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Identités ethnolinguistiques et acculturation dans les communautés autonomes bilingues de l'Espagne

Durant l'époque de la monarchie espagnole jusqu'au dix-neuvième siècle et durant la dictature du Général Franco au vingtième siècle (1939-1975), le mythe fondateur de construction nationale de l'Espagne était basé sur l'unité de la langue castillane et de la culture espagnole. Les politiques assimilationistes et exclusionistes ont réifié le castillan en tant que langue nationale et la culture espagnole comme l'essence identitaire de l'Espagne et ce, au détriment des langues et cultures régionales. Cependant, suite à la mort de Franco, la Constitution espagnole de 1978 est devenue le nouveau pilier de la construction nationale de la démocratie espagnole. Dans cette thèse, il est proposé que la reconnaissance et la légitimisation des cultures et des langues régionales enchâssées dans cette Constitution ont favorisé le développement d'identités prototypiques distinctes allant des identités uniquement autonome ou espagnole à une variété de permutations identitaires doubles autonome-espagnole. Un premier objectif de cette thèse est d'explorer comment les identités nationales et régionales coexistent et s'il est possible d'en dégager des profils sociopsychologiques prototypiques définis à partir de variables individuelles et intergroupes. Les sociétés culturellement et linguistiquement plurielles comme l'Espagne doivent composer avec l'intégration des multiples groupes qui se retrouvent en contact sur leur territoire. Ces groupes incluent les majorités et minorités nationales, mais aussi les immigrants internationaux. Les contacts intergroupes soutenus sont susceptibles d'engendrer des changements bidirectionnels chez les membres de tous ces groupes. On réfère à ce processus par le terme acculturation (Graves, 1967; Redfield, Linton, & Herskovits, 1936; Social Research Council, 1954). Le deuxième objectif de cette thèse est préciser le rôle des identités ethniques dans l'endossement des orientations d'acculturation des membres d'une communauté d'accueil envers les minorités nationale et immigrante. Leurs orientations d'acculturation représentent différentes façons de concevoir l'intégration des groupes minoritaires à la société d'accueil. Selon le Modèle d'acculturation interactif (MAI; Bourhis, Moïse, Perreault, & Senécal, 1997) la communauté d'accueil peut endosser cinq orientations d'acculturation:
l'individualisme, l'intégrationisme, l'assimilationisme, le ségrégationisme et l'exclusionisme. Dans la première étude, 2446 étudiants universitaires de cinq Communautés autonomes bilingues de l'Espagne ont répondu à un questionnaire. Les participants ont complété l'Échelle du profil d'identification multiple (Bourhis & Bougie, 1998) de même qu'une série d'échelles correspondant à des corrélats sociopsychologiques clés. La catégorisation des participants en fonction de leur degré d'auto-identification aux langues et cultures autonomes et espagnoles a suggéré la pertinence de six profils identitaires prototypiques (N = 1584 participants; 67%). Les résultats indiquent que les individus endossant une forte identité uniquement autonome (11%) ou uniquement espagnole (13%) sont plus susceptibles de s'engager dans des relations intergroupes problématiques. Les individus avec une identité pro-autonome (9%) sont fortement mobilisés en faveur de la communauté autonome, mais présentent des attitudes moins polarisées envers les Espagnols que les individus endossant une forte identité uniquement autonome. Les individus endossant une forte identité double (9%) sont mieux à même de jouer le rôle de conciliateurs culturels et linguistiques et de favoriser l'harmonie intergroupe. Les individus endossant une identité pro-espagnole (15%) ou une identité double modérée (7%) émergent comme conciliateurs culturels, susceptibles de bénéficier de l'apprentissage des langues autonomes. Les données de la deuxième étude ont été recueillies par l'entremise de questionnaires distribués à des étudiants de premier cycle universitaire de la Communauté autonome basque (CAB) en Espagne. Les participants (N= 727) ont complété l'Échelle du profil d'identification multiple (Bourhis & Bougie, 1998). La catégorisation des participants en fonction de leur degré d'auto-identification basque et espagnol a ainsi révélé deux profils identitaires prototypiques pertinents dans le cadre de la CAB. Un grand nombre de participants endosse une forte identité uniquement basque (N = 308) ou une forte identité double basque-espagnole (N = 219). Les participants ont également répondu à l'Échelle d'acculturation de la communauté d'accueil (ÉACA; Bourhis & Bougie, 1998) envers deux groupes établis dans la CAB: la minorité nationale espagnole et les immigrants marocains. Les résultats de cette étude indiquent que les participants ont une préférence pour les orientations d'acculturation individualiste et intégrationiste. Les individus endossant une forte identité uniquement basque ont des orientations d'acculturation moins accueillantes envers la minorité espagnole établie dans la CAB que les individus endossant une forte identité double basque-espagnole. Les conflits historiques entre Basques et Espagnols ne semblent cependant pas interférer sur les attitudes envers des immigrants internationaux: peu importe leur profil identitaire, les participants endossent des orientations d'acculturation similaires envers les immigrants marocains. À ce jour, plusieurs recherches empiriques ont investigué les corrélats psychologiques individuels et intergroupes de l'identification des immigrants à leur culture d'origine et à la culture de leur société d'accueil (e.g. Benet-Martinez & Haritatos, 2005; Benet-Martinez, Leu, Lee, & Morris, 2002; Benet-Martinez, Lee, & Leu, 2006; Hutnik, 1986; Sayegh & Lasry, 1993; Tadmor, Tetlock, & Peng, 2009; Zak, 1973). L'apport original de cette thèse est de tenir compte des identités ethnolinguistiques des membres d'une communauté d'accueil pour mieux cerner la dynamique relationnelle des sociétés culturellement et linguistiquement plurielles. En ligne avec d'autres recherches, les résultats de cette thèse suggèrent que les membres d'une communauté d'accueil qui s'identifient à un groupe social unique imperméable endossent des attitudes, intentions comportementales et orientations d'acculturation moins accueillantes que ceux dont l'identification est multiple (Bourhis, Barrette & Moriconi, 2008; Bourhis & Dayan, 2004; Montreuil, Bourhis, & Vanbeselaere, 2004). Ce lien a été obtenu auprès des membres d'une communauté d'accueil envers la minorité nationale historiquement rivale partageant son territoire, mais ne s'est pas généralisé aux immigrants internationaux. Ces résultats sont donc également cohérents avec le postulat du MAI selon lequel il est important de faire la distinction entre le statut valorisé ou dévalorisé d'un groupe minoritaire national ou immigrant (Bourhis et al., 1997). ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Identité ethnique, Relations intergroupes, Acculturation, Communautés d'accueil, Minorités linguistiques, Communautés autonomes bilingues de l'Espagne.

Identiferoai:union.ndltd.org:LACETR/oai:collectionscanada.gc.ca:QMUQ.2272
Date January 2009
CreatorsMontaruli, Elisa
Source SetsLibrary and Archives Canada ETDs Repository / Centre d'archives des thèses électroniques de Bibliothèque et Archives Canada
Detected LanguageFrench
TypeThèse acceptée, NonPeerReviewed
Formatapplication/pdf
Relationhttp://www.archipel.uqam.ca/2272/

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