On s’est intéressé dans les années 1950 à 1970 à la disparition d’une bourgeoisie canadienne qui aurait dû faire la transition du capitalisme marchand vers l’industrie. Les réflexions historiennes avaient cependant commencé par la fin, tentant de définir les conséquences historiques à long terme de la « Conquête » sur un groupe encore mal connu qui, en principe, incluait des marchands.
Notre thèse s’inscrit dans la lignée des travaux états-uniens et européens qui ont permis de revoir, souvent dans une optique culturelle, les marchands occidentaux de l’époque moderne. À partir du cas précis d’un marchand équipeur montréalais et de sa lignée, nous voulons tout d’abord établir si la culture négociante des marchands, au sens large du terme, était du même ordre que celles des métropolitains qui avaient des commerces semblables. Deuxièmement, nous voulons cerner la marge de manœuvre individuelle face aux contraintes des conditions ambiantes ainsi que le rôle des réseaux dans l’évolution de la carrière des marchands. Enfin, nous souhaitons définir la conception de soi de ces derniers, à travers l’examen de leur style de vie et des rôles qu’ils pouvaient jouer dans leur milieu. Pour le faire, nous avons choisi de ratisser « en largeur » dans des sources multiples, y compris des livres de comptes, et de creuser « en profondeur » pour en extraire le maximum de données.
L’enquête a été menée à travers la longue carrière de l’équipeur Jean Alexis Lemoine dit Monière (1680-1754) qui s’est installé à Montréal en 1715. Lemoine est connu de la postérité grâce à l’étude de Louise Dechêne qui l’avait suivi jusqu’en 1725. Elle en a tracé un portrait, amplement repris par la suite, qui a fait de lui l’exemple type de marchand équipeur. Or, Monière n’est peut-être pas typique, il pourrait même être un cas-limite. En le suivant jusqu’à sa mort, nous avons exploré toutes les possibilités qui se sont offertes à lui. Nous avons aussi fait une large place aux legs matériel et immatériel de son père Jean Lemoine, et à ce que Monière a transmis à son fils, Pierre Alexis, ainsi qu’à quelques neveux. En encadrant Monière de son père, immigrant rouennais, de ses frères et de son fils, nous avons pu observer l’émergence d’un métier, celui d’équipeur. Nous avons examiné comment Monière, décédé en 1754, a été préparé à exercer son métier et comment il concevait la pratique de ce dernier. Cette démarche a permis de mieux comprendre la culture (au sens large) des gens de la marchandise au Canada. En utilisant une variété de sources et en faisant appel à une démarche micro-historique, nous souhaitons avoir répondu, vingt-cinq ans plus tard, au vœu de Dale Miquelon de regarder, dans la mesure du possible, le monde de la marchandise avec les yeux des acteurs de la période pour répondre aux interrogations des gens d’aujourd’hui. / From the 1950s to the 1970s, historians’ attention was turned towards the disappearance of a bourgeoisie canadienne which should have made the transition from commercial to industrial capitalism. These studies began, so to speak, with the end, in attempting to define the long-term historical consequences of the Conquest on an as-yet ill-defined group that in principle included some merchants.
This thesis follows new investigations in both Europe and the USA which have permitted to look anew, often with a cultural history approach, at merchants of the Early Modern period. Focusing on a Montreal merchant outfitter (marchand équipeur) and his family, the investigation first seeks to determine if the Canadian merchants’ culture (broadly defined) was similar to that of their French counterparts who worked on the same business level. A second aim is to evaluate the leeway available to individuals in face of the general conditions of the trade and the role of networks in the merchants’ career. Finally, the thesis attempts to define the self-conception of these men while looking at their lifestyle and the various roles they played in their community. To complete such a study, we have chosen to look « wide and deep » like micro-historians have before us.
The study examines the long life of the équipeur, Jean Alexis Lemoine dit Monière, who chose to settle in Montreal in 1715 and whose career Louise Dechêne had followed until 1725. After her, historians have since pictured Monière as a typical marchand équipeur. But he might not have been typical, he might even have been a « limiting case ». The thesis follows him to the end of his life and looking for all the opportunities that were offered to him along the way. It accords considerable importance to the material and immaterial legacy of his father, Jean Lemoine, and to what Monière passed on to this son, Pierre Alexis and a few nephews. Situating Monière between his father who emigrated from Rouen, his brothers and his own son, permits us to see the emergence of a profession, that of équipeur. We look at how Monière, who died in 1754, was prepared to embrace the merchant’s profession and how he perceived the way he should work as an équipeur. This study affords a better understanding of merchants’ culture, broadly conceived, in early French Canada. Exploring a variety of sources and using a micro-historical approach, we hope to have followed Dale Miquelon’s suggestion to look (again) at the merchants’ world with the eyes of the people of the times in order to answer today’s questions.
Identifer | oai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/24634 |
Date | 05 1900 |
Creators | Gousse, Suzanne |
Contributors | Wien, Thomas, Dépatie, Sylvie |
Source Sets | Université de Montréal |
Language | fra |
Detected Language | French |
Type | thesis, thèse |
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