Diagnostic des forces et des faiblesses, traitements, bilans, perspectives et prédictions, les institutions financières internationales conditionnent les prêts octroyés aux États financés à une série d’ajustements et de mesures auxquelles leurs économies devraient être soumises. Leurs documentations en matière de développement économique prennent un ton qui n’est pas sans rappeler les écrits religieux. Naturalisé, simplifié et dépolitisé, le discours de ces institutions se veut une sorte de catéchisme de l’orthodoxie économique, des commandements (censés représenter la culmination du savoir économique et le consensus de ses savants) dont la stricte obéissance mènerait vers la terre promise du développement et de la prospérité et dont le rejet représenterait une hérésie démagogique. Les auteurs critiques des politiques de développement de ces bailleurs de fonds arguent que les États receveurs de l’aide financière sont en train de perdre le contrôle sur leurs économies et que leurs populations, en plus du coût social auquel elles sont soumises, voient le pouvoir décisionnel leur échapper pour devenir l’apanage d’une élite d’experts. Grâce à la place hégémonique du savoir économique dont ils se prévalent, ils occuperaient un poids de plus en plus prépondérant dans le processus de prise de décisions politiques.
Conçu et prescrit via l’angle de l’expertise, le développement serait réduit à ces éléments techniques et contribuerait ainsi à la dépolitisation du politique et à asseoir le pouvoir des bailleurs de fonds, détenteurs du monopole de l’expertise du développement, sur les politiques économiques de l’État financé.
Toutefois, les disparités régionales en matière d’applications des politiques néolibérales des institutions financières et les difficultés éprouvées par l’élite économique dans certains pays à imposer leur savoir comme savoir hégémonique et à s’installer dans les rouages clés de la prise de décision politique nous poussent à considérer l’importance des dynamiques locales du pouvoir. Mais encore, ils nous contraignent à rejeter toute velléité de comprendre l’économie de l’État financé via uniquement le prisme d’une domination d’institutions toutes puissantes qui imposeraient un savoir-faire hégémonique à des États soumis et sans recours.
Dans cette thèse, nous défendrons l’idée que si le développement est bel et bien une manifestation de rapports de pouvoir, il faudrait plutôt chercher à le comprendre via les pratiques qui le composent. Ce que nous proposons c’est une lecture de l’entreprise du développement via ses contraintes bureaucratiques, via les différentes stratégies de contournement des exigences des institutions financières et les mécanismes de leur interprétation, mais également à travers les différentes luttes internes qui définissent le polity et les limites du pouvoir de l’État. Cette approche, nous l’espérons, permettrait de mieux saisir les dynamiques qui sous-tendent les politiques économiques de l’État financé, de mieux dégager le rôle des institutions financières et de situer la place de l’idéologie néolibérale dans le processus décisionnel.
Identifer | oai:union.ndltd.org:uottawa.ca/oai:ruor.uottawa.ca:10393/36435 |
Date | January 2017 |
Creators | Bahri, Hassen |
Contributors | Grondin, David |
Publisher | Université d'Ottawa / University of Ottawa |
Source Sets | Université d’Ottawa |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Thesis |
Format | application/pdf |
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