Une approche pluridisciplinaire (tectonique, géomorphologie, géophysique, forage, datation 10Be...) a été entreprise afin de caractériser les déformations tectoniques récentes en Provence. Elle a consisté à comprendre la mise en place et l'évolution des structures potentiellement sismogènes, de quantifier les taux de déplacement plio-quaternaires, et d'étudier les relations entre tectonique et érosion dans ce type de contexte présentant une déformation lente. Si les déformations pliocènes à actuelles sont contrôlées par la dynamique de la chaîne alpine, les structures résultent essentiellement de la phase de déformation pyrénéo-provençale, de la fin du Crétacé à l'Eocène moyen ; la phase « alpine » d'âge Miocène étant exprimée essentiellement entre la faille de la Moyenne Durance et celle de Salon-Cavaillon (e.g. Luberon, Trévaresse...). Les vitesses de déplacements calculées grâce à la déformation de marqueurs géologiques et géomorphologiques résultant de la crise de salinité messinienne et/ou des cycles glacio-eustatiques quaternaires sont souvent inférieures à 0,1 mm/an. Cette déformation peut-être enregistrée par des marqueurs géologiques très récents, bien que la morphologie actuelle de la région soit contrôlée essentiellement par les processus d'érosion.

La première partie de ce mémoire est une mise au point sur la notion de contraintes en tectonique cassante. Nous présentons une classification schématique des différents types d'états de contraintes que l'on trouve dans la croûte supérieure, et des déformations qui leur sont associées. Pour chaque état de contraintes, on analyse la cinématique des plans néoformés et des plans réactivés. Nous discutons ensuite à l'aide d'exemples, les limites d'application des méthodes inverses pour la détermination des états de contraintes (exemple de la méthode Etchecopar et coll.). On montre également que la prise en compte de la typologie des stries (stries pénétratives avec dissolution ou stries avec recristallisation), permet de mieux contraindre la détermination du tenseur. Dans la deuxième partie, la tectonique récente des Alpes du Sud est abordée par l'étude des paléocontraintes. 150 stations microtectoniques réparties dans les nappes de Digne, de Castellane et de Nice sont analysées. Les résultats permettent de reconstituer l'évolution du champ de contraintes depuis l'Oligocène. Celle-ci dépend des conditions aux limites propres à chaque domaine. Ainsi, la variation rapide des directions de contraintes dans les Arcs de Digne et de Nice est liée à la présence de bordures libres situées au front de ces deux nappes (respectivement les bassins de Valensole et du Var). Ces bassins ont permis l'expression de phénomènes gravitaires dans les parties internes des nappes, soumises à un uplift. La nappe de Castellane bloquée à son front par le massif des Maures montre une plus grande stabilité des directions de contraintes. La reconstruction du champ de contraintes pour la période quaternaire nous permet de déterminer la cinématique et les mécanismes aux foyers possibles des accidents qui affectent les différents domaines. Ces résultats sont comparés aux données de la sismicité historique et instrumentale.

Dans le cadre de l'installation d'un réseau de surveillance sismique en Provence Occidentale, notre étude consiste dans un premier temps : - à localiser, par différentes méthodologies d'approche de la déformation récente, les accidents tectoniques susceptibles d'être sismiquement actifs, - à caractériser les mécanismes des déformations tectoniques affectant cette région ainsi que leur répartition depuis environ 10 millions d'années, - à reconstituer le(s) champ(s) de contraintes à l'origine de ces déformations, en vue d'établir une zonation tectonique cohérente à l'échelle de la région étudiée. Dans un deuxième temps, nous définissons les relations existantes entre notre zonation tectonique, les accidents majeurs et la sismicité historique et instrumentale afin d'obtenir les caractères généraux permettant un découpage de la Provence en différents domaines sismotectoniques.