La dimension complexe de la motivation recèle, pour le chercheur, des zones d’exploration inépuisables. En matière pénale, la motivation intéresse tant le législateur que le juge. En multipliant à foison les obligations légales de motivation, le législateur invite les magistrats du siège et du parquet à fournir systématiquement les raisons de fait et de droit qui commandent leurs décisions. Par l’instauration de telles obligations, ce dernier ambitionne de confiner, si ce n’est réduire au plus haut point la marge de manœuvre du juge pénal chargé d’appliquer les règles de droit en vigueur. Le législateur veut croire, à l’aune d’un droit en réseau, qu’il est seul détenteur du pouvoir normatif. Cette attitude témoigne d’une volonté de monopoliser autour d’une seule entité le processus d’engendrement du droit. L’intention, aussi louable soit-elle d’un point de vue institutionnel, manque toutefois de réalisme, le législateur s’éloignant des contraintes d’efficacité et de qualité auxquelles le juge pénal est tenu. Parce que la motivation relève ancestralement et en premier lieu de la pratique, le juge pénal s’est facilement accommodé de ses multiples obligations de motivation. Bénéficiaire d’un instrument privilégié de communication, il a instauré des pratiques de motivation brèves et péremptoires, l’amenant de ce fait au mécanisme de création, épisodiquement de destruction du droit. Si la coopération du juge pénal au processus d’engendrement du droit constitue un enrichissement de la qualité du droit, il demeure que son absence de légitimité l’oblige à réfléchir sur une stratégie communicationnelle de persuasion et non plus seulement d’affirmation. / For the researcher’s perspective, the complex dimension of motivation offers almost unlimited scope for investigation. In criminal matters, the question of motivation is an issue of concern for both the legislator and the judge. By constantly adding legal requirements regarding the motivation, the legislator urges judges and prosecutors to systematically provide the legal and factual reasons that are the basis of their decisions. The legislator enacts such obligations in order to confine, or even strongly reduce, the margin of discretion of the criminal judge who is in charge of normative power, even in the context of interconnected lawmaking processes. This attitude reveals a desire to monopolize the lawmaking process. However praiseworthy the intention may be from an institutional point of view, it lacks realism. The legislator is moving away from the efficiency and quality constraints that the criminal judge is subjected to. As the motivation historically and firstly derives from practice, the criminal judge easily adapted to his numerous obligations regarding this matter. Benefiting from a key communication tool, he launched his brief and peremptory practices which led him to take part to the mechanism of creation, and often, destruction of law. If the judge’s participation in the production of the law enhances its quality, the judge’s lack of democratic legitimacy remains and forces him to look for a communication strategy based on persuation instead of a purely assertive approach.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2016PA01D029 |
Date | 29 September 2016 |
Creators | Yazici, Marie-Hélène |
Contributors | Paris 1, Lazerges, Christine |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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