Cette thèse porte sur l’analyse des discours autour des droites radicales européennes dans les revues et les journaux du Canada français. Qu’est-ce que les publications canadiennes-françaises des années 1920, 1930 et 1940 (revues, journaux d’opinions et grands quotidiens) avaient à dire sur les cinq principales droites radicales de l’Europe de l’entre-deux-guerres incarnées par Benito Mussolini en Italie, Charles Maurras et l’Action française en France, Adolf Hitler en Allemagne, Franco en Espagne et Salazar au Portugal ? À quels types d’éditoriaux, de couverture de presse et de propagande le lectorat canadien-français était-il exposé dans ces publications qui avaient, pour la plupart, un parti pris affiché pour ou contre les droites radicales européennes ? En quoi les positions du Saint-Siège sur les droites radicales ont-elles influencé l’opinion des journalistes et des éditorialistes canadiens-français à leur égard ? Le Canada français était-il davantage attiré par le corporatisme social découlant des traditions de l’Église catholique plutôt que par le corporatisme d’État qui a fortement inspiré des dictateurs européens comme Mussolini, Franco et Salazar ? Dans quelle mesure l’anticommunisme au Canada français a-t-il forgé les opinions à l’égard des droites radicales européennes ? L’attitude du Canada français à l’égard d’Hitler a-t-elle changé lors de l’invasion de la France en juin 1940 ? Comment interpréter le NON du Canada français lors du plébiscite de 1942 sur la conscription face à ces même des droites radicales européennes ? Voilà autant de questions qui guident cette recherche dans les pages des revues, mensuels et hebdomadaires et quotidiens de différentes allégeances.
L’originalité de cette thèse repose sur le fait qu’elle couvre à la fois l’étude de cinq droites radicales européennes (L’Action française de Charles Maurras, Mussolini, Salazar, Hitler et Franco) à travers le prisme de vingt publications canadiennes-françaises qui reflètent l’ensemble du spectre idéologique du Canada français de l’entre-deux-guerres que l’on pourrait diviser en six groupes. Le premier, l’extrême gauche, est incarné par l’hebdomadaire communiste Clarté. On retrouve ensuite la gauche libérale dont les idées sont véhiculées par l’hebdomadaire Le Jour et le quotidien L’Ordre. En troisième lieu, nous avons la gauche catholique personnifiée par la revue La Relève et le mensuel Jeunesse. En outre, nous pouvons regrouper les revues L’Action française de Montréal, L’Action nationale et les quotidiens L’Action catholique, Le Devoir et Le Droit au sein du noyau nationaliste et catholique. Au centre de l’échiquier, nous avons des publications plus libérales et capitalistes destinées au grand public, à savoir La Presse, Le Soleil, La Patrie, Le Canada et La Revue moderne. Enfin, nous retrouvons à l’extrême droite du spectre les publications d’obédience fasciste Le Miroir, Le Patriote, Fasciste Canadien et, dans une moindre mesure, la revue Vivre et l’hebdomadaire La Nation dont le radicalisme n’atteignait pas le niveau des journaux d’Adrien Arcand.
La thèse comporte sept chapitres qui portent sur l’opinion des revues et de la presse canadiennes-françaises sur les droites radicales européennes pour la période s’échelonnant de 1918 à 1945. Ainsi, le deuxième chapitre se consacre aux droites radicales européennes couvrant la période 1918-1932, à savoir l’Action française et Charles Maurras en France Benito Mussolini en Italie et Salazar au Portugal. Le troisième chapitre se concentre sur l’avènement au pouvoir des Nazis en Allemagne en 1933. Le quatrième chapitre porte sur l’Allemagne nazie d’Hitler et l’Italie fasciste de Mussolini pour la période 1933-1935. Le cinquième chapitre traite de la Guerre civile espagnole et Franco de 1936 à 1939. Le sixième chapitre s’attarde à la formation des forces de l’Axe en 1936 et aux événements qui se succèdent sur la scène internationale jusqu’à l’été 1939. Enfin, le septième et dernier chapitre couvre toute la période de la Seconde Guerre mondiale de 1939 à 1945.
Après une analyse de 690 textes, éditoriaux et articles de presse, nous concluons que la culture religieuse fortement implantée dans le Canada français de l’entre-deux-guerres a constitué un rempart idéologique contre l’intrusion des droites radicales européennes au Québec. De fait, nous avons pu observer dans les pages des publications canadiennes-françaises que l’hostilité des mouvements de jeunesse de l’Action catholique à l’égard du nazisme, le traditionalisme religieux et le respect des encycliques ont été des repoussoirs à la tentation des droites radicales européennes au Québec au cours des décennies 1920, 1930 et 1940. Malgré ce fait, notre analyse a révélé que la majorité des publications étudiées ont affiché des sympathies – à des degrés divers et selon les époques – pour Mussolini, Franco et Salazar, principalement en raison de leur proximité avec l’Église catholique, leur appui au corporatisme et leur anticommunisme, et ce jusqu’à la veille du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. Les opinions favorables à l’égard des programmes politiques, économiques et sociaux de Mussolini, Franco et Salazar se sont progressivement estompées au fur et à mesure que le Canada s’est engagé aux côtés de la France et de la Grande-Bretagne pour vaincre les forces de l’Axe de 1939 à 1945.
Identifer | oai:union.ndltd.org:uottawa.ca/oai:ruor.uottawa.ca:10393/35300 |
Date | January 2016 |
Creators | Théorêt, Hugues |
Contributors | Bock, Michel |
Publisher | Université d'Ottawa / University of Ottawa |
Source Sets | Université d’Ottawa |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Thesis |
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