Dès son origine anglaise au XIXe siècle dans les public schools, le sport répondait à des impératifs stratégiques allant du contrôle des populations étudiantes, jusqu'au projet plus vaste de formation d'une élite conquérante. Dans l'importation en France du sport, Pierre de Coubertin posa des objectifs similaires, désirant réformer une société jugée en crise. Le sport, caractérisé par une liberté encadrée et régulée, se heurta dans ce projet à la gymnastique, autre mode de contrôle des populations en vigueur dans les pratiques corporelles, marqué par le disciplinaire. Surtout, tel que pensé par Coubertin, le caractère du sport est fondamentalement ambivalent, étant à la fois aliénant et émancipateur. Cette ambiguïté se cristallise dans la question de l'égalitarisme. En effet, le sport, fondamentalement aristocratique au sens où il ne profite qu'aux forts physiquement, parvient paradoxalement à se présenter comme une pure méritocratie où le rang de chacun serait uniquement dépendant des efforts fournis, produisant ainsi ordre et travail. Cette représentation méritocratique du sport s'est cependant construite tout au long du XXe siècle, répondant à un progressif oubli de son caractère aristocratique. Toutefois, malgré les évolutions des discours, le fait sportif demeure aristocratique, tant physiologiquement que psychologiquement. Des résistances naissent : celles du sport lui-même, qui ne parvient pas à se réduire au seul mérite ; celles des sportifs, qui élaborent des stratégies qualifiées de délictueuses (triche, dopage, etc.) afin de subvertir l'aristocratie sportive. Des corps utiles, des âmes travailleuses et des caractères soumis sont ainsi produits par cette dialectique du mérite. Le sport exemplifie les valeurs du mérite et tâche d'en imposer la logique, en se constituant comme un dispositif se généralisant peu à peu à tous les champs de la société. / From its British beginning in the XIXth century in the public schools, sport was meant for the strategic imperatives of controlling student populations and at a larger scale for training a dominating elite. Pierre de Coubertin has set similar goals when importing sport in France, wanting to reform a society considered in crisis. Sport, characterized by a framed and regulated freedom, faced gymnastics, the established method of population control by body practice, characterized by discipline. Above all, as thought by Coubertin, the sport characteristic is fundamentally ambivalent, being both alienating and emancipating. This ambiguity crystallize itself in the issue of egalitarianism. Sport, fundamentally aristocratic in the sense that it benefits only to physically strong people, paradoxically succeeds to show itself as a pure meritocracy where ranking is solely dependent of the provided efforts, thus producing order and work. This meritocratic representation of sport has built itself throughout the XXth century, gradually replacing its aristocratic characteristic. However, despite the evolutions of speeches, the sporting fact remains aristocratic, both on physiological and psychological sides. Some resistances arise: those of sport itself, which can not reduce itself to the sole merit; those of the sportsmen, who elaborate strategies described as unlawful (cheating, doping, etc.) in order to subvert the sport aristocracy. Useful bodies, hardworking minds, submissive personalities are thus produced by this dialectic of merit. Sport exemplifies the values of merit and try to compel its logic, by constituting itself as an apparatus which gradually extends to all fields of the society.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2012LYO30051 |
Date | 30 August 2012 |
Creators | Verchère, Raphaël |
Contributors | Lyon 3, Rieu, Alain-Marc |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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