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Le choix de l’école secondaire par des parents dans le marché scolaire montréalais. Une étude compréhensive des conditions, stratégies et effets sociaux de l'exercice d'un devoir parental

Castonguay-Payant, Justine 09 1900 (has links)
Notre système d’éducation, comme on le connait, est le fruit de la Révolution tranquille des années 1960. S’appuyant sur un principe de démocratisation, le système scolaire est rapidement devenu le levier de développement économique et social d’une société « en retard » par rapport au reste du pays (Proulx et Charland, 2009). Cependant, d’après Lessard (2019), le système scolaire du Québec fait piètre figure en matière d’équité : il est le moins équitable des systèmes canadiens, et ce, pour plusieurs raisons. Depuis la Révolution tranquille, la Loi sur l’instruction publique québécoise (LIP) régit les droits et obligations des élèves et des institutions scolaires, et reconnait également certains droits des parents d’élèves, comme les choix d’écoles au primaire et au secondaire. Ces choix semblent par ailleurs évoluer de manière croissante, en particulier depuis les années 1980. En effet, sur fond de courants politiques et économiques globaux (la Nouvelle gestion publique – NGP, la Gestion axée sur les résultats - GAR, etc.), et aussi nationaux et locaux (la Loi sur l’instruction publique du Québec, politiques municipales et urbaines diverses, etc.), ces pratiques de choix tendent à profiter d’une conjoncture favorable qui stimule leur montée (Bélanger, 2011; Turmel, 2014; Felouzis et coll., 2013). En outre, ils feraient partie des leviers favorisant ce que Felouzis et ses collègues (2013) appellent les « marchés scolaires » (Felouzis et coll., 2013). Dans les marchés scolaires, les prix ne constituent pas une mesure de la qualité éducative. La relation offre-demande éducative s’appuie alors sur l’élaboration de jugements sur la qualité perçue, une qualité non mesurable basée sur des critères sociaux différents en fonction des intentions éducatives et origines sociales variées des familles (Felouzis et coll., 2013, p. 4). Le fait est que ces jugements différenciés participent ultimement à la construction de possibilités de choix inégalement réparties entre les familles. Considérant que le paysage scientifique québécois abordant les processus de choix scolaires est, à ce jour, relativement vierge, cette thèse a donc pour visée d’éclaircir la question et donner une intelligibilité à la construction de jugements de qualité d’une bonne école secondaire. Embrassant une posture interprétative compréhensive, cette thèse s’inspire de la sociologie interactionniste de van Zanten (2009) sur les choix scolaires de même que de la sociologie de la famille (de Singly, 2010; Déchaux, 2010; Valois, 2009), tout en portant une attention particulière au poids des capitaux dans la sociologie de la reproduction sociale selon la perspective de Bourdieu (1979) et Bourdieu et Passeron (2011). Basée sur vingt-sept entretiens semi-dirigés qui ont été conduits auprès de parents résidant dans cinq arrondissements montréalais (Ahuntsic-Cartierville, Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce, Mercier-Hochelaga-Maisonneuve, Montréal-Nord, Rosemont-La-Petite-Patrie), l’analyse inductive des données révèle une variabilité importante des processus de choix parentaux, élaborés en fonction de conditions, de ressources différenciées, de perceptions subjectives et contraintes objectives. En effet, celles-ci sont fortement indexées en fonction de l’offre de services éducatifs dans les secteurs de résidence des familles et conditionnées par la position socioéconomique des parents et le statut EHDAA des enfants. Il a également été constaté que les qualités sociales de l’établissement sont souvent, spécialement aux yeux des parents de classes moyennes, corrélées avec les qualités de l’instruction. Ce constat a été noté chez plusieurs répondants, bien que seuls ceux disposant de ressources économiques et culturelles suffisantes soient en mesure de mettre en place des stratégies pouvant satisfaire leurs préférences et leur vision de la qualité éducative souhaitable pour leur enfant. / The Quebec education system is based on a democratization principle and rapidly became a lever for the economic and social development of a society “lagging behind” the rest of the country (Proulx & Charland, 2009). However, according to Lessard (2019), while being above average compared to the rest of OECD countries regarding performance, the Quebec school system does much worse with regards to equity: it is the least equitable of the Canadian systems. Since the Quiet Revolution, the Quebec Education Act (Loi sur l'instruction publique) regulates the rights and obligations of students and institutions, and also recognizes certain rights to the parents. School choice, for elementary or high school, is among the individual rights of parents recognized by the Education Act. Throughout the world, many global political and economic trends (New Public Management or NPM, accountability, etc.) as well as provincial and local policies (the Education Act in Quebec and various municipal and urban policies, etc.) stimulate the growth of choice practices, and the situation in Quebec, especially in Montreal, is no different. Researchers have yet to meaningfully address school-choice processes, but international studies have shown tangible links between the high school-choice processes of middle- and upper-class parents and increased inequality through social segregation (Felouzis et coll., 2013; van Zanten, 2009a). This dissertation aims to clarify the current debates on school choice in Montreal and highlights parental perceptions related to the singular feelings, experiences, and trajectories entailed in the choice of high schools. This research is essentially based on previous work by Felouzis et coll. (2013) and Karpik (2007) on judging quality of a public service. It also borrows conceptual notions from the sociology of the contemporary family (Singly, 2010) as well as studies by Déchaux (2009) and Valois (2009). Furthermore, following Bourdieu (1979) and Bourdieu and Passeron (2012), it illuminates the importance of cultural, economic, and social capital in the judgment and decision-making process of parents when they attempt to choose the right high school for their child. Finally, it feeds off of the interactionist sociology of van Zanten (2009) on school-choice decisions. The study first examined the decision-making processes of twenty-seven Montreal parents whose child is transitioning from elementary to high school. It then studied the educational supply in the five Montreal boroughs in which these parents reside: Ahuntsic-Cartierville, Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce, Mercier-Hochelaga-Maisonneuve, Montréal-Nord, and Rosemont-La-Petite-Patrie. This thesis also embraces comprehensive and interpretive sociology and is based on semi-structured interviews (Kaufmann, 2011; Boutin, 1997). The inductive data analysis revealed great variability in parents’ school-choice processes following their differentiated conditions and resources. Only some parents could actually consider enrolling their child in the school of their choice. The limitations observed came down to places available in the institutions, the successful completion of a qualifying examination, the payment of relatively high school fees, the limited geographical access to certain schools or their child’s handicaps, social maladjustments or learning difficulties. Finally, the results extracted from the analysis highlight that the subjective perceptions and objective constraints that come into play in the school-choice process are also strongly conditioned by the supply of educational services in the families’ area of residence where there is indeed a differentiated access to education services. It shows that families living in these areas do not all have access to the same provision, to the same “quality” of education services and that the possibility of choosing a school or relocating to a given area of residence is tied to family income.

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