Cette thèse étudie la question de l'idiomaticité dans la pratique musicale de l'improvisation libre. Notre enquête débute avec une discussion sur les difficultés qu'implique toute tentative de délimiter cette activité ou de la définir en termes positifs. En effet, le produit d'une performance improvisée émerge au moment de la prestation et s'évanouit immédiatement. Ce fait a poussé de nombreux musiciens et chercheurs à classer cette pratique comme étant « non-idiomatique » (et donc comme étant résistante à l'analyse sémiotique), une désignation qui a été popularisée par Derek Bailey dans son oeuvre pionnière Improvisation. Cependant, malgré son apparent caractère insaisissable, le genre a été capable de subsister depuis plusieurs décennies et continue a se propager à de nouvelles scènes musicales à travers le monde, supporté par un ensemble relativement consistant de préoccupations idéologiques et esthétiques quiunissent et habilitent ses praticiens et admirateurs. En utilisant un modèle sémiotique triadique dans la tradition de C.S. Peirce et en considérant les différents aspects de l'improvisation libre à la lumière de sa théorie des catégories, nous sommes capables d'élaborer une analyse sémiotique des aspects émergents/évanescents de l'improvisation libre, ainsi que de ses propriétés plus durables/idiomatiques. L'improvisation libre n'est pas du tout, comme aiment l'affirmercertains, libre de toutes conventions. Un des accomplissements de cette thèse est de déconstruire de mythe de la non-idiomaticité de l'improvisation libre et de démontrer que les engagements idiomatiques particuliers de cette pratique ont tout simplement été déplacés, abandonnant pour la plupart les idiomes formels (tels des approches génériques, codifiées et reconnaissables à la tonalité et au rythme) pour privilégier des codes de conduite qui rendent l'activité cohérente et signifiante à ses participants. Les témoignages d'improvisateurs révèlent qu'ils sont largement motivés par des préoccupations et principes similaires. Quant à la valeur momentanée reconnue de n'importe quel aspect formel d'une performance improvisée, c'est grâce à l'implémentation soudaine de conventions localisées et habituellement de trèscourte durée (que nous appelons « entente ») que les musiciens arrivent à cette reconnaissance mutuelle (mais toujours contingente). Les improvisateurs tendent à vouloir déconstruire ces conventions formelle émergentes assez rapidement. Ils comptent ne laisser aucun engagement formel se solidifier au delà d'un certain caractère liminaire qu'ils jugent désirable dans le cadre de leur activité. Finalement, n'importe quel indicateur pour mesurer le succès d'une performance improvisée doit se référer soit aux principes unificateurs qui soutendent la pratique et représentent le coeur de sonidiomaticité, soit aux exigences momentanées imposées par l'entente. / This thesis studies the question of idiomaticity in the musical practice of free improvisation. Our enquiry begins with a discussion on the difficulties of delineating this activity and of defining it in positive terms. The production of improvised performances indeed emerges at the moment of its delivery and is immediately fleeting. This has led many musicians and writers to classify the practice as "non-idiomatic" (and thus resistant to semiotic analysis), a designation popularized by Derek Bailey in his pioneering book Improvisation. Yet despite its apparent elusiveness, the genre has been able to endure for several decades and keeps spreading to new music scenes throughout the world, supported by relatively consistent ideological and aesthetic preoccupations that unify and enable its practitioners and fans. By using a triadic semiotic model in the tradition of C.S. Peirce and by considering the different aspects of free improvisation in the light of his theory of categories, we are able to give a semiotic account of both the emergent/evanescent and the enduring/idiomatic aspects of free improvisation. Free improvisation is not at all, as some would hope, free from all conventions. One of the accomplishments of this thesis is to deconstruct the myth of free improvisation's non-idiomaticity and demonstrate that the practice's particular idiomatic commitments have merely been shifted away from formal idioms (such as generically codified and recognizable approaches to tonality and rhythm) and onto codes of conduct that keep the activity coherent and significant for its participants. Musician testimonies reveal that the practices of free improvisers are indeed motivated by similar underlying concerns and principles. As for agreements on the momentary value of any of the improvised performance's formal aspects, they find mutual (if contingent) recognition through short-lived localized formal conventions that we call "entente". Improvisers, however, typically playfully deconstruct these emergent formal conventions rather expeditiously; they are intent on not letting any formal commitments solidify beyond a desired liminal capacity. In the end, any gauge for the success of an improvised performance must refer either to the underlying unifying principles that make up the core of its idiomaticity or to the momentary exigencies of entente.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2017PERP0007 |
Date | 19 January 2017 |
Creators | Bourgeois, André Louis |
Contributors | Perpignan, Universidade Federal Fluminense. Laboratório de História Oral e Imagem (Niteroi, Brésil), Esclapez, Christine, Esclapez, Christine |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | English |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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