On retrace ici le parcours du docteur Alexandre Lacassagne (1843-1924), médecin lyonnais, trajectoire personnelle et scientifique d’un savant de la fin du XIXe siècle, fondateur de l’anthropologie criminelle et d’une école de criminologie passée à la postérité sous le nom d’ « école lyonnaise ». Formé à l’école de santé militaire, il est de cette génération d’hommes et de républicains forgés au feu de la guerre franco-prussienne, de la chute de l’Empire et des débuts de l’aventure coloniale et républicaine. La reconstitution de ses réseaux professionnels, l’étude de ses prises de positions intellectuelles, permet de montrer qu’il est un savant emblématique de son temps. Sa bibliothèque révèle ses états d’âme. L’analyse des ouvrages fait émerger une angoisse récurrente, celle de l’altérité : des criminels bien sûr, mais aussi des femmes, des fous, des invertis, des « primitifs », dont les inquiétantes figures contrastent avec l’image de légèreté et de foi inconditionnelle dans le Progrès qui est habituellement celle de la Belle Époque. L’anthropologie et l’anthropométrie se mettent au service d’une frénésie taxinomique qui trahit l’inquiétude générée par toute indétermination, désormais intolérable. Un double processus d’essentialisation et de hiérarchisation se trouve aux fondements des discours justifiant l’exclusion persistante de certaines catégories de populations, rejetées en deçà de l’Universel. Lacassagne nous sert d’œilleton pour examiner les enjeux biopolitiques de cette exclusion. C’est l’avers, cette face de la médaille qui porte une effigie – et qui serait frappée à celle de l’Autre en cette fin de siècle – et le portrait d’un homme et de son temps par l’inventaire de ses aversions, qu’on a voulu reconstituer. / The following pages will retrace the personal and professional path of the Lyonnais doctor Alexandre Lacassagne (1843-1924), an intellectual from the end of the 19th century who founded anthropological criminology and the school of criminology that would go down in history known as the “école lyonnaise”. Having done his studies at a military school he belonged to that generation of men and Republicans who had been forged by the fires of the Franco-Prussian war, the fall of the Empire and the beginnings of colonial and Republican adventures. The reconstitution of his professional networks and the study of his intellectual positions show that he was an emblematic scholar of his time. His library reveals his true feelings : the analysis of the works shows an ongoing anguish, that of alterity. Of course of criminals, but also of women, of the insane, homosexuals and the “primitive” whose troubling figures contrast with the image of the carefree and unconditional faith in Progress that was quintessential of the “Belle Epoque”. Anthropology and anthropometry are at the service of a taxonomic frenzy that betrays the concern generated by all disinclination that had become intolerable. A process at the same time of essentialism and hierarchism are the foundations of a discourse justifying the ongoing exclusion of certain categories of populations rejected below the “Universel”. Lacassagne serves as a peephole to examine the “biopolitical” stakes of this exclusion. It is the obverse, the side of the coin showing the effigy- and that will be struck with the Other at the end of the century- and the portrait of a man and his time by the inventory of his aversions, which we wished to reconstruct.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2009LYO20050 |
Date | 18 September 2009 |
Creators | Salle, Muriel |
Contributors | Lyon 2, Zancarini-Fournel, Michelle |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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