RESUME<p>La Trypanosomiase Humaine Africaine (THA) appelée également « maladie du sommeil» est une maladie parasitaire provoquée par un protozoaire du genre Trypanosoma dont deux sous-espèces (T. brucei gambiense et T. brucei rhodesiense) sont pathogènes à l’homme. La stratégie de lutte contre cette maladie est essentiellement basée sur le dépistage précoce et le traitement des malades, complété avec le contrôle du vecteur. Cependant, l’utilisation du service de dépistage de la THA par les communautés exposées représente un défi majeur. L’adhésion aux campagnes de dépistage actif avec des équipes mobiles spécialisées était en-dessous de 50% dans certains villages endémiques fin des années nonante. De surcroît, l’utilisation des services de santé fixes en RDC est si faible que ceci compromet le dépistage passif dans les formations sanitaires fixes. Notre hypothèse est que cette faible utilisation des services de santé pourrait elle-même être due à un problème d’acceptabilité du dépistage et traitement de la THA par les communautés vivant dans les zones de transmission de la THA. Tout ceci compromet l’élimination de la THA comme problème de santé publique, un but que s’est fixé la communauté internationale d’ici 2020.<p>Ce travail a comme objectif d’explorer cette dimension socioculturelle de la maladie qui est souvent négligée dans le contrôle de la THA et générer une meilleure connaissance de ces aspects.<p><p>Nous avons réalisé cinq études en total pour adresser la question de la sous-utilisation des services de dépistage et traitement de la THA par les communautés et sa relation avec l’acceptabilité des services. Nous avons d’abord développé une première étude qui évalue les résultats du traitement de la THA en analysant rétrospectivement les données de routine du programme de contrôle de la THA pour l’année 2006 à 2008. Ensuite, nous avons réalisé trois études qualitatives par focus group (groupe focalisé) et entretiens individuels pour documenter la dimension socioculturelle de la lutte contre la THA. D’abord une étude qui a exploré les perceptions sur la THA dans la communauté, suivi par une étude qui explore les perceptions sur le traitement de la THA et une autre qui se concentre sur les pratiques diagnostics des professionnels de santé face à un syndrome neurologique en contexte de ressources limitées. <p><p>Une cinquième étude combine une enquête-ménage avec des focus groups et des entretiens individuels pour explorer les perceptions de la communauté sur la santé en général et les services de santé. <p>Nous avons comparé les obstacles à l’utilisation des services de dépistage et traitement de la THA identifiés dans ce travail avec les messages de sensibilisation sur la THA utilisés au programme de contrôle de la THA en RDC et nous avons développé des recommandations stratégiques.<p><p>L’évaluation des indicateurs de performances sur l’issue de traitement montre que le taux de suivi post-thérapeutique est faible dans son ensemble :25 % pour le premier suivi de six mois et moins d’un pourcent des patients revient pour la dernière visite de contrôle au mois 24. Nous avons aussi observé dans cette étude un taux d’échec au mélarsoprol et à la pentamidine respectivement de 30% et de 22 % au Kasaï Oriental qui sont cependant difficilement interprétables, car le dénominateur est incomplet. Comme très peu de patients reviennent au contrôle post-thérapeutique, cette proportion est probablement biaisée vers ceux qui sont en échec de traitement.<p><p>L’étude de perception de la THA montre que la maladie est bien connue dans les communautés vivant dans les zones à risque. Par contre, plusieurs obstacles au dépistage et traitement de la THA ont été identifiés. Les plus importants sont :la toxicité des médicaments de la THA, les obstacles financiers, l’inadéquation entre le programme de dépistage des équipes mobiles et les occupations des communautés, les interdits qui accompagnent le traitement de la THA, le manque de confidentialité et la peur de la ponction lombaire. <p>L’étude sur la perception du traitement de la THA a montré que le mélarsoprol est perçu comme un médicament toxique et est surnommé « médicament des interdits ». Par contre, le régime NECT est perçu comme un nouveau médicament moins toxique qui a rendu les interdits liés au mélarsoprol obsolètes sauf un seul, celui de ne pas avoir de rapport sexuel pendant la période de traitement et de suivi post thérapeutique qui est de 6 mois. Les interdits ont été instaurés de manière empirique par les professionnels de santé et les communautés pour mitiger les effets indésirables du mélarsoprol. Leur violation pourrait entrainer des conséquences graves et mortelles. Ces interdits sont fortement ancrés dans les croyances de la communauté et constituent aujourd’hui un obstacle au dépistage et traitement. <p><p>L’étude sur les pratiques diagnostiques des professionnels de santé en matière de syndrome neurologique en contexte de ressources limitées a montré qu’en zone rurale le diagnostic est principalement clinique. Les obstacles perçus au diagnostic de confirmation sont essentiellement d’ordre financier puisque le patient doit tout financer de sa poche. Autres obstacles évoqués sont le manque d’outils de diagnostic et la perception de la communauté qui voit le clinicien comme un devin (petit dieu) ou oracle capable de « deviner » directement la maladie sans passer par un processus diagnostique de laboratoire.<p>L’étude sur les perceptions de la santé et des services de santé a montré que les capacités de travailler (82%) et les capacités de se mouvoir (66%) sont les signes de bonne santé les plus perçus. 90% des responsables des ménages perçoivent positivement la santé de leur ménage. Les opinions sur le service de santé sont partagées.<p><p>Les études présentées dans ce travail ont généré des nouvelles connaissances sur la dimension socioculturelle de la THA. L’analyse des messages de sensibilisation sur la THA utilisés par le programme de contrôle de la THA en RDC en termes de comparaison avec les obstacles au dépistage et traitement de la THA identifiés dans ce travail montre que ces aspects socioculturels bien qu’étant des véritables goulots d’étranglements dans la dynamique de la lutte contre la THA ne sont pas bien ciblés par la communication sur la THA. <p>Les perspectives des communautés exposées au risque de la THA doivent être adressées par un dialogue continu entre professionnels de santé et communautés adapté aux réalités locales. Ainsi il sera possible d’améliorer de manière opérationnelle les stratégies d’information, éducation et communication, et de façon plus large, le dépistage et traitement de la THA en intégrant la dimension socioculturelle de la THA dans la politique de lutte contre la THA. <p><p>SUMMARY<p>Human African Trypanosomiasis (HAT), also known as “sleeping sickness” is a parasitic disease caused by protozoa of the species Trypanosoma. There are two types that infect humans, Trypanosoma brucei gambiense and Trypanosoma brucei rhodesiense. The strategy used to control sleeping sickness consists of early case detection and treatment of patients, together with vector control. Meanwhile, utilization/access to HAT screening by the affected communities remains a major challenge. Adherence to active screening programs with mobile units was below 50% in certain endemic villages end of the 90’s. Moreover, utilization of fixed health facilities in DRC is so low that it compromises passive case finding. Our hypothesis is that this low utilization of health services is caused by a problem of acceptance of case detection and treatment of HAT by the communities living in the HAT transmission zones. This compromises the target of the international community to eliminate HAT as a public health problem by 2020. This thesis wants to explore and tries to generate more knowledge on the socio-cultural aspect that is often neglected in the control of HAT. <p><p>We conducted five studies to address the lack of community participation in HAT screening and treatment activities and the relation with acceptance of these services. <p>The first study evaluated the results of HAT treatment by retrospectively analyzing data of the routine HAT control program for the period 2006-2008. <p><p>Afterwards we performed three qualitative studies consisting of focus group discussions and individual interviews to document the socio-cultural dimension of the fight against HAT. The first study explored the community perceptions regarding sleeping sickness. The second study explored the perceptions regarding HAT treatment and a third study focused on diagnostic practices of health professionals in low-resource settings facing a neurological syndrome. <p><p>The fifth study consists of a household survey, focus group discussions and individual interviews to explore community perception regarding health in general and health services. We compared the identified barriers to screening and treatment of HAT with awareness messages on sleeping sickness used by the HAT control program in DRC and we developed strategic recommendations. The evaluation of performance indicators for treatment showed that compliance with post-treatment follow-up is very poor: 25% for the first post-treatment follow-up examination at six months and less than 1% of the patients returns for the final examination at 24 months. In this study we also observed a treatment failure rate of respectively 30% and 22% for melarsoprol and pentamidine in Kasai-Oriental. However, these date are difficult to interpret because of an incomplete denominator. As only few patients return for follow-up visits, this proportion is probably biased towards those in treatment failure.<p> <p>The study on the perception of sleeping sickness shows that the disease is well known amongst the communities living in the endemic areas. However, several screening and treatment barriers were identified. The most important are: drug toxicity, financial barriers, the incompatibility between the itineraries of the mobile screening teams and the local communities’ activities, the prohibitions related to HAT treatment, lack of confidentiality and fear of lumbar punctures. The study on the perceptions regarding HAT treatment show that melarsoprol is perceived as a toxic drug and is nicknamed the ‘taboo drug’. On the other hand the NECT regime is perceived as the new drug that is less toxic and that has abolished all the taboos of melarsoprol with the important exception of sexual intercourse during the treatment period and the post-treatment follow-up period of six months. <p><p>The prohibitions have been established empirically by healthcare providers and communities to mitigate the side effects of the melarsoprol regimen. Violating these restrictions is believed to cause severe and sometimes mortal complications. Communities adhere strictly to these prohibitions and this constitutes a barrier for HAT screening and treatment.<p><p>The study focusing on diagnostic work-up of neurological syndromes in low-resource settings by health care providers has shown that in rural areas diagnosis is usually clinical. Barriers to confirmation of diagnosis are mainly related to the purchasing power of the patient. Other reported barriers are a lack of diagnostic tools and the communities’ perceptions associated with the care provider. Clinicians are perceived as diviners being able to directly identify the cause of the illness without using laboratory tests. The study regarding the perceptions on health and health services has shown that ability to work (82%) and ability to move (66%) are the most perceived signs of good health. 90% of the household responsibles positively perceive the health of their family. The opinions on the health services are divided. <p><p>The studies presented in this thesis have generated new insights on the socio-cultural dimension of HAT. The analysis of the awareness messages on HAT in DRC compared with the reported HAT screening and treatment barriers have shown that <p>although these sociocultural aspects are real bottlenecks in the dynamic of the fight against HAT, they are not targeted by the communication on HAT. <p><p>The prospects for communities at risk of HAT should be addressed through continuous dialogue between health professionals and communities adapted to local realities.<p><p>It will thus be possible to operationally improve the information strategies, education and communication, and more broadly, screening and treatment of HAT by integrating the socio-cultural dimension in the fighting policy against sleeping sickness.<p> / Doctorat en Sciences / info:eu-repo/semantics/nonPublished
Identifer | oai:union.ndltd.org:ulb.ac.be/oai:dipot.ulb.ac.be:2013/209041 |
Date | 26 June 2015 |
Creators | Mpanya Kabeya, Alain |
Contributors | Dujardin, Bruno, Boelaert, Marleen, Lutumba-Tshindele, Pascal, Donnen, Philippe, Criel, Bart, Humblet, Claire Perrine, Piette, Danielle, Robays, Jo |
Publisher | Universite Libre de Bruxelles, Université libre de Bruxelles, Ecole de Santé publique, Bruxelles |
Source Sets | Université libre de Bruxelles |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | info:eu-repo/semantics/doctoralThesis, info:ulb-repo/semantics/doctoralThesis, info:ulb-repo/semantics/openurl/vlink-dissertation |
Format | 4 full-text file(s): application/pdf | application/pdf | application/pdf | application/pdf |
Rights | 4 full-text file(s): info:eu-repo/semantics/openAccess | info:eu-repo/semantics/openAccess | info:eu-repo/semantics/openAccess | info:eu-repo/semantics/openAccess |
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