Ce travail propose de réfléchir sur la notion de lieu commun, à partir de deux perspectives générales. La première relève d’une enquête philosophique sur la persuasion et s’inscrit par conséquent à la croisée d’une réflexion sur les formes intelligibles et sensibles de la preuve et d’une exploration de la tradition rhétorique du discours persuasif. La seconde relève quant à elle d’une interrogation sur la parole propre, qui engage le rapport entre subjectivité, langage et expression. C’est précisément à l’intersection de ces deux problématiques que l’on rencontre la notion de lieu commun, en vertu de la double acception qu’elle revêt. Héritier de la réflexion rhétorique sur les formes de l’argument, le lieu permet d’interroger directement la nature de la preuve discursive, telle qu’elle se donne à entendre dans les effets sensibles de la parole persuasive. Par ailleurs, dans son acception devenue usuelle, le lieu commun apparaît sous la figure paradoxale d’un obstacle à l’expression du soi. Il traduit à la fois une hétéronomie de la pensée et du dire, et la manifestation d’une parole étrangère, aliénée et anonyme, tapie au cœur de l’intériorité. Comment ce concept, visant initialement la maîtrise persuasive du discours, en est-il venu à nommer une dépossession de la parole propre ? De la Rhétorique d’Aristote aux écrits de Jean Paulhan, une enquête à la fois historique et conceptuelle peut s’efforcer de retracer les raisons de cette évolution, et d’évaluer la façon dont le lieu, tout en résistant au modèle d’une possession subjective du discours, persiste néanmoins à faire entendre une autre forme d’appropriation de la parole. / This study is a reflection about the notion of « commonplace » (lieu commun) that aims at elucidating its nature from two different points of view. The first one is an investigation about the concept of persuasion, which closely intertwines a philosophical inquiry about the intelligible and sensible form of proofs and a historical approach of the rhetorical tradition of persuasive speech. The second one is a research about the idea of a “proper speech” (parole propre), which deals with the relationship between subject, language and expressivity. The notion of commonplace is a central issue for both perspectives, due to its equivocal sense. As the result of a complex rhetorical theory of argumentation, the commonplace is able to highlight the very nature of the persuasive proof, which is to be said and heard through the sensible effects of persuasive speech. Besides, in the “ordinary” sense of the notion, the commonplace is the highly paradoxical figure of an obstacle to the expression of the self: it allegedly reveals the heteronomy of one’s thought and speech, and the underlying presence of an estranged, alienated and anonymous voice inside the interiority. How can one account for the relationship between those two different, even opposite, meanings? From Aristotle’s Rhetoric to Jean Paulhan’s works, this study aims at exploring the historical and conceptual reasons of this equivocality. It eventually attempts to describe the very specific form of speech appropriation enables by commonplaces, despite their irreducibility to the concept of authorship involved in the “classical” concepts of subjectivity.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2014PA010676 |
Date | 12 December 2014 |
Creators | Sallenave, Thibaut |
Contributors | Paris 1, Benoist, Jocelyn |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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