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La ruse au féminin face aux stratégies dans la littérature contemporaine : La servante écarlate de Margaret Atwood, Barbe bleue de Amélie Nothomb, Incendies de Wajdi Mouawad et Peau d’Homme de Hubert et ZanzimRégis, Marilou 03 1900 (has links)
La notion de ruse est intrinsèquement liée à celle de pouvoir, puisqu’elle implique de subvertir, par la puissance de l’esprit et non par la force physique, le dispositif stratégique des dominants tout en demeurant dans l’espace social que ces derniers contrôlent. Puisque toutes les relations de pouvoir impliquent un dominant et un dominé, « il y a forcément possibilité de résistance ». Celle-ci peut s’accomplir notamment en recourant à la ruse, cette faculté intellectuelle qui permet de tirer son épingle du jeu en identifiant les failles du système et en saisissant les moments opportuns afin d’agir. Elle se présente alors comme une voie à privilégier pour les dominés qui désirent survivre à cet état de domination ou l’outrepasser. En ce sens, la ruse correspond à la tactique – cette capacité qu’a le dominé de « jouer avec le terrain qui lui est imposé » – concept à ne pas confondre avec celui de stratégie, qui sert plutôt aux dominants. Ainsi, la ruse étant l’arme du faible, elle semble se prêter particulièrement aux femmes, souvent exclues de la sphère décisionnelle et soumises aux hommes qui occupent la position de stratèges dans les sociétés patriarcales. Pourtant, la ruse semble être une aptitude généralement associée au masculin dans le domaine littéraire, bien que le concept de ruse découle du terme de la Grèce antique mètis qui tire son origine de déesses, donc des femmes. En effet, dans l’imaginaire collectif occidental, les premiers personnages rusés qui viennent à l’esprit sont Ulysse, Scapin et la figure du renard. En suivant une approche féministe, la présente recherche tentera de réhabiliter la ruse au féminin et de réfléchir aux tactiques adoptées par ces femmes qui doivent composer avec le pouvoir masculin au quotidien. Ainsi, elle portera sur l’héritage de Pénélope et de Shéhérazade – ces femmes rusées qui ont lutté contre les dominants – dans la littérature contemporaine. La recherche étudiera comment les textes littéraires contemporains travaillent le langage afin de représenter les femmes comme des êtres rusés et d’offrir un espace propice aux voix féminines.
Les diverses ruses féminines seront analysées à travers des oeuvres mettant en scène des femmes qui usent de tactiques pour tirer profit d’un système qui les désavantage. Pour ce faire, le projet de mémoire reposera sur l’analyse textuelle des oeuvres, en mobilisant la conception de Foucault du pouvoir et la théorie de la tactique par de Certeau. Les théories de l’agentivité (Gardiner et Butler notamment) et la notion d’empowerment permettront de mettre en lumière les iniquités liées au sexe qui forcent les femmes à recourir à la ruse plutôt qu’à la confrontation, ainsi que le pouvoir qu’elles tirent de leur ruse. Cette recherche vise donc à repérer les multiples formes d’agentivité, à expliquer comment les rapports de forces et la ruse se développent dans chaque oeuvre à l’étude, à définir les conjonctures favorables à l’accomplissement d’une tactique au féminin, à démontrer que la ruse est le moyen à prioriser pour les femmes qui désirent changer leur condition et à souligner la vision désormais positive de la ruse féminine dans la littérature contemporaine. Le corpus sera formé du roman canadien La servante écarlate de Margaret Atwood, où June se soumet en apparence pour mieux frapper par la suite; du roman belge Barbe bleue d’Amélie Nothomb, dont la protagoniste Saturnine retourne le piège de son opposant contre lui; du texte dramaturgique québécois Incendies de Wajdi Mouawad, où Nawal se contraint au silence afin de briser le cycle de la douleur; et du roman graphique français Peau d’Homme de Hubert et Zanzim, dans laquelle Bianca se travestit pour espionner son futur époux. La diversité de ces oeuvres permettra d’observer l’étendue du phénomène de la ruse féminine et d’initier une étude sur le sujet. / The notion of cunning is intrinsically related to the concept of power because it involves subverting, by the strength of the mind rather than the physical strength, the strategic mechanism of the dominant individuals, while remaining within the social space they control. Since all power relations involve a dominant person and a dominated person, “there is necessarily possibility of resistance”. This resistance can be achieved by resorting to trickery, this intellectual faculty which makes it possible to get out of a delicate situation by identifying the flaws in the system and seizing the right moments to act. Cunning becomes one of the best paths for the dominated people who desire to survive to their state of domination or overcome it. In this sense, cunning corresponds to the tactic – this capacity that has the dominated individual to “play with the field imposed on him” – concept to not confuse with the strategy, which rather corresponds to the dominant person. Cunning being the weapon of the weak, it seems to be particularly suitable to women, often excluded of the decision making and submitted to men who are in the position of the strategists in the patriarchal society. Yet, cunning is a general aptitude associated to masculinity in the literary field, although the concept of cunning derives from the ancient Greek term “mètis” which comes from goddesses, therefore women. Indeed, in the western collective imagination, the first shrewd characters that come to mind are, among others, Ulysses, Scapin and the fox figure. By following a feminist approach, this research will try to rehabilitate feminine cunning and to think about the tactics adopted by these women who must deal daily with the masculine power. Thus, it will focus on the legacy of Penelope and Scheherazade – these women who fought against the dominant – in the contemporary literature. This study will therefore explore how the contemporary literary texts work the language to represent the women as cunning individuals and to offer a favorable space for female voices.
Various feminine tricks will be analysed through works featuring women who use some tactics to take advantage of a system that disadvantages them. To do so, this research lies on the textual analysis of literary texts, by mobilising Foucault’s vision of power and de Certeau’s theory of the tactic. The theories of agency (Gardiner and Butler in particular) and the notion of empowerment will allow to highlight the inequities related to sex that force women to resort to trickery rather than confrontation, and the power they benefit from their cunning. Hence, this essay aims to identify the multiple forms of agency, to explain how power relations and cunning develop in each book under study, to define favorable circumstances to the accomplishment of a feminine tactic, to demonstrate that cunning is the preferred method for women who wish to change their condition, and to highlight the now positive vision of the feminine cunning in the contemporary French literature. The corpus is formed by the Canadian novel The Handmaid’s Tale from Margaret Atwood, in which June seemingly submits herself to strike better afterwards; the Belgian novel Barbe bleue from Amelie Nothomb, whose protagonist Saturnine reverses the trap of her opponent against him; the Quebec playwright Incendies from Wajdi Mouawad, in which Nawal forces herself into silence to break the cycle of pain; and the French graphic novel Peau d’Homme from Hubert and Zanzim, in which Bianca travesties herself to spy on her future husband. The diversity of these books will allow to observe the extend of the phenomenon of female trickery and to initiate a study on this subject.
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