Ma thèse propose une analyse de l’entre-deux par rapport à l’abjection et ce, comme moyen d’articuler les processus de résistances féministes et queers dans les littératures française, nigériane, japonaise et allemande depuis les années 2000. Ayant constaté l’ambiguïté croissante de notre société qui essaye de dépasser la binarité en restant dans celle-ci (nature/culture, femme/homme, corps/esprit, Noir·e/blanc·he, pauvre/riche, etc.), je cherche à traduire le pouvoir de cette ambiguïté et sa capacité à aborder des questions contemporaines pertinentes, telles que le sexisme, le racisme et la queerphobie.
Plus précisément, je définis l’entre-deux comme relationnel, affectif et performatif et l’abjection comme synonyme de dégoût, de folie et de monstruosité. Je tisse donc un lien entre la production et l’expérience de l’abjection, interrogeant la localisation des marginalisations à travers les attentes sociales ou en opposition à celles-ci. Dans une perspective féministe, intersectionnelle et queer, je soutiens que l’entre-deux de l’abjection permet une critique des discriminations en tentant de dépasser le binaire et en suggérant un « au-delà ». Dans cet entre-deux, l’abjection peut devenir une pratique de la subversion qui tantôt réussit, tantôt échoue à résister aux normes sociales. Cette ambiguïté se manifeste particulièrement dans les représentations littéraires des sexualités, des identités et des pratiques de l’écriture chez Wendy Delorme, Akwaeke Emezi, Kanehara Hitomi et Charlotte Roche. En examinant le désir, je montre comment les auteur·rices essayent de repenser les sexualités à partir des marges, leurs personnages luttant contre la violence et le contrôle de leurs corps. J’explore ensuite le traitement, par les auteur·rices, de la constitution d’une subjectivité « folle » en relation avec celles des autres, afin de creuser les possibles alliances ou mésalliances. Enfin, je discute de l’acte d’écrire l’abjection comme forme de lutte contre le savoir normatif, car la création littéraire peut conduire à une réécriture au-delà des conventions littéraires.
Mon analyse montre que les résistances féministes et queers, à travers les représentations du dégoût, de la folie et de la monstruosité, ne reposent ni sur un choix ni sur un non-choix : elles naviguent entre les deux, incarnant ainsi l’idée d’entre-deux. Cette corporéité nous permet de repenser et de ressentir notre relation à nous-mêmes et aux autres à partir d’une position située et reconnue, mais au-delà des normes et attentes sociales. / My dissertation proposes an analysis of in-between-ness in relation to abjection as an articulation of feminist and queer resistances in French, Nigerian, Japanese and German literatures since the 2000s. Having noted an increased social ambiguity that attempts to overcome the binary while staying within the binary (nature/culture, woman/man, body/mind, Black/white, poor/rich, etc.), my dissertation seeks to convey the power of that ambiguity’s ability to tackle relevant contemporary issues, such as sexism, racism and queerphobia.
More precisely, I understand in-between-ness as relational, affective and performative, and abjection as synonymous to disgust, madness and monstrosity. Consequently, I correlate the production and the experience of abjection, thereby questioning the locatedness of marginalization through, or in opposition to, social expectations. From a feminist, intersectional and queer perspective, I argue that the in-between-ness of abjection allows for a critique of discrimination through an attempt to go beyond the binary, or rather offer a “beyondness”. It is exactly in this in-between-ness that abjection can become a practice of subversion that at times succeeds and at times fails to resist social norms. This ambiguity is particularly evident in literary representations of sexuality, identity and writing practice by Wendy Delorme, Akwaeke Emezi, Kanehara Hitomi and Charlotte Roche. In examining desire, I demonstrate how the authors try to rethink sexualities from the margins and how their characters battle with violence and control over their own bodies. I then explore the writers’ treatment of “mad” subjectivity constitution in relation to others to seek possibilities of allyship or disconnection. Finally, I discuss the act of writing abjection as a means of challenging normative knowledge, for literary creation reaches beyond the scope of rewriting literary conventions.
My analysis shows that feminist and queer resistance, through representations of disgust, madness and monstrosity, is neither a choice nor a non-choice: it navigates in-between, thereby embodying the idea of in-between-ness. This embodiment enables us to rethink and feel our relation to our selves and to others from a situated and acknowledged locatedness, yet beyond social norms and expectations.
Identifer | oai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/32580 |
Date | 08 1900 |
Creators | Roussel, Flora |
Contributors | Monnet, Rodica-Livia |
Source Sets | Université de Montréal |
Language | English |
Detected Language | French |
Type | thesis, thèse |
Format | application/pdf |
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