Contre la vision mécanique et surplombante tendant à dominer dans la sociologie classique des migrations, cette recherche tente d’articuler les dimensions micro, méso et macro sociales constitutives du phénomène migratoire pour rendre compte de la carrière migratoire et de la (re)construction personnelle des migrants. Nous pensons la migration de manière « circulaire et continue », à l’opposé des perspectives qui tendent, encore aujourd’hui, à la penser comme un déplacement définitif entre un point A et un point B, de même que comme une rupture entre le lieu de départ et le lieu d’arrivée. Nous questionnons la trajectoire sociale et géographique ainsi que le système d’activité professionnelle dans le façonnement de la carrière migratoire et la (re)construction personnelle des réfugiés au Canada. En fait, nous faisons ressortir le cheminement personnel des migrants dans les dynamiques d’influence croisée entre les configurations de leurs sociétés d’origine et d’accueil. À ce titre, la situation des populations demandeuses d’asile en vue de l’obtention du statut de réfugié est particulièrement intéressante puisque leurs trajectoires sont généralement complexes et souvent douloureuses à divers titres. Pour ce faire, nous nous intéressons au cas des demandeurs d’asile d’origine haïtienne entrés au Canada, particulièrement au Québec, par le Chemin Roxham entre l’été 2017 et l’automne 2018. Plus spécifiquement, nous saisissons le système d’activité qui module leurs trajectoires biographiques. Nous appréhendons notre objet d’étude au prisme d’une lunette interactionniste, laquelle nous permet de souligner l’agentivité des migrants sans toutefois minimiser les contraintes sociales et structurelles qui pèsent sur eux. Dans cette veine, nous saisissons la fabrication quotidienne de la carrière migratoire des réfugiés haïtiens comme un processus complexe où les fragments du monde matériel et social sont subordonnés aux efforts subjectifs qu’ils déploient en vue de bricoler leur vie dans des interactions complexes avec le système canadien d’intégration sociale et professionnelle. Ce travail permet de mettre en évidence que la trajectoire (géographique et sociale) et le système d’activité des réfugiés haïtiens participent effectivement du façonnement de leur carrière migratoire et rendent compte de leur processus de (re)construction personnelle dans la société canadienne. En fait, nous analysons particulièrement l’implication du système d’activité de ces réfugiés dans leur processus de réalisation de soi. Ainsi, nous nous rendons à l’évidence qu’en raison de leur situation de demandeurs d’asile et aussi parce qu’ils sont identifiés comme membres d’une minorité visible (noir africain) dans la société d’accueil canadienne, pour s’intégrer socialement et professionnellement, ils ont fait face à beaucoup d’obstacles et de défis. La plupart ont été contraints de s’investir dans des secteurs d’activité qui ne répondent pas à leur formation et à leur champ de compétence et/ou d’expérience. L’investissement personnel dans l’exercice de petits boulots en vue de répondre à des obligations personnelles et familiales (ici et/ou ailleurs) et l’investissement dans des activités de renforcement des capacités en vue de s’accommoder à des attentes économiques et socioculturelles tant dans la société d’accueil que de la société d’origine, participent du processus de façonnement de la carrière migratoire. Ils procèdent en saisissant les moindres opportunités qui leur permettent de transformer à leur avantage les événements de la vie quotidienne.
Identifer | oai:union.ndltd.org:uottawa.ca/oai:ruor.uottawa.ca:10393/41400 |
Date | 04 November 2020 |
Creators | SENAT, Stherson |
Contributors | Mondain, Nathalie |
Publisher | Université d'Ottawa / University of Ottawa |
Source Sets | Université d’Ottawa |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Thesis |
Format | application/pdf |
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