La prison fait l’objet d’un nombre croissant de publications biomédicales depuis les années 1980, en France, comme dans la plupart des pays occidentaux industrialisés, mettant l’accent sur les prévalences élevées de certaines affections chroniques parmi la population carcérale. Comment se fait-il que tant de personnes emprisonnées ont des « problèmes » de « santé » ? Cette thèse entreprend de répondre à cette question en appréhendant la santé non pas comme un état, mais comme une norme. À partir d’une enquête ethnographique associant observations de pratiques judiciaires, monographies des services médicaux d’établissements pénitentiaires, entretiens, statistiques et étude de corpus d’articles scientifiques, elle s’attache à montrer, pas-à-pas, selon une approche processuelle, comment la chaîne pénale produit des « malades » en confrontant les individus saisis par ses dispositifs à des normes de santé et à des savoirs médicaux. À la croisée d’une sociologie des institutions, d’une sociologie de la médecine et d’une sociologie de la connaissance, en étant à la fois attentive à des pratiques bureaucratiques, à la construction de décisions (pénales, gestionnaires et médicales), aux conditions concrètes de réalisation d’études biomédicales en maison d’arrêt et à leurs effets, à des rhétoriques judiciaires et scientifiques, aux activités professionnelles qui constituent le soin en prison et à l’appropriation socialement différenciée de ce travail par les détenus, l’enquête permet de comprendre comment le pouvoir médical se déploie, au présent, de façon discrète et diffuse, dans et par des institutions ne se donnant pas pour première mission de soigner. / In France, as in most Western countries, prison has been the subject of a growing number of biomedical publications since the 1980s that emphasize the high prevalence of certain chronic conditions among the prison population. Why do so many prisoners have “health” “problems”? This dissertation undertakes to answer this question by approaching health not as a state, but as a norm. At the intersection of the sociology of institutions, the sociology of medicine and the sociology of knowledge, it draws on an ethnographic study combining observations of judicial practices, monographs of prison medical services, interviews, statistics and analyses of scholarly articles. Through a processual approach, it shows how the penal system produces “ill persons” by confronting the individuals caught by its devices with health norms and medical knowledge. By attending to the bureaucratic practices, to the construction of (criminal, managerial and medical) decisions, to the concrete conditions under which biomedical studies are conducted in prison as well as their effects, to the judicial and scientific discourses, to care activities and to the appropriation of such care by prisoners according to their social background, the present investigation allows for an understanding of how medical power currently unfolds, in a discreet and diffuse fashion, in and by institutions that do not primarily mean to cure.
Identifer | oai:union.ndltd.org:theses.fr/2018PA100072 |
Date | 05 October 2018 |
Creators | Mahi, Lara |
Contributors | Paris 10, Combessie, Philippe |
Source Sets | Dépôt national des thèses électroniques françaises |
Language | French |
Detected Language | French |
Type | Electronic Thesis or Dissertation, Text |
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