanding fertility gaps between countries and regions, and anticipating future fertility trends. At the same time, a large proportion of women in sub-Saharan Africa actively participate in the labor market, with 62.2% compared to the global average of 47.4%, ranging from 18.2% in Djibouti to 83.7% in Madagascar in 2022. Employment is central to development policies and a catalyst for changes in reproductive behavior. This thesis examines the nature of the links between employment and fertility, specifically the desire for additional children, to better understand the dynamics of the fertility transition in urban areas. Three articles are developed to shed light on less studied aspects of this topic in sub-Saharan Africa. The first article examines how the relationship between women's employment and their fertility desire changes over time. It uses 30 demographic and health surveys from urban areas in 15 countries, with the first survey around 1990 and the second after 2010. Descriptive results suggest a decline in the desire for additional children among married women in nine out of 15 countries, ranging from 0.05% per year in Ghana to 0.53% in Zambia. In comparison, the employment rate for women increased in 12 out of 15 countries, varying from 0.8% in Tanzania to 9.8% in Malawi. Overall, the study finds no convincing evidence of a changing effect of women's employment on the desire for additional children in urban Africa, with few significant results despite solid reasons to expect clear relationships. The second article assesses how the effect of women's employment on the desire for additional children varies depending on the husband's type of employment. The type of employment of the husband, often overlooked in studies, can influence the relationship between women's employment and their fertility desire. For this purpose, we use recent data from demographic and health surveys from urban areas in 33 sub-Saharan African countries. The results of the multivariate analyses in this study emphasize that there is no apparent and generalized effect of women's employment on the desire for additional children. However, some specific patterns emerge. Firstly, women's paid employment outside of agriculture is negatively associated with the desire for additional children in Burundi, Tanzania, Zimbabwe, and Chad but positively associated in Côte d'Ivoire, Nigeria, and Sierra Leone. Secondly, there is no systematic effect of women's salaried employment on the desire for additional children for each type of partner's employment. This result suggests that there is no interaction effect between women's and men's employment. Moreover, the impact of women's employment on the desire for additional children is higher than that of men's employment. The third article explores the relationship between perceived poor economic conditions and the desire for more children in urban Benin in western sub-Saharan Africa. We test the hypothesis that a negative perception will negatively affect the desire for additional children. To do this, we combine detailed household geospatial information (geographic coordinates) from the 2016 Afrobarometer opinion survey data with the 2017-18 Benin Demographic and Health Survey data. The results suggest that women who live in contexts where perceptions of economic conditions are strongly negative are likely to desire a child. This association is, moreover, moderated by women's level of education. Women with secondary education or higher are less likely to desire their next pregnancy compared to those who have not completed secondary education when residing in contexts with high economic uncertainty. However, this tendency is reversed when economic uncertainty is low. This thesis highlights the dichotomy between women's employment and their desire for additional children in African urban settings. It raises two questions that we have not fully answered and which may be the subject of future research. Firstly, the weak or non-existent relationship between women's employment and the desire for additional children reflects a sociological and economic reality. On the one hand, employment in these settings is not gender-transformative enough to allow women to make decisions freely; on the other hand, employment remains mainly in the informal sector, which makes it easier to reconcile with fertility. Secondly, it is possible that DHS data do not allow for a better understanding of nuances in measuring women's and men's employment. For example, it lacks the hours worked to measure work intensity and formalization (employment contract, accounting records, payslip) to effectively identify formal and informal jobs, employment income, work location, domestic and care work, or multiple job holding. Nevertheless, we hope this thesis's results will contribute to stimulating debate on women's employment in Africa.

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