Cette thèse examine les discours sur la société de consommation à Montréal entre 1945
et 1975, soit pendant la période d’abondance relative surnommée les Trente Glorieuses. En
s’appuyant sur des discours dont la provenance reflète la diversité des points de vue qui
entrent dans les foyers et circulent dans l’espace public québécois — périodiques grand
public; magazines « féminins »; publications des institutions financières, des syndicats, de
groupes gravitant plus ou moins loin de l’Église catholique, d’associations de parents, du
milieu communautaire; mémoires en service social; rapports des commissions d’enquête
gouvernementales — elle lève le voile sur la façon dont l’entrée dans la consommation de
masse et ses répercussions sur les modes de vie sont perçues par une vaste gamme de
commentateurs et, dans une moindre mesure, vécues.
En s’appuyant sur une analyse quantitative, elle soutient que Montréal et le Québec
n’entrent dans la société de consommation qu’à partir des années 1960, même si plusieurs
indicateurs économiques et la consommation domestique des ménages font état d’une
prospérité caractérisant l’ensemble de la période. Elle procède ensuite à une analyse
qualitative des discours sur l’état de l’économie qui met en lumière la persistance
d’inquiétudes — notamment au sujet de l’inflation, pourtant bridée — tout au long des Trente
Glorieuses, l’abondance semblant manifestement fragile aux yeux de plusieurs experts. Elle se
tourne par après vers les réactions positives, ambivalentes, mais surtout négatives que suscite
l’entrée dans la consommation de masse elle-même et la transformation des valeurs qui en
découle. Puis, elle propose une analyse des discours portant sur les répercussions de l’entrée
dans la société de consommation sur les pratiques financières (l’épargne et le crédit), sur les
rapports familiaux et la construction des identités au foyer ainsi que sur la pauvreté.
Elle pose l’hypothèse d’une réticence plus grande des experts franco-québécois à la
consommation de masse par rapport à leurs collègues anglophones. Elle soutient également
que l’entrée dans la société de consommation renforce le patriarcat au Québec, du moins dans
les discours. Ceux-ci se déclinent par ailleurs en deux temps, le conservatisme de la période
1945-1965 cédant le pas à des prises de position imprégnées par le contexte de contestation
sociale du tournant des années 1970. À partir de la fin des années 1960, des phénomènes
comme l’endettement ou la pauvreté commencent à être appréhendés en lien avec le
consumérisme dans le cadre d’une rhétorique socialisante, souvent assez militante, qui conçoit
de plus en plus la consommation comme un problème structurel et collectif en soi. / This dissertation examines discourses on consumer society in Montreal between 1945
and 1975, during a period known as the “golden age of capitalism.” Relying on a variety of
sources that reflect a diversity of perspectives — namely mainstream periodicals, “feminine”
magazines, social work theses, commissions of inquiry, and publications produced by
financial institutions, parent associations, unions, Catholic organizations, and community
associations — this dissertation reveals how a wide array of commentators perceived the
beginnings of mass consumerism in Montreal and its repercussions on lifestyles. It also
explores, to an extent, how so-called ordinary people experienced these beginnings and
repercussions in their everyday lives.
Although economic indicators display a relative prosperity, this dissertation first offers
a quantitative analysis that shows that consumer society did not truly begin in Montreal (or
Quebec more generally) before the 1960s. This study then proceeds to a qualitative analysis of
discourses concerning Quebec’s and Canada’s economic situation. Apprehensions surrounding
the economy persisted throughout this period — most notably around inflation, despite its
being under control — and several experts continued to view prosperity as fragile. This
dissertation then looks at the positive, ambivalent, but more frequently negative reactions to
the beginnings of mass consumerism and the changes in values it entailed. It then finally
examines discourses that addressed the repercussions of consumer society on household
financial practices, on familial relationships and identity construction within the home, and on
poverty.
This dissertation suggests that French-Québécois experts resisted mass consumerism to
a greater extent than their anglophone colleagues and that the arrival of consumer society
reinforced patriarchy (at least discursively). It also highlights a rupture within discourses on
consumerism sometime around 1965 as the conservatism of the previous two decades gave
way to ideas linked to the social unrest of the mid-to-late 1960s and early 1970s. From the mid
1960s onward, most commentators began to understand phenomena like debt and poverty as
fundamentally connected to consumerism as they developed an oftentimes militant socializing
rhetoric that increasingly viewed consumption itself as a structural and collective problem.
Identifer | oai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/18465 |
Date | 10 1900 |
Creators | O'Neill, Stéphanie |
Contributors | Baillargeon, Denyse |
Source Sets | Université de Montréal |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Thèse ou Mémoire numérique / Electronic Thesis or Dissertation |
Page generated in 0.0042 seconds