L’architecture scolaire au Québec est un domaine en plein essor : les nombreuses recherches récentes et les budgets ministériels s’y consacrant en font état. Malheureusement, les réflexions philosophiques d’envergure alliant espace et éducation demeurent à ce jour à constituer. Cela, malgré des besoins d’analyse criants, en raison des défis sociétaux, culturels, sociaux et éthiques portés par l’école et son espace. Notre objectif est donc de documenter le sujet dans une perspective philosophique, afin de préciser les éléments sur lesquels la réflexion liée à l’architecture scolaire doit s’appuyer. Pour ce faire, nous considérons certains encadrements ministériels, soit les compétences professionnelles, les obligations des enseignants et les missions de l’école. Afin de structurer un sujet vaste et pour l’instant « squelettique », nous avons choisi d’organiser notre propos à l’aide de quatre niveaux d’espace (de même qu’un type d’espace supplémentaire). Le premier niveau, l’espace conçu, a une fonction herméneutique : l’espace scolaire doit contenir des éléments significatifs, intégrés dès la conception architecturale de bâtiments « logogéniques ». Ce niveau d’espace contient également des impératifs éthiques : les préoccupations environnementales doivent enjoindre à la création d’espaces durables, qui procèdent d’une architecture située, « ménageant » le site et respectant l’écoumène. Le recours à une forme d’architecture vernaculaire, qui implique les habitants dans le processus de création, permet un nouage favorisant la collaboration, cruciale entre l’architecte et les différents acteurs (enseignants, élèves, familles, communauté, etc.). Cette proximité permet d’envisager l’architecte comme pédagogue, par son implication face aux compétences professionnelles ciblées (culturelle et éthique). Le deuxième niveau, l’espace représenté, concerne la constitution de la topogenèse, qui implique le corps, mais aussi une représentation occidentale tristement généralisée. Ce phénomène nécessite une décentration qui permet « d’appréhender » l’espace scolaire grâce à des éléments permettant de le libérer, soit le langage et le jeu. Cela nous encourage à proposer une forme de « nomadisme pédagogique », c’est-à-dire la présence de pratiques plus informelles et dynamiques. Le troisième niveau, l’espace vécu, s’appuie sur des distinctions bergsoniennes opposant la vision mathématique de l’espace à la notion de lieu. Cela nous permet de rendre compte de l’aspect qualitatif du lieu qu’est l’école, concourant au respect des sept obligations des enseignants, de même que des trois missions de l’école québécoise. Ce lieu, ni tout à fait privé, ni tout à fait public, doit être entrevu comme espace de socialisation. Le quatrième niveau, l’espace habité, vise les déterminations humaines fondamentalement ontologiques. Ce plus haut niveau d’espace est rendu possible par la faculté d’intuition, qui implique un rapport d’immédiateté à l’espace. L’aspect esthétique inspiré de Hölderlin, pour qui « l’homme habite en poète », nous permet de proposer l’école comme œuvre d’art, par transposition des quatre qualités de l’œuvre musicale, à savoir : la beauté, la pérennité, l’enseignement et la sincérité. Le dernier type d’espace présenté s’adjoint aux quatre niveaux proposés : il s’agit d’un espace partiellement transversal. Il est constitué par l’espace vicarial (non-lieu), qui engendre la déterritorialisation de l’école. Il importe donc que l’on prenne conscience des spécificités de l’espace scolaire, à savoir notamment la dimension critique, qui ne peut être accomplie par cet espace virtuel. / School architecture in Quebec is a soaring field: several recent researches and large governmental budgets can confirm it. Unfortunately, the major philosophical reflection needed about space and education still remain to be constituted. This, considering its possible societal, cultural, social and ethical impacts. My purpose is to document the subject in a philosophical way, with the intention of precising which elements have to be considered in order to think about school architecture. To do so, I analyze some governmental rules such as professional competencies, teachers’ obligations and school missions. To structure this huge subject, still “skeletal”, I chose to organize my work with four levels of space (and another type of space). The first level, designed space, has a hermeneutical function: school space must include significant elements and be designed “logogenically”. This level of space also includes ethical obligations: environmental concerns engage us to create sustainable spaces, which are built with a situated architecture, protecting sites and ecumene. Vernacular architecture, which involves dwellers in the creation process, allows a knotworking collaboration that is essential between the architect and all the actors (teachers, students, families, community, etc.). This close relation leads to consider the architect as a pedagogue, and to give him some responsibilities related to the targeted professional competencies (cultural and ethical). The second level, represented space, is about construction of a topogenesis, which uses body, but also an occidental representation of space sadly generalized. This phenomenon requires decentration to “apprehend” school space, liberating it with language and game. With this, I dare to propose a sort of “pedagogical nomadism”, that is to say more informal and dynamic practices. The third level, lived space, uses the bergsonian distinction that opposes the mathematical vision of space to that of a place. I can then consider the qualitative aspect of school as a place, respecting the seven teachers’ obligations and the three missions of Quebec schools. This place, neither completely private, nor completely public, can be seen as a space of socialization. The fourth level, dwelling, is about fundamentally ontological human determinations. This highest level of space is possible using intuition, which creates an immediate relation to space. The esthetical aspect, inspired by Hölderlin, who considers that “man dwells poetically”, leads me to propose school as an artwork, by transposing the four qualities of the musical work, namely beauty, sustainability, teaching and sincerity. The last type of space (vicarial space or nonplace) completes the four precedent levels. It is a partially transversal space, which causes deterritorialization of school. This means that specificities of physical school space, such as critical dimension (which cannot be accomplished by virtual space), have to be recognized.
Identifer | oai:union.ndltd.org:LAVAL/oai:corpus.ulaval.ca:20.500.11794/69509 |
Date | 02 February 2024 |
Creators | Létourneau, Marie-Claude |
Contributors | Turmel, Patrick |
Source Sets | Université Laval |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | thèse de doctorat, COAR1_1::Texte::Thèse::Thèse de doctorat |
Format | 1 ressource en ligne (xii, 317 pages), application/pdf |
Coverage | Québec (Province) |
Rights | http://purl.org/coar/access_right/c_abf2 |
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