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La reconnaissance des qualifications des professionnels formés à l’étranger : l’égalité réelle mise en oeuvre au Québec?

De nombreuses études tendent à démontrer qu’au Québec et au Canada, les personnes immigrantes font face à divers obstacles pour accéder au marché de l’emploi québécois, surtout lorsqu’il s’agit d’y exercer une profession réglementée par un ordre professionnel. En effet, avant de décerner un permis, les ordres doivent s’assurer de la compétence des candidats à la profession, conformément à la mission de protection du public qui leur a été déléguée par l’État. Pour ce faire, ils imposent diverses conditions d’admission aux professions, dont celle d’obtenir un diplôme reconnu. Pour ne pas restreindre indûment l’accès aux professions, la loi prévoit que les ordres ont l’obligation d’offrir aux personnes aux parcours atypiques – dont la quasi-totalité sont formées à l’étranger – la possibilité de démontrer l’équivalence de leurs qualifications. Lorsque les ordres estiment qu’il n’y a pas équivalence, des mesures de compensation – sous forme de formations d’appoint, de stages ou d’épreuves d’aptitude – sont prescrites aux candidats. Or, certaines conditions d’admission et procédures de reconnaissance sont aujourd’hui contestées, car considérées inadaptées ou discriminatoires à l’égard des personnes immigrantes. Il convenait donc d’examiner la compatibilité des normes d’admission et de reconnaissance des ordres professionnels québécois au droit à l’égalité, tel que garanti par la Charte des droits et libertés de la personne.
La présente thèse conclut que les personnes formées à l’étranger sont victimes de discrimination systémique dans l’admission aux professions. Pour en arriver à cette conclusion, nous avons, dans un premier temps, brossé le portrait du cadre juridique entourant l’admission aux professions, puis identifié, par le biais d’une revue de la littérature, les difficultés que les conditions d’admission et les mécanismes de reconnaissance posent aux personnes formées à l’étranger. Dans un deuxième temps, nous avons appliqué la méthode du droit classique pour mettre en exergue les exigences du droit à la non-discrimination en contexte d’admission aux professions et de reconnaissance des qualifications. L’analyse de la jurisprudence pertinente démontre d’ailleurs que les personnes formées à l’étranger disposent de chances raisonnables de faire valoir le caractère à première vue discriminatoire des normes, pratiques et décisions en la matière.
Dans un troisième temps, l’enquête empirique de type qualitatif que nous avons menée, en complément de la méthode du droit classique, mène à la conclusion que les ordres professionnels comprennent mal le sens que prend la protection du public et ses exigences particulières dans le contexte propre des professions qu’ils réglementent. Non seulement ce constat permet-il de remettre en doute la légitimité de l’ensemble des normes, pratiques et décisions des ordres relatives au contrôle de l’admission, mais il confirme que, dans de nombreux cas, les normes d’admission et de reconnaissance, prisent isolément ou lorsque considérées dans leur ensemble, portent atteinte, de façon injustifiée, au droit à l’égalité des personnes formées à l’étranger. Dans un dernier temps, l’ensemble de nos recherches nous a permis de proposer différentes mesures d’ordre systémique à l’attention des ordres, à titre de principaux responsables du contrôle de l’admission, et aux autres acteurs impliqués dans le parcours d’admission et dont l’action concertée est requise pour remédier à la situation. / Multiple studies tend to demonstrate that in Québec, and elsewhere in Canada, immigrants must overcome many obstacles to work in the field in which they were trained. These difficulties are even greater when it comes to accessing a regulated profession. Obtaining a license from a professional regulatory body is contingent on the candidates meeting various requirements, for example having obtained a recognized diploma, which are made to ensure that candidates are sufficiently qualified to practice the profession in a manner deemed safe for the public. In order to not unduly restrict access to these professions, regulatory bodies are legally obliged to offer foreign-trained candidates the opportunity to show that their qualifications are equivalent to those of locally trained candidates. If the qualifications are not deemed equivalent, compensatory measures, such as a training program, an internship, or qualification exams, are imposed. However, certain admission requirements and procedures for recognition of qualifications are now being challenged, as they are considered inappropriate or discriminatory towards immigrants. As a result, it is timely to examine whether these admission and recognition standards respect the right to equality as guaranteed by the Charter of Human Rights and Freedoms (Québec Charter).
In this thesis, I conclude that foreign-trained professionals are victims of systemic discrimination when it comes to accessing regulated professions. To arrive at this conclusion, I reviewed the legal framework regulating admission to these professions, and the academic and professional literature relating to the difficulties faced by foreign-trained professionals throughout the admission process. Then, using the traditional legal method, I set out the teachings and principles of anti-discrimination law, and in particular under the Québec Charter. The decisions rendered across Canada in cases brought forward by foreign-trained professionals seeking access to a regulated profession show that, despite some loopholes, immigrants have reasonable chances to prove they are the victims of prima facie discrimination.
In addition to the traditional legal method, I conducted a qualitative empirical research that demonstrates that Québec’s professional regulatory bodies misunderstand the meaning of public safety, and what it requires in the specific context of each profession. These observations confirm that, in many cases, norms regarding admission to regulated professions and the recognition of qualifications, whether by themselves or considered as a whole, are not justified, and therefore infringe the provisions of the Québec Charter. I conclude this thesis by proposing various measures, some of which are systemic, that professional regulatory bodies and other actors implicated in the admission processes can put in place in order to ensure that foreign-trained professionals’ equality rights are respected.

Identiferoai:union.ndltd.org:umontreal.ca/oai:papyrus.bib.umontreal.ca:1866/28683
Date06 1900
CreatorsDoucet, Frédérick J.
ContributorsHoule, France
Source SetsUniversité de Montréal
Languagefra
Detected LanguageFrench
Typethesis, thèse
Formatapplication/pdf

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