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Les bioéthiciens et leur projet d'interdisciplinarité : formation d'un groupe social d'un champ et d'une discipline

Dussault, Catherine 14 March 2019 (has links)
La bioéthique est une discipline à caractère scientifique visant à produire systématiquement des normes de l’intervention sur le vivant. Lorsqu’elle agit comme une approche à la résolution des problèmes éthiques liés à une prise de décision technique et singulière, elle se pense une éthique visant la bonne opération à faire dans un contexte de soin, de la santé ou de la recherche. En dépit de son caractère reconnu et exprimé comme composite, la bioéthique tend à s’institutionnaliser comme « discipline » dite interdisciplinaire, suivant une organisation pédagogique et scientifique qui lui semble propre. Ce mémoire vise à comprendre les manières par lesquelles la bioéthique s’institutionnalise à l’université en formant une classe d’experts dits « bioéthiciens ». Or, devenir bioéthicien – alors que le titre n’est ni clairement défini ni consacré par des expériences académiques et professionnelles codifiées et validées – pose à la sociologie la question même de son existence. Nous étudions donc le travail symbolique de définition du groupe et de la discipline accompagnant sa formation. L’analyse d’entretiens auprès de quinze professeurs, chercheurs ou éthiciens ayant ou ayant eu des activités en bioéthique révèle que la diversité des situations ne correspond pas nécessairement à des scissions : les bioéthiciens partagent à différents degrés des conceptions métaphysiques, des valeurs et des expériences, correspondant à des modes d’entrée – et parfois, de sortie – au sein de la discipline. Nous retraçons pour s’en donner une vue d’ensemble la genèse du groupe, son histoire et celle de son institutionnalisation qui s’accompagne, sans doute paradoxalement, d’une certaine résistance au modèle disciplinaire jugé hiérarchique, fermé et faillible. Afin d’évoluer à l’université tout en demeurant « pertinente » pour la résolution de problèmes singuliers, nous verrons que la bioéthique et ses participants tentent d’innover par la discussion rationnelle et interdisciplinaire entre experts et, par là, modifient le champ scientifique à leur image. / Bioethics is a discipline of a scientific nature aiming to produce systematically norms aimed to intervene on the living. When bioethics acts as an approach dedicated to solving ethical problems requiring a technical and singular decision, it thinks itself as an ethics engaged in the finding of the “good” intervention to be made in a context of care, health or research. Despite its acknowledged heterogeneous nature, bioethics tends to its institutionalization as an “interdisciplinary” discipline, following a pedagogical and scientific organization of its own. This thesis aims to understand how bioethics’ institutionalization is “objectively” and “subjectively” experienced, in other terms, for the institution itself and for the bioethicists. Now, becoming a “bioethicist” – as the title is not clearly defined, nor sanctioned by codified and validated academic and professional experiences – asks sociology the question of its existence. We, therefore, study the symbolic work of the group and the discipline’s social definition, going together with its formation. The analysis of comprehensive interviews conducted with fifteen professors, researchers or ethicists having or having had activities in the field of bioethics reveals that the diversity of situations does not necessarily tally with scissions or divisions within the field: bioethicists share, on different levels, values and experiences corresponding to different ways of initiating – and possibly leaving – the discipline. We then glance through the early process of the group’s unification, the history and the institutionalization of the discipline, going with – what might appear as paradoxical – a critique of the “disciplinary”, denounced as hierarchical, exclusive, and perhaps outmoded. In order to thrive in the academic world whilst staying “pertinent” to problem solving, bioethics and bioethicists try to innovate through rational and interdisciplinary discussion between experts, which, intrinsically, modifies the scientific field in the image of their practices and representations.
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Guider la pratique et la formation éthique des professionnels de la santé : établir les fondements du modèle de la déontologie réflexive (MDR)

Potvin, Marie-Josée 03 1900 (has links)
Si l’approche par compétences au Canada et aux États-Unis est particulièrement valorisée pour orienter la pratique des professionnels de la santé (PDS) – et en bioéthique clinique –, les travaux permettant de mieux comprendre les fondements psychologiques, ontologiques et philosophiques de ces compétences sont peu présents dans la littérature en bioéthique. Les principaux outils actuellement disponibles se divisent généralement en quatre principales catégories : 1) les documents officiels (codes de déontologie, règlements institutionnels, etc.); 2) les principales théories éthiques (éthique de la discussion, éthique de la vertu, principisme, etc.); 3) les ouvrages de référence scientifiques; 4) les outils de prise de décision éthique. Ces documents sont des incontournables pour les bioéthiciens et les PDS, mais leur disparité, voire leur contenu parfois contradictoire, jumelée à une compréhension limitée de l’éthique, est souvent source de confusion dans les processus décisionnels et peut être la cause de comportements ne répondant pas aux standards éthiques des pratiques professionnelles. Notre recherche constitue une réflexion qui s’inscrit en amont de ces outils dont le caractère pragmatique a le désavantage de simplifier la réflexion théorique au profit de données plus concrètes. Nos travaux visent à développer les bases d’un modèle flexible et inclusif – le modèle de la déontologie réflexive (MDR) – permettant de : 1) poser les principaux repères philosophiques, sociaux et déontologiques des problématiques éthiques rencontrées en pratique; 2) saisir les principales tensions éthiques inhérentes à cette complexité; 3) mieux comprendre, dans une perspective psychologique et développementale, les exigences personnelles et professionnelles qu’impose le statut de professionnel de la santé dans le contexte actuel des soins de santé. Entreprise théorique, ce projet consiste principalement à mettre en relation dynamique un ensemble de dimensions (légale, éthique, clinique, sociale, psychologique) à l’oeuvre dans la rencontre du bioéthicien et du PDS avec la complexité des situations éthiques, en s’inspirant du concept de sensibilité éthique de la « petite éthique » de Paul Ricoeur (1990), du modèle des quatre composantes de Rest (1994) et de la théorie du soi et des modes identitaires d’Augusto Blasi (1993). Ce processus implique trois étapes successives : 1) une mise en ii perspective de la posture épistémologique particulière du bioéthicien et du PDS à la lumière de la « petite éthique » de Ricoeur; 2) une revue de la littérature interdisciplinaire sur le concept de sensibilité éthique afin d’en proposer une définition et de le mettre en perspective avec d’autres compétences éthiques; 3) le développement d’un cadre de référence en matière d’identité éthique professionnelle (professional ethics identity tendencies, PEIT), inspiré de la théorie du soi et des modes identitaires de Blasi. Ces PEIT proposent un repère normatif aux exigences liées à la construction de l'identité en contexte de pratique des PDS et suggèrent des pistes de réflexion quant à la formation et à la recherche en éthique professionnelle. Cette recherche souhaite établir des fondements théoriques pour le développement ultérieur du modèle de la déontologie réflexive (MDR). / If the competency approach seems to be particularly valorised in Canada and in the United States for orienting the practice of health care professionals (HCP) – and in clinical bioethics – material that could provide with a better understanding of the psychological, ontological and philosophical foundations of these competencies seems rather limited in the bioethical literature. The tools that are generally available can be divided into four main categories: 1) official documents (e.g., code of ethics, institutional policies); 2) the main ethical theories (e.g., virtue ethics, theories of justice, principlism); 3) scientific references (e.g., journals, books); 4) decision-making tools. These documents are important for bioethicists and HCPs, but their disparities and even contradictions, coupled with poor knowledge in professional ethics, may be a significant source of confusion in the decision making process and even lead to behaviour that does not meet the ethical standards of HCP. This thesis is an upstream reflection regarding these tools, whose pragmatic character has the disadvantage of simplifying theoretical reflection at the benefit of more concrete evidence useful for practical decision making. This project aims at developing the foundations for a flexible and inclusive model – a model of deontological reflexivity (MDR) – that will: 1) present the main philosophical, psychological, sociological and deontological landmarks characterising ethical issues encountered in practice; 2) understand, from a psychological and developmental perspective, the personal and professional requirements inherent to the status of the health care professional in the current context of health care. A theoretical enterprise, this project primarily consists in relating, in a dynamic manner, a variety of dimensions (legal, ethical, clinical, psychological) at work in complex ethical situations encountered by HCPs and bioethicists, inspired by the concept of ethical sensitivity, the “petite éthique” of Paul Ricoeur (1990), the self theory along with Blasi's Identity modes (Blasi, 1993). The analysis process will consist in three successive phases: 1) a putting into perspective of the bioethicist's and HCPs’ epistemological posture in light of the “petite éthique” of Paul Ricoeur (1990); 2) an interdisciplinary literature review of “ethical sensitivity” in order to propose a definition of the concept and place it into perspective with other ethical competencies; 3) the development of a framework regarding professional ethics iv and identity (professional ethics identity tendencies, PEIT), inspired both by the self theory and Blasi's Identity modes. These PEITs provide a normative benchmark related to the construction of identity in the health care context and suggest some innovative avenues for professional ethics research and education. This research wish to elaborate the theoretical foundations that will be utilised further in the future to develop the model of deontological reflexivity (MDR).

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