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Observer, caractériser et comprendre la pénurie en eau : une approche institutionnaliste de l'évolution du mode d'usage de l'eau en Espagne et au Maroc / Observing, Characterising and Understanding Water Scarcity : an Institutionalist Approach to the Evolution of Water Use Mode in Spain and in Morocco

Ce mémoire de thèse a pour objet la pénurie en eau. Face aux analyses techniques a-historiques centrées sur la rareté physique de l’eau, nous développons une problématique sociale-contingente pour laquelle les usages de l’eau sont au cœur de l’explication. La première partie correspond à l’étape d’observation. Elle a pour objectif de retracer l’évolution du mode d’usage de l’eau à Almeria (Andalousie) et à Marrakech et Agadir (Maroc) entre la fin du XIXe siècle et aujourd’hui. Considéré comme domaine d’observation, le mode d’usage de l’eau (Arrus) qualifie l’articulation d’un volet « économique », relatif à l’ajustement réciproque de l’offre et des usages finals de l’eau produite (formalisé par des normes-procédures) et d’un volet « institutionnel », relatif aux normes sociales (qualifiées de normes-règles) présidant à la définition des droits de disposition sur les ressources en eau. Pour chacun des trois terrains, cette étape comprend une étude de terrain qualitative combinée à une analyse historiographique et à une analyse textuelle de documents de planification selon la méthode Alceste. Cette étape débouche sur la formulation de quatre faits stylisés chronologiques traduisant la succession de quatre phases constitutives du cycle de vie d’un mode d’usage de l’eau particulier. La deuxième partie est d’ordre théorique. Elle correspond aux étapes de caractérisation et de compréhension. Ces deux étapes reposent sur la mobilisation d’une grille théorique nouvelle élaborée par Billaudot sur la base d’une mise en rapport de l’institutionnalisme de Commons et de l’institutionnalisme sociologique de l’approche interprétative de l’économie des conventions (Boltanski et Thévenot). Qualifiée d’institutionnalisme historique et pragmatique, cette approche se présente comme une perspective d’approfondissement de l’institutionnalisme historique de la théorie de la régulation. Elle a pour objectif d’articuler genèse et fonction des institutions et conduit notamment à associer à chacune des modalités de règlement des transactions de Commons une valeur de référence et un bien supérieur. Ainsi, le mode d’usage de l’eau particulier ayant connu une phase de régime en Espagne et au Maroc au cours de la seconde moitié du XXe siècle est qualifié d’« hydrauliciste ». Il se caractérise par une représentation de l’eau essentiellement comme ressource d’allocation, dont l’abondance obtenue par des infrastructures à haute intensité de génie civil constitue une des prérogatives de l’État « moderne » qui, en aval, régit également son usage. L’identification des principales caractéristiques du mode d’usage « hydrauliciste » permet d’aboutir à la troisième étape, à savoir la compréhension des déterminants de son entrée en crise à partir des années 1980. D’une part, cette crise porte sur l’arrivée à terme des régularités antérieures quant à l’ajustement réciproque de l’offre et des usages finals de l’eau produite : on constate une raréfaction des ressources primaires (on qualifie cet aspect de « crise de la régulation »). D’autre part, elle correspond à la remise en question du cadre institutionnel qui soutient le volet économique (on constate une « crise du fondement du régime »). Ainsi, les normes sont partiellement disqualifiées par un double processus de délocalisation en faveur d’une décentralisation de la gestion de l’eau. De plus, le caractère non soutenable du mode d’usage antérieur conduit à l’émergence d’aspirations écologistes concrétisées par la proposition de nouvelles normes d’usage. Le registre de socialisation écologique pour lequel l’eau est comprise comme un milieu de vie se renforce. Au final, nous aboutissons à l’identification d’un nouveau mode d’usage actuellement en vigueur. Nous montrons qu’il ne procède pas d’une rupture paradigmatique mais correspond à un « régime de crise ». / This PhD dissertation focuses on water scarcity. Contrary to a-historical and technical analyses centred on physical water shortage, we develop a social-contingent approach in which water use is fundamental. Observing is the first step. It is based on an empirical analysis of the evolution of the water use mode in Almeria (Andalusia) and in Marrakech and Agadir (Morocco) between the end of the 19th century and today, thanks to fieldwork coupled with a historiographical analysis. The water use mode (ARRUS) —as our observation domain— typifies the articulation of two components: an “economic” component, related to the reciprocal adjustment of supply and final uses of produced water (formalised by technical norms: “procedure-norms”) and an “institutional” component, related to social norms (“rule-norms”) which frame the rights to own, appropriate and use water resources. This step enables us to state four chronological stylised facts that define four stages of the living cycle of a particular water use mode. The next two steps are theoretical and deal with the analytical results obtained in the first step. They require a new theoretical grid designed by BILLAUDOT. This grid proposes to link historical institutionalism, i.e. Regulation theory and COMMONS, and the sociological institutionalism of the interpretative approach of the Economics of conventions (BOLTANSKI & THÉVENOT). This double critical appropriation aims at articulating the genesis and function of institutions and, more particularly, it enables us to link each of COMMONS’ transactions with a reference value and a superior common good targeted. Thus the second step aims at characterising the particular water use mode stamped “hydraulicist” which experienced a regime phase in Spain and in Morocco during the second half of the 20th century. It features a representation of water primarily as an allocation resource. Abundance, obtained via highly-intensive civil engineering infrastructures, is one of the “modern” State’s prerogatives, which also regulates the downstream use of water. The identification of this particular water use mode’s main characteristics leads to the third step, i.e. the understanding of the crisis determinants. On the one hand this crisis involves the termination of previous regularities concerning the reciprocal adjustment of supply and the final uses of produced water: a shortage of primary water resources appears. On the other hand the institutional framework that supports the economic component is questioned. Thus norms are partially disqualified by a double process of relocation in favour of water management decentralization. From a theoretical standpoint, this implies the withdrawal of the “collective-nation” value, in favour of the “freedom-competition” value associated with “bargaining”. In addition the unsustainability of the previous water use mode has led to the emergence of environmentalist claims, which demand the implementation of new water use norms. The ecological socialisation register, for which water is understood as a living environment, is then strengthened. Finally after having shown how water scarcity, understood as the failure of the “hydraulicist” water use mode, results from a complex process, we conclude by identifying a new water use mode. We show how it tries to address the limitations of the previous mode. Nevertheless, it actually does not imply a paradigm shift but corresponds to a “crisis regime”.

Identiferoai:union.ndltd.org:theses.fr/2012GRENE010
Date15 May 2012
CreatorsBuchs, Arnaud
ContributorsGrenoble, Criqui, Patrick
Source SetsDépôt national des thèses électroniques françaises
LanguageFrench
Detected LanguageFrench
TypeElectronic Thesis or Dissertation, Text

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