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Le siège des sensations : la salle de cinéma en crise et le gimmick tactile Percepto (William Castle, 1959)

Pour respecter les droits d'auteur, la version électronique de cette thèse a été dépouillée de certains documents visuels. La version intégrale de la thèse a été déposée à la Division de la gestion des documents et des archives. / Au cours de son histoire, la salle de cinéma s’est érigée à partir d’une politique d’épuration sensorielle, elle-même héritée d’une longue tradition, faisant de l’expérience spectatorielle cinématographique une expérience de contemplation purement audiovisuelle. Cependant, lorsqu’elle traverse une période de crise, tant économique qu’intermédiale, la salle de cinéma renoue avec un modèle attractionnel, polysensoriel et plus particulièrement tactile, lié au cinéma des origines et à ses premiers lieux de diffusion, mais réprimé lors de l’institutionnalisation du média et de sa stabilisation dans la salle consacrée. Aux États-Unis, c’est notamment le cas autour de 1930, au moment de l’arrivée du cinéma parlant et de la Grande Dépression, de même qu’au cours des années 1950, alors qu’une importante compétition intermédiale liée à l’arrivée de la télévision et couplée à des changements démographiques majeurs affecte les exploitants de salles. C’est de nouveau le cas depuis les années 2000, la déferlante numérique et les possibilités de visionnement à domicile arrachant de plus en plus de spectateurs aux salles.

Cette thèse propose l’examen approfondi d’une période et d’un cas exemplaires. Elle analyse précisément le moment où les salles américaines connaissent une baisse de fréquentation majeure au cours des années 1950. Pendant cette période apparaissent plusieurs technologies audiovisuelles, mais également de nombreux gimmicks polysensoriels. Or, ces derniers ne sont qu’une version radicale et matérialisée d’idéaux attractionnels portés par les producteurs et l’industrie cinématographique de l’époque aux États-Unis, ce que démontre l’étude du gimmick tactile Percepto, développé en 1959 par le cinéaste William Castle pour accompagner son film The Tingler. Bien au-delà du simple gadget promotionnel, le dispositif Percepto fait vibrer les sièges et hurler les spectateurs, les sollicitant par une sensation physique directe censée prolonger l’univers du film à même la salle de cinéma. Cette expérience cinématographique singulière valorise en outre le caractère à la fois collectif et participatif du visionnement en salle.

À la jonction de plusieurs champs théoriques, soit l’histoire culturelle des sens, l’archéologie des médias et les études de diffusion, cette thèse cherche à mettre au jour le rôle majeur des sens pourtant dits « mineurs », notamment celui du toucher, dans l’histoire de la salle de cinéma américaine, et à resituer la tactilité dans les origines attractionnelles du cinéma, en démontrant de quelle manière le corps du spectateur est, par le biais de stratégies polysensorielles, de nouveau inclus dans l’expérience du cinéma, alors qu’il en est traditionnellement exclu. Par ailleurs, elle vise à réinscrire les gimmicks au sein de l’historiographie du cinéma en général et de celle des salles en particulier, tout en faisant découvrir un dispositif cinématographique tactile jusqu’ici généralement méconnu et oublié par la recherche savante : Percepto. Pour ce faire, la thèse s’appuie sur plusieurs sources de première main et propose l’analyse des éléments suivants : le film The Tingler, le fonctionnement du gimmick, les publicités produites autour du dispositif, son apparition en salles, ainsi que sa réception critique et populaire. / Throughout its history, the movie theater has emerged from politics of sensory purification inherited from a long tradition, making the cinematographic spectatorial experience one of a purely audiovisual contemplation. When going through a period of crisis, be it economic or intermedial, the movie theater reconnects with an attractional, multi-sensory and mainly tactile model linked to the origins of cinema and to its first exhibition spaces, but repressed at the time of the institutionalization of the media and its stabilization in the dedicated theater. In the United States, this is notably the case around 1930 with the arrival of talking pictures and the Great Depression, as well as during the 1950s when significant intermedial competition resulting from the advent of television, coupled with major demographic shifts, affects theater exhibition. This has also been the case since the early 2000s, when the digital surge and the possibilities of home viewing have torn more and more spectators away from theaters.

This thesis offers an in-depth examination of an exemplary period and case. It analyzes precisely when American theaters experienced a major drop in attendance during the 1950s. During this period, several audiovisual technologies appeared, along with many multi-sensory gimmicks. However, the latter are only a radical and materialized version of ideals of attractions carried by the producers and the film industry of the time in the United States, as demonstrated by the study of the Percepto tactile gimmick, developed in 1959 by filmmaker William Castle to complement his film The Tingler. Far beyond a simple promotional gadget, the Percepto device makes the seats vibrate and the audience scream, addressing the spectators with a direct physical sensation supposed to extend the fictional world of the film right into the theater. This unique cinematographic experience also underlines both the collective and participatory qualities of theatrical viewing.

At the junction of several theoretical fields, namely the cultural history of the senses, media archeology and exhibition studies, this thesis seeks to bring to light the major role of the so-called “minor” senses, in particular that of the touch, in the history of the American cinema, and to restore tactility in relation to the attractional origins of cinema, by demonstrating how the spectator's body is, through multisensory strategies, included again in the experience of cinema although it is traditionally excluded. In addition, it aims to re-establish gimmicks within the historiography of cinema as a whole and that of movie theaters in particular while revealing a tactile cinematographic device largely unknown and forgotten by scholarly research to this day: Percepto. To achieve this, the thesis offers the analysis of the following aspects, based on several primary sources: the film The Tingler, the functioning of the gimmick, the advertisements produced around the device, its theatrical release and exploitation as well as its critical and popular reception.

Identiferoai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/26415
Date08 1900
CreatorsWeber-Houde, Aude
ContributorsAsselin, Olivier
Source SetsUniversité de Montréal
Languagefra
Detected LanguageFrench
Typethesis, thèse
Formatapplication/pdf

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