Au carrefour de la sociologie des élites, de l’histoire intellectuelle et des études de réception, cette recherche explore les mécanismes par lesquels les discours théoriques et les idées politiques circulent entre pays, entre disciplines, et entre mondes savants et politiques. Elle prend pour objet la réception, dans les champs intellectuel et politique français, de la théorie de la justice sociale de John Rawls et du vaste débat ouvert par celle-ci dans le monde anglophone à partir de 1971. Contribution à une histoire sociale des idées politiques contemporaines, elle combinel’observation in situ de séminaires d’experts, de colloques universitaires, l’ethnographie de discussions en ligne, avecune enquête statistique, et l’étude d’archives administratives, universitaires et éditoriales. La description desréférences à Rawls, Sen ou Walzer dans les publications académiques, la presse, les programmes politiques, l’actionpublique ou les programmes scolaires fonctionne ainsi comme un analyseur de reconfigurations plus globales, comme la domination accrue de l’anglais sur les échanges culturels transnationaux, le déclin des référentiels marxistes et keynésiens au sein de la gauche française, ou la remise en cause du paradigme structuraliste au sein des sciences humaines et sociales françaises. On montre comment les appropriations des « théories de la justice » et leurs circulations se rapportent à la position occupée par leurs médiateurs et la structure du milieu d’interconnaissance qu’ils constituent. Alors que la sociologie de la réception a souvent négligé l’analyse du contenu des appropriations, on montre en outre comment une lecture sociologique de celles-ci permet d’expliquer des affinités ressenties par ces médiateurs pour la pensée de Rawls, par delà les frontières nationales, disciplinaires et sectorielles / Spanning the sociology of elites, intellectual history, and reception studies, this research explores how theories and political ideas are circulated across countries and disciplines, as well as between the academic and political worlds. Starting in 1971, it studies the French intellectual and political reception of John Rawls’s theory of social justice, and more broadly of the debates it sparked in the English-speaking world. Contributing to a historical sociology of political ideas, this dissertation combines ethnography in think-tanks and academic conferences, as well as in online discussions, with a statistical survey, and the study of archives of publishers, academics and administrations. Through the exploration of references to Rawls, Sen or Walzer in academia, the press, political platforms or curricula, we show how this reception is an analyzer of broader changes, such as the growing dominance of English in transnational cultural exchanges, the declining recourse to Marxist and Keynesian paradigms in the French Left, and the questioning of centrality of structuralism in social sciences and the humanities in France. It shows that the very diverse ways in which “theories of justice” have been appropriated and circulated in France depend on the social location of their mediators, and on how their networks are structured. Whereas the sociology of reception has often overlooked the internal analysis of appropriations, this research shows how analyzing them sociologically helps explain why these mediators felt elective affinities with Rawls’s thought, despite national, disciplinary and sectoral boundaries
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2011LIL20013 |
Date | 14 November 2011 |
Creators | Hauchecorne, Mathieu |
Contributors | Lille 2, Matonti, Frédérique, Sawicki, Frédéric |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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