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Danser au monde : étude du mouvement dans l'espace textuel de Marguerite Duras

Peu d’études ont été faites sur le mouvement dans l’œuvre de Marguerite Duras (1914-1996). Or réécritures et répétitions qui marquent la pratique scripturaire de celle-ci permettent de penser des déplacements, des métamorphoses que cette thèse se propose de lire dans l’accompagnement de penseurs tels que Maurice Merleau-Ponty, Gilles Deleuze, Georges Didi-Huberman, et de manière plus spectrale, mais non moins essentielle, Jacques Derrida, Claude Lévesque et Maurice Blanchot. Le premier chapitre s’intéresse à « la marche-danse de la mendiante », qui prend place dans Le Vice-consul (1966). Le mouvement de perte de la mendiante se donne comme un procès de déterritorialisation sans fin où ne cessent d’opérer métamorphoses et devenirs. Cette dernière entraîne dans son rhizome des lieux où faire l’expérience d’un visible difficilement isolable de sa doublure d’invisible. Des lieux sont ainsi « créés » pour faire du « lieu dansé un espace dansant » (chapitre 2). On ne saurait cependant rendre compte du mouvement sans questionner « les rythmes de la danse » (chapitre 3) dont l’épreuve possède une puissance métamorphosante, particulièrement sensible dans L’Après-midi de monsieur Andesmas (1962). Mais le rythme est aussi ce par quoi s’ouvre le temps. Et le temps durassien plonge son lecteur aussi bien que ses personnages dans un univers où virtuel et actuel ne cessent d’échanger leurs forces. C’est alors la question de l’événement, de sa possibilité dans la rencontre et le crime, qui fait l’objet du « temps qu’entrouvre la danse » (chapitre 4). Dépositaire d’un étrange hiatus qu’elle suscite pour qu’un écart se creuse afin de dire l’événement, cette œuvre rêve finalement, à travers la langue, de l’événement inséparé dans le mouvement perpétuel du sens, dans « la danse du sens » (chapitre 5). Cependant, si le sens peut d’abord apparaître dansant parce qu’instable, il faut admettre qu’on tourne toujours autour de certains mots qui échappent. Quelque chose échappera toujours. C’est ce que le sixième chapitre, « Échappé(e) de la danse », appréhende, alors que le mouvement, qui n’a d’autre finalité que lui-même, inscrit un inachèvement perpétuel dont les réécritures témoignent. Parce qu’elle met en scène des êtres en mouvement dans une œuvre elle-même en mouvement, l’œuvre de Marguerite Duras permet de penser l’être-au-monde en danseur. / Few studies have been undertaken on movement in the work of Marguerite Duras (1914-1996). Yet, the rewritings and repetitions that mark her scripturary practice allow for the thinking of displacements, metamorphoses that the present thesis proposes to read in the company of such thinkers as Maurice Merleau-Ponty, Gilles Deleuze, Georges Didi-Huberman, and in a more spectral, but no less essential way, Jacques Derrida, Claude Lévesque and Maurice Blanchot. The first chapter is interested in “the dancing-walk of the beggarwoman”, which takes place in Le Vice-consul (1966). The movement of loss in the beggarwoman proposes itself as a process of endless deterritorialization in which metamorphoses and becomings are ceaselessly operative. The latter draws into its rhizome places in which having an experience of the visible is isolatable with difficulty from its invisible doubling. Places are thus “created” to make of the “danced place a dancing space” (Chapter 2). It would not, however, be possible to account for movement without questioning “the rhythms of dance” (Chapter 3), the ordeal of which possesses a metamorphosizing power, and is particularly sensible in L’Après-midi de monsieur Andesmas (1962). But rhythm is also that through which time is opened. And Durassian time plunges her reader as well as her characters into a universe in which the virtual and the actual tirelessly exchange forces. Thus does the question of the event, of its possibility in encounter and crime, which is the object of “time parted by dance” (Chapter 4). The depository of a strange hiatus aroused such that a distance can be excavated in order to speak the event, this work dreams, finally, through language, of the unseparated event in the perpetual movement of sense, in “the dance of sense” (Chapter 5). Nonetheless, if sense can first appear to be dancing because it is unstable, it must be recognized that one is always turning around certain words that escape. Something will always escape. That is what the sixth chapter, “Dance’s échappé(e),” apprehends, when movement, which has no finality other than itself, inscribes a perpetual incompletion to which the rewritings testify. Because she stages beings in movement in a work itself in movement, Marguerite Duras’s œuvre enables one to think the being-in-the-world as a dancer.

Identiferoai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/11608
Date04 1900
CreatorsRoy, Marie-Soleil
ContributorsMavrikakis, Catherine
Source SetsUniversité de Montréal
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
TypeThèse ou Mémoire numérique / Electronic Thesis or Dissertation

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