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L'Aufklärung kantienne : une quête d'autonomieVigneault-Bérubé, Alexandre 07 1900 (has links)
Michel Foucault fait remarquer qu’il y a dans la conception des Lumières européennes une tension entre la « croissance de l’autonomie » et la « croissance des capacités » par la science et la technique (Foucault, 1994, p. 83). Or, dans « Qu’est-ce que les Lumières? », Kant privilégie clairement le premier volet, l’autonomie, tel qu’en témoigne sa définition : « sortie de l’homme de l’état de minorité, où il se maintient par sa propre faute ». Force lui est toutefois d’admettre que l’autonomie qui s’exprime dans le « penser par soi-même » nécessite un accès à l’espace public, car la liberté de pensée implique la possibilité de publier ses opinions et de penser avec autrui. Le texte de Kant évoque donc les conditions politiques permettant un libre accès au « public des lecteurs ». Il importe ainsi que le despote éclairé, en l’occurrence Frédéric le Grand, gouverne à tout le moins dans un esprit républicain en maintenant un espace public exempt de censure. Il importe en outre qu’il s’abstienne d’intervenir en matière religieuse. Ce n’est pas un hasard si le thème de la liberté de conscience religieuse occupe une large place dans le texte de Kant, car la tentation est grande pour l’autorité politique de bafouer cette liberté et d’instrumentaliser la religion à des fins politiques. / Michel Foucault pointed out that there is in the design of the European Enlightenment a tension between the "growing autonomy" and "growth capacity" by science and technology (Foucault, 1994, p. 83). Now, in "What is Enlightenment?" Kant clearly favors the first part, autonomy, as evidenced by its definition: "out of man's status as such, where he maintains through his own fault." It is bound to admit, however, that autonomy as expressed in the "think for yourself" requires access to public space, because freedom of thought implies the possibility of publishing one’s opinions and to think with others. Kant's text evokes the political conditions for free access to the "reading public". It is therefore important that the enlightened despot, namely Frederick the Great, ruled at least in a republican spirit by holding a public space free of censorship. It is also important that he should refrain from interfering in religious matters. It is no coincidence that the theme of freedom of religious conscience occupies a large place in Kant's text, because the temptation is great for political authority to violate this freedom and exploit religion for political purposes.
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Marx est-il individualiste?Champagne, Pier-Yves 30 August 2016 (has links)
Des nombreuses lectures possibles de l’œuvre de Marx, celles de Michel Henry et de Serge Cantin ont l'avantage, lorsque mises côte-à-côte, de faire ressortir les différentes tensions qui existent entre le pôle libertaire et communautaire de la pensée de Marx. D'un côté, Michel Henry met l'accent sur l'aspect individualiste de l'ontologie marxienne. Cantin quant à lui montre de quelle manière Marx tend à nier cette individualité au profit d'un processus objectif qui sous-tend cette individualité, à savoir la vie elle-même. L'objectif de ce mémoire est d'exposer ces deux conceptions aux antipodes, puis de les faire dialoguer entre elles afin de voir dans quelle mesure, malgré leur apparente opposition, une réconciliation est possible. Or, il s'avère que malgré les quelques points communs dégagés en conclusion, nous ne soyons pas parvenus outre mesure à opérer de rapprochement significatif entre ces deux lectures. / Of the many possible readings of Marx's work, those of Michel Henry and Serge Cantin have the advantage, when compared side by side, to bring out certain tensions that exist between the communitarian and libertarian dimensions of Marx's thought. On the one hand, Michel Henry emphasizes the individualistic aspect of Marxian ontology. Cantin, on the other hand, shows how Marx tends to deny this individuality in favor of an objective process that underlies this individuality, namely, that of life itself. The purpose of this thesis is to present these two opposing views individually and then to have them interact with each other. The guiding question is whether, despite their apparent opposition, some form of reconciliation is possible. It turns out that, apart from a few common point that are brought to light, these two readings do not lend themselves to any significant rapprochement.
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Autonomie et vulnérabilité : l'apport de l'autonomie relationnelleBaarabe, Sophia 10 1900 (has links)
La définition commune du concept d’autonomie prend son origine dans les travaux d’Emmanuel Kant. Au XXe siècle, une lecture féministe de ce concept dénonce, en la faisant ressortir, une conception atomiste et masculine de l’autonomie, non représentative de la nature vulnérable et sociale de l’être humain. Ce mémoire explore les concepts d’autonomie et de vulnérabilité dans une perspective féministe en cherchant à établir comment il serait possible de concevoir l’agent moral comme étant autonome tout en étant dépendant de son environnement social. Le concept d’autonomie relationnelle proposé par Catriona Mackenzie et Natalie Stoljar constitue une alternative à la conception kantienne qui est plus en accord avec la sociabilité humaine. / The common definition of autonomy takes its origins from the works of Emmanuel Kant. During the twentieth century, a feminist lecture of this nature denounces, while also highlighting an atomistic and masculine conception of autonomy, non-representative of the vulnerable and social nature of the human being. This memoir explores the themes and concepts surrounding autonomy and vulnerability within a feminist perspective, while actively establishing the possibility of the moral agent as a separate and autonomous member, dependent on its social environment. The concept of relational autonomy proposed by Catriona Mackenzie and Natalie Stoljar constitutes an alternative to this Kant notion, which is further adjusted with human sociability.
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Biopolitique, gouvernement et libéralisme chez le dernier FoucaultGauthier, Félix 09 1900 (has links)
Michel Foucault est reconnu principalement pour sa contribution au problème du pouvoir.
Ses recherches en philosophie politique, à l’inverse, ont bénéficié d’une attention mineure. Ce
mémoire vise à rendre compte du caractère spécifique du pouvoir politique moderne à partir de sa
première grande technologie : la biopolitique. Après avoir retracé l’émergence du biopouvoir
présentée dans La volonté de savoir, nous défendrons l’idée selon laquelle le pouvoir sur la vie, en
devenant un enjeu politique de première importance, constitue l’un des fondements du libéralisme
classique. Parce que la biopolitique est inhérente à l’essor du capitalisme, nous la distinguerons
ensuite positivement du pouvoir économique théorisé par Marx dans les Manusrits de 1844 et le
Capital. Notre objectif est de montrer que le libéralisme n’est pas réductible au marché et que la
biopolitique, au contraire, autorise des changements positifs sur l’ensemble d’une population.
Finalement, nous montrerons que le libéralisme apparaît comme une théorie du gouvernement qui
devance, en plus de la lecture économiste de Marx, l’interprétation morale qui lui est
traditionnellement associée. / Michel Foucault is mostly known for his contribution to the problem of power. His research
in political philosophy, on the other hand, has received little attention. This master’s thesis aims to
give an account of the modern political power starting with its first great technological form:
biopolitics. Giving the initial account of biopower presented in La volonté de savoir, I defend the idea
that the power over life, on the rise as a very important political question, must also be seen as a
foundation of classical liberalism. Even if biopolitics is constitutive of the birth of capitalism, we will
show that it nonetheless differs from the economic power as theorised by Marx in the 1844
Manuscripts and Capital. Our goal is to show that liberalism cannot be reduced to economics and that
biopolitics allows for positive transformation. Finally, we will show that liberalism appears as a
theory of government that exceeds, on Marx’s economist reading, the moral interpretation that it is
traditionally associated with.
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Un modèle rawlsien de gestion de la diversité : le cas du port du foulardGosselin-Tapp, Jérôme 11 1900 (has links)
Ce mémoire propose d’étudier la problématique de la gestion de la diversité religieuse au Québec à partir de la question du port du foulard islamique. Le premier objectif du mémoire est de caractériser le contexte socio-historique québécois, en voyant comment cette société se trouve en tension entre le modèle multiculturaliste canadien d’une part, et l’influence de la laïcité stricte à la française. En second lieu, cet ouvrage s’appuie sur les écrits tardifs de John Rawls pour développer un modèle libéral républicain de gestion du pluralisme. Le dernier chapitre vise quant à lui à appliquer ce modèle d’inspiration rawlsienne à la problématique du port du foulard, et ce, afin de montrer en quoi il peut constituer une formule mitoyenne pour le Québec en fournissant une solution autant aux écueils de l’approche libérale individualiste qu’à ceux de l’approche du républicanisme jacobin. / This thesis analyzes the problem of managing religious diversity in Quebec through the debates surrounding the Islamic veil. The thesis' first objective is to characterize Quebec's socio-historical context, mainly by underlining the tension between Canadian multiculturalism and French-style secularism. Afterwards, this work will rely on the late writings of John Rawls in the development of a liberal republican model in regards to managing diversity. The last chapter will involve the application of this model to the problem of the Islamic veil in Quebec, in order to present an hybrid solution that is as liberal as it is republican.
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L’écologie, réponse à la crise de sens? : le défi philosophique de la crise écologique selon la perspective de Hans JonasFyfle, Steve 08 1900 (has links)
La plupart des philosophes s’entendent aujourd’hui pour affirmer qu’il y a une crise de sens en Occident. J.-F. Mattéi l’a démontré sans équivoque dans son ouvrage intitulé La crise de sens (2006). Selon lui, la crise se traduirait par cinq aspects: crise spirituelle, crise religieuse, crise de l’art, crise économique et finalement, crise de la culture. À notre avis, cela est exact, mais incomplet, car Mattéi néglige d’évoquer la crise la plus importante : la crise écologique. L’argument qui nous amène à en postuler la plus haute importance est simple : s’il n’y a plus d’environnement favorable au maintien de la vie humaine, c’est la fin de l’humanité. L’aspect environnemental de la crise ne peut donc pas être occulté de la réflexion concernant son ensemble, car pour nous, elle est l’occasion d’un questionnement philosophique appelé à répondre à cette crise. Dans un livre intitulé Écologie, éthique et création (1994), Dominique Jacquemin nous oriente en ce sens en y posant les trois questions suivantes : 1. Est-il possible de qualifier éthiquement ce à quoi nous convie aujourd’hui la préoccupation écologique? 2. Quel rapport au monde et à l’avenir la préoccupation écologique est-elle à même d’instaurer? 3. Quelles sont les possibilités pour que la démarche écologique devienne un lieu éthique à même d’instaurer un rapport homme-nature dans le présent et l’avenir? Ainsi, le questionnement que soulève la crise écologique amène à réfléchir sur le sens et la finalité de la vie humaine et sur la conception même de l’être humain dans son rapport au monde.
Le propos de ce mémoire est de répondre à ces dernières questions en nous inspirant des principes éthiques mis en avant dans Le Principe Responsabilité (1990) de Hans Jonas, et cela, dans le but d’en faire ressortir sa pertinence face au défi environnemental actuel. En d’autres termes, nous tâcherons de répondre à la question suivante : Pour la société actuelle et son prolongement, quels sont les aspects les plus pertinents de la thèse de Hans Jonas (1903 – 1993) dans son Principe Responsabilité (1990) concernant la résolution de la crise de sens? À cette fin, le mémoire comporte deux chapitres dont le premier, qui forme le cœur du mémoire, comporte trois parties principales liées aux trois questions posées précédemment. Le deuxième et dernier chapitre comporte premièrement une analyse critique du Principe responsabilité et par la suite son appréciation critique.
Méthodologiquement, nous entendons éclairer la nécessité de la responsabilité éthique face à la crise écologique en mettant l’accent sur les thèmes de l’altérité et de la solidarité. C’est de cette manière que nous espérons montrer que la crise écologique actuelle ouvre des avenues possibles à la résolution, au moins partielle, de la crise de sens à laquelle nous sommes actuellement confrontés. / Most philosophers agree today that there is a crisis of meaning in the Western world. J.-F. Mattei, for example, in La crise de sens (2006), unequivocally demonstrates this. According to him, this crisis has five dimensions: spiritual, religious, artistic, economic, and finally, cultural. This is true in my view, although incomplete, because Mattéi does not address the most important crisis: the ecological crisis. The argument that leads me to postulate the utmost importance of this ecological crisis is simple: if the environment is no longer able to sustain human life, humans cease to exist. The environmental aspect of the crisis can thus not be subtracted from a reflection on the overall crisis since, in my view, it offers an opportunity for a philosophical questioning to address this crisis. In the book entitled Écologie, éthique et création (1994), Dominique Jacquemin orients us in this direction by raising the following three questions : 1. Is it possible to frame our ecological concerns in ethical terms? 2. How can ecological concerns affect our relationship with the world and with the future? 3. How can the present ecological reflection establish an ethically viable link between man and nature, both now and in the future? The questions raised by the environmental crisis thus lead us to think about the meaning and the finality of human life and also about the concept of human beings in their relationship to the world.
The purpose of this memoir is to address these questions by finding inspiration in the ethical principles outlined in The Imperative of Responsibility (1979, English 1984) by Hans Jonas (1903 – 1993), in order to bring out their relevance for the current environmental challenge. In other words, I will answer the following question: In today's society and for the future, what are the most important aspects in Hans Jonas' book on “The Imperative of Responsibility” with regards to the resolution of the crisis of meaning? To accomplish this, the memoir is divided in two chapters. The first is the body of the memoir which contains three main parts related to the three questions raised above. The second and final chapter contains an initial critical analysis of The Imperative of Responsibility followed by an appreciation by Hans Jonas.
Methodologically, I intend to shed light on the need for ethical responsibility in face of the ecological crisis by focusing on the themes of otherness and solidarity. In this way, I hope to show that the ecological crisis opens up possible avenues for the resolution, at least in part, of the crisis in meaning we are now facing.
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A critique of Nancy Fraser's theory of social justice : self-determination and the Mohawks of Kahnawá:keColish, Will 08 1900 (has links)
La présente étude se concentre sur le travail de Nancy Fraser sur la justice sociale, lequel a suscité beaucoup d’intérêt dans la littérature au cours des dernières années. La reconnaissance et la redistribution sont les deux piliers originaux de son approche: les désavantages dont souffrent les gens dus au dénigrement culturel ou à la privation économique. Ces deux concepts servent à diagnostiquer et fournir le soutien moral aux multiples luttes que les victimes d’injustice entreprennent avec l’objectif d’établir une participation plus égalitaire à la société. Cependant, que peut-elle dire cette approche des groupes qui sont marginalisés et cherchent l’autogouvernance (ou la séparation même) plutôt que l’intégration dans la société? Le travail de Fraser manifeste une résistance envers les droits du groupe, et un silence quant à l’autodétermination. Mon intervention prend comme objectif d’inclure ces formes d’injustice dans son approche, la rendant plus sensible aux dynamiques des groupes et capable de répondre à leurs revendications trop souvent négligées sous prétexte de l’égalité. La question est, l’égalité de qui? / The focus of this study is Nancy Fraser’s work on social justice, which has gained prominence in the literature over the past few years. The two original pillars of her approach are redistribution and recognition – the injustices that individuals face as a result of economic hardship or cultural denigration. These two concepts serve to diagnose and provide moral backing to the multiple struggles that individuals undertake with the aim of a more equitable way of participating in society. But what does this approach have to say about marginalized groups who seek greater autonomy, or perhaps even separation, rather than further participation in society? Fraser’s work has manifested resistance to sanctioning group difference, and silence on the issue of self-determination. I aim to build these claims into her approach, ultimately to render it more sensible to group dynamics and more capable to respond to their demands all too often neglected under the pretext of equality. The question is, equality of whom?
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Does just war theory need to get with the times?Shiller, Aviva 07 1900 (has links)
La théorie de la guerre juste a fournit les principes qui forment la base de nos intuitions
concernant l’éthique de la guerre pendant plus de milles ans. Cependant, la nature de la
guerre a changé drastiquement dans les derniers 50 ans. Avec les avancés
technologiques, tous les aspects de la guerre, du champ de bataille aux armes utilisées,
sont aujourd’hui très différents. Ce qui est proposé dans ce texte est que les principes de
jus in bello sont malgré tout encore adéquats pour les guerres contemporaines.
Spécifiquement, en utilisant une analyse historique, ce texte argumentera contre la
condition de l’urgence suprême de Michael Walzer pour proposer une approche qui
laisse les principes de bases du jus in bello intactes. Ce texte suggère que les théoriciens
de la guerre juste se penchent sur la question des armes prohibées pour avoir un impacte
positif dans le domaine de l’éthique de la guerre. / Just war theory has been provided the basis for thinking about the morality of war for
the past thousand years of Western history. However, the nature of warfare has
dramatically altered in the last 50 years alone. With the advent of new technologies all
aspects of warfare from the nature of the battlefield to the types of weapons used have
changed. What this paper will argue, through a historical analysis of these technological
changes, is that the principles guiding actions taken in war, the principles of jus in bello,
are well equipped to deal with these changes. More specifically, this paper will argue
against Michael Walzer’s famous supreme emergency condition and suggests instead
that just war theorists should instead be concerned with weapons prohibitions, not in
undermining the established principles of jus in bello, in order to have a favourable
impact on contemporary warfare.
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G. W. F. Hegel et T. W. Adorno sur le besoin de la penséeLanglois, Philippe 08 1900 (has links)
Une traduction française des "Thèses sur le besoin" de Theodor W. Adorno accompagne la thèse (annexe). / La présente thèse analyse et contraste les positions de G.W.F. Hegel et de T. W. Adorno sur la nature de la pensée rationnelle et le sens de la pratique philosophique. Notre démarche consiste en une interprétation critique d’une idée que partagent Hegel et Adorno mais qu’ils développent différemment, selon laquelle la pensée rationnelle obéit à un certain besoin (Bedürfnis) qui lui est à la fois spécifique et universel.
Hegel a parlé d’un « besoin de la philosophie ». L’expression est ambiguë : elle vise à décrire la nature générale de la pensée rationnelle mais aussi à exprimer la pertinence historique de la raison, c’est-à-dire sa capacité à assouvir des besoins concrets. Je démontre dans les cinq premiers chapitres que Hegel tente de réconcilier ces deux besoins en soutenant que l’identification par le concept est précisément ce qui permet d’appaiser la souffrance concrète que génère la division de l’histoire avec elle-même. La solution est en effet trouvée dans l’idée du savoir absolu, une posture de la pensée rationnelle tout aussi fondée dans la nature de la pensée elle-même que dans les aspirations de son autre, c’est-à-dire de l’histoire. Le savoir absolu est le point où chez Hegel coïncident la nature de la raison en général et la nécessité d’exprimer les besoins universels de l’histoire.
Les chapitres six à neuf situent ensuite le déplacement épistémologique que propose la dialectique négative d’Adorno par rapport à cette conclusion de Hegel. Nous prenons soin de montrer qu’Adorno ne la juge pas fausse mais unilatérale. Il conçoit qu’exprimer et assouvir les souffrances historiques revient au concept mais il soutient en même temps que celui-ci échoue à cette tâche tant qu’on ne nuance pas la portée et la signification de sa « compulsion à identifier ». Nous démontrons que si cette dernière est d’après Adorno à la fois inévitable et fautive, c’est parce que le besoin qui motive la pensée rationnelle n’est pas d’abord la nécessité de concevoir l’unité dans la division mais celui de réaliser les conditions de la survie et du bonheur de l’organisme vivant qui soutient la pensée. Or pour Adorno, la société capitaliste bloque les pratiques émancipatrices qui s’attachent à combler ce besoin matériel parce qu’elle absolutise le principe d’identité. Nous soutenons que, dans ce contexte, l’approche adornienne de la philosophie comme relevant de l’essai (Essay) et développant des concepts discontinus orientés vers le non-identique n’est pas moins, mais plus rationnelle que la posture hégélienne qui considère la philosophie comme une science absolue. / This thesis analyzes and contrasts G. W. F. Hegel’s and T. W. Adorno’s positions on the nature of rationality and the task of philosophy. Its central aim is to offer a critical interpretation of a thought shared but interpreted differently by both thinkers, namely, that philosophy proceeds from a certain need (Bedürfnis) that is both specific and universal.
Hegel spoke of a « need of philosophy ». The expression is ambiguous: it is meant to describe the general nature of rational thinking, but also to express how reason or philosophy can justify their historical relevance and satisfy concrete needs. I argue in chapters one to five that Hegel tries to reconcile these two needs, in order to show why identifying with concepts is the key to appeasing the concrete suffering caused by history’s own division within itself. The answer is given in absolute knowledge, grounded and justified in respect of thought itself as well as thought’s other, i.e., history. Absolute knowledge is point of equilibrium between reason in general and reason as the adequate expression of history’s universal needs.
Chapters six to nine then interpret Adorno’s negative dialectics as a critical reworking of this dialectical problem of framing normativity in historical terms. Adorno agrees with Hegel that the most relevant and satisfying expression of historical suffering is conceptual, yet he also contends that the « compulsion to identity » as such fails to satisfy the need that motivates philosophical thinking. I argue that this is because striving for survival and happiness is not reducible to thought’s obsession with identity. For Adorno, happiness and “right life” are blocked in contemporary society because capitalism hypostasizes the identity principle inherent in conceptual thinking. In this context, I argue that Adorno’s view of philosophy as essay (Essay) is more, not less, rational than Hegel’s understanding of philosophy as an absolute science.
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Une philosophie de l’expérience : Pierre Hadot et les chapitres intérieurs du ZhuangziDrouin-Trempe, Victor 09 1900 (has links)
Pierre Hadot, dans Qu’est-ce que la philosophie antique? et dans Exercices
spirituels et philosophie antique, propose une relecture des textes fondateurs de la
philosophie occidentale afin de démontrer qu’originellement, les philosophes de
l’Antiquité avaient pour but non seulement d’élaborer une systématisation rationnelle
du monde, mais également de modifier concrètement, grâce à certains exercices, leur manière de vivre. Aujourd’hui, cette conception de la philosophie n’est plus
privilégiée : l’aspect intellectuel à pris le dessus sur l’aspect expérientiel, ce qui incite à considérer la philosophie avant tout comme un discours rationnel et objectif.
Pour cette raison, la pensée métaphorique, imagée et poétique de Zhuangzi, ne peut pour certains être considérée comme véritablement philosophique puisqu’elle ne cherche pas à élaborer une conception systématique de la réalité. Elle propose plutôt des moyens de s’ouvrir à l’expérience, grâce à certaines pratiques concrètes, afin de devenir plus sage. Ce mémoire cherchera à réhabiliter l’aspect expérientiel de la philosophie privilégié notamment par les penseurs grecs de l’antiquité, afin de démontrer la valeur proprement philosophique de l’oeuvre de Zhuangzi. / Pierre Hadot, in Qu’est-ce que la philosophie antique? and Exercices spirituels et philosophie antique, suggests a new interpretation of texts from ancient philosophers which show that originally, the goal of those philosophers was not only to elaborate a rational systematization of the world, but also to change concretely their way of life. Today, this conception of philosophy is no longer promoted: the intellectual aspect has overcome the experiential aspect, which results in the general conception that philosophy is mainly a rational and objective discourse.
Thus, for some, the metaphorical and poetical writings of Zhuangzi cannot be considered truly philosophical because they do not search for a systematic conception of reality. They rather suggest approaches for new experiences of reality, made possible by certain exercises, and show how to gain more wisdom. This work will try to rehabilitate the experiential aspect of philosophy, in order to show the philosophical value of the Zhuangzi.
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