Ma thèse porte sur la métamorphose du travail à domicile en travail à distance. Au-delà du statut classique du salariat à domicile, le travail à distance s’actualise en effet désormais dans des statuts institutionnels, des lieux et des temporalités variés. En l’occurrence, l’analyse est centrée sur la comparaison de trois groupes professionnels : des graphistes freelance, des journalistes-pigistes et des secrétaires indépendantes. Partageant le fait d’exercer leur activité hors d’un collectif de travail, ces professionnels cherchent, chacun à leur manière, à construire et défendre un cadre spatio-temporel de travail singulier.L’enquête repose sur une série de 54 entretiens par récits de vie réalisés, dans leur majorité, au domicile des enquêtés. Elle se déploie sur trois niveaux qui se superposent. Dans un premier temps, il s’agit de souligner quelles sont les ressources et les stratégies dont disposent ces professionnels pour se maintenir sur le marché et dans quelle mesure le rapport de non-subordination physique à l’employeur pose la question de l’autonomie dans la réalisation du travail. Dans cette optique, mon enquête entre en écho avec les débats actuels sur cette « zone grise » (Supiot, 2000) qui se situe à la frontière entre le salariat et l’indépendance, et sur les formes d’hybridation qui en découlent. Dans le deuxième temps de cette thèse, il s’agit de définir la nature et de tracer les limites du cadre spatio-temporel dans lequel le travail à distance se déploie hors du cadre idéal-typique de l’organisation. Cette exploration des configurations du chez-soi de travail pose plus fondamentalement la question des effets que la distance produit sur l’identité même du travailleur. Le dernier temps de la démonstration s’attache ainsi à analyser le travail à distance non seulement comme une forme de travail atypique, mais comme une façon singulière de s’inscrire dans le monde social et d’articuler son engagement dans le travail au regard d’autres sphères d’engagement (familial, domestique, amical, personnel). Mon enquête montre que les registres de justification et les valeurs que mobilisent les individus pour définir une identité pour eux-mêmes et pour autrui sont socialement distribués. / This thesis focuses on the transformations of « home working » into « distance working ». Indeed, if homeworking has for a long time concerned only salaried workers, henceforth working at distance refers to different status of employment, workplaces and work schedules. My analysis relies on the comparison of three different types of professionals : freelance graphic designers, freelance journalists and self-employed secretaries. All of them work out of the institutional organization and try to define spatial and temporal limits for the process of work. The investigation analyses a compilation of 54 biographies based on interviews with workers carried out directly at their home. The demonstration is organized in three parts. First, it focuses on how professionnals manage to take a stand on the market and how it could be understood in terms of autonomy at work. My approach discusses the contemporary sociological works whose goal is to define new status of employement. It explores this « grey zone» (Supiot, 2000) between salaried and self-employed workers. The second part is about the concrete workplace at home and how workers manage to define their own framework. These different arrangements of working at home reflect the way individuals succeed in defending their own identity as professionnals. Finally I show that « distance working » is not only an atypical form of work, but a singular way to be part of the social world as well as to choose and switch between different commitments (domestic, personal, familial, etc.) This thesis shows how individuals use different registers of justifications and values in order to define their identity for themselves and for the others, and how this process is socially distributed.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2017EHES0138 |
Date | 24 November 2017 |
Creators | Letourneux, Frédérique |
Contributors | Paris, EHESS, Zimmermann, Bénédicte |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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