Spelling suggestions: "subject:"actes"" "subject:"mctes""
91 |
Le recours aux appellatifs en situation dialogiqueRobert, Julie 11 April 2018 (has links)
Les appellatifs sont des termes dont les individus disposent pour s'interpeller les uns les autres lorsqu'ils veulent communiquer. On considère habituellement que les appellatifs servent, dans la communication, à remplir deux fonctions, celle d'interpeller et celle de sélectionner son interlocuteur. Ces fonctions suggèrent qu'à partir du moment où deux interlocuteurs sont en interaction et sont assurés de l'attention de l'autre, les appellatifs ne seraient plus nécessaires. Or, la réalité est tout autre et dans les conversations que nous tenons quotidiennement, nous avons fréquemment recours à l'appellatif pour des raisons autres que celles qui ont été relevées dans la littérature sur le sujet. Le présent mémoire porte sur le rôle des appellatifs atypiques, c'est-à-dire ceux qui ne répondent pas aux fonctions qui leur sont généralement attribuées, à partir de l'environnement dans lequel ils apparaissent. Il ressort qu'ils entretiennent un rapport privilégié avec les actes directifs, les échanges conflictuels et les relations asymétriques.
|
92 |
Des poursuites nationales pour crimes contre l'humanité sur la base de leur incrimination de droit international coutumier : rupture du contrat social, nécessité des poursuites et irrecevabilité du principe de légalité : le cas d'HaïtiThériault, Chantal 27 January 2024 (has links)
Les crimes contre l’humanité sont la plupart du temps commis par des agents de l’État, en faisant de véritables crimes d’État. Les poursuites des auteurs présumés de ces crimes internationaux se sont dans les premiers temps imposées de par leur nécessité, même en l’absence de base légale pour les appuyer, par exemple celles des grands criminels de guerre en 1945 à Nuremberg. Lors du procès, la Défense avait tenté d’invalider les poursuites en plaidant que l’article 6 (c) du Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg, qui énonçait pour la toute première fois les crimes contre l’humanité, créait un crime de façon rétroactive, ce que le principe de légalité des délits et des peines interdit. Cet argument a été rejeté en 1945 et continue de l’être jusqu’à présent par des tribunaux qui appliquent directement l’incrimination de droit international coutumier, aujourd’hui bien étoffée. C’est ce que la Cour d’appel de Port-au-Prince a fait le 24 février 2014, en l’absence d’une législation pénale en la matière. La gravité de ces crimes internationaux confère à leur incrimination valeur de jus cogens et impose aux États l’obligation erga omnes de les poursuivre. Ainsi, les tribunaux nationaux doivent être encouragés à appliquer directement l’incrimination de droit international coutumier en l’absence d’une incrimination nationale. De plus, appréhendant les crimes contre l’humanité sous l’angle de leur signification philosophique et sociale, soit des crimes d’État entraînant la rupture du contrat social, la présente étude postule que le principe de légalité, un principe de justice, est irrecevable dans ce contexte afin de soulever l’objection relative à la rétroactivité de la norme. En effet, admettre cette objection à la compétence matérielle du tribunal national reviendrait à vider le principe de légalité de son sens, voire à le pervertir. / Crimes against humanity are typically committed by State agents, rendering them State crimes. A violent breach of the social contract results. Because these crimes constitute an affront to the universal conscience, their criminalization and prosecution have been considered necessary throughout the years, with or without a written legal foundation. For example, the prosecutions of major war criminals in Nuremberg in 1945 were conducted without a written legal basis for the offence of crimes against humanity. The defense therefore argued that section 6(c) of the Charter of the international military tribunal, which stipulated the offence of crimes against humanity, was new law that breached their clients’ right to legal certainty and to be protected against retroactivity in criminal law, according to the principle of legality’s requirements. This argument, prima facie well founded in law, was dismissed by the tribunal. Rejected at Nuremberg, the same argument was dismissed as well in Israel in 1961 in Eichmann’s case, in Canada in 2009 in Munyaneza’s case and in Haïti in 2014 in Duvalier’s case. Every State has a duty to prosecute crimes against humanity, owing to the fact that they are jus cogens crimes and trigger erga omnes obligations. Hence, States lacking statutory prohibitions of crimes against humanity nevertheless possess this same duty. This paper suggests that domestic tribunals deprived of national legislation in that field may and are encouraged to rely on the customary international law prohibition which has been fully developed from 1945 to present. Moreover, examining crimes against humanity from a political and a philosophical perspective, this paper argues that, in applying customary international law, a national tribunal should dismiss any defense objection relying on the principle of legality to invalidate the prosecution. Indeed, to accept this objection in such a context would pervert and render the principle meaningless.
|
93 |
L'expression de l'interdiction en russe moderne / Prohibitive Commands in Modern RussianVialaron, Laurence 28 September 2018 (has links)
Cette thèse, consacrée à l’expression de l’interdiction en russe moderne, étudie les différents types d’énoncés prohibitifs. L’acte de langage d’interdiction correspond à un énoncé performatif et contraignant incitant au non-accomplissement d’une action perçue comme indésirable par le locuteur. Cet énoncé crée, pour l’allocutaire, une obligation qui jusque-là n’existait pas. L’expression de l’interdiction se fait à différents niveaux de communication et par des moyens linguistiques de natures diverses : pragmatique, syntaxique ou lexicale. Outre les énoncés performatifs, l’interdiction peut être exprimée par des énoncés comportant une valeur illocutoire d’interdiction, y compris par des actes de langage indirects.Si les types d’énoncés prohibitifs sont nombreux, ils ne sont pas interchangeables. D’une part, ils ne peuvent être employés indifféremment dans n’importe quel contexte et ils relèvent de niveaux de langues différents. D’autre part, les disparités existant dans la force illocutoire des différents énoncés prohibitifs ont été mises en évidence. La force illocutoire d’un énoncé prohibitif résulte du choix du type d’énoncé retenu, mais aussi des moyens linguistiques qui peuvent être employés pour le moduler.Cette étude a permis d’établir une typologie des énoncés prohibitifs. Ces énoncés peuvent se répartir en trois catégories : les énoncés qui signifient l’interdiction par exception, les énoncés habituellement prohibitifs et les énoncés invariablement prohibitifs.S’y ajoute la question de l’évolution de la langue, notamment par un effet de contamination des langues européennes. Cette évolution se traduit par le recours moins fréquent aux tournures les plus catégoriques, ainsi que par l’introduction de formules de politesse de plus en plus fréquentes. / This thesis is dedicated to prohibitive commands in modern Russian and studies the various speech strategies expressing negative commands. Prohibitive speech acts correspond to compulsory and performative utterances urging the non-accomplishment of an action perceived as undesirable by the speaker. Due to this utterance, the addressee has no other option than compliance, which was not the case before.Prohibitive commands are expressed at various communication levels and by a wide range of linguistic means: pragmatic, syntactic or lexical.Besides performative utterances, prohibition can be expressed by utterances with a prohibitive illocutionary force, including indirect speech acts. Although negative commands can be expressed by various strategies, they are not interchangeable. On the one hand, any negative command cannot be used in all contexts and in addition, the registers are different.On the other hand, the disparities in the illocutionary force of command of the various prohibitive strategies could be established. The illocutionary force of a prohibitive command both results from the selected linguistic strategy, but also from the means of modulation that can be used.This study enabled us to establish a typology of negative commands. The latter can be displayed in three categories: utterances whose prohibitive meaning occurs exceptionally, usually prohibitive utterances and invariably prohibitive utterances. Furthermore, the evolution of the Russian language has to be taken into account, among others by a contamination effect from European languages. This evolution leads to a less frequent resort to the strongest prohibitive commands, as well as to the increasing use of politeness strategies.
|
94 |
Les actes intrinsèquement mauvais : analyse critique à partir de la contraception artificielle / Intrinsically evil acts : critical analysis from artificial contraceptionKabutuka Mahoko, Didier 13 September 2016 (has links)
Dans ses documents officiels, le Magistère de l’Église catholique qualifie souvent la contraception artificielle intraconjugale d’acte intrinsèquement mauvais. Le recours à cette notion semble considérer la nature biologique comme l’index impératif d’une norme morale sans autre considération. De quoi dépend alors la moralité d’un acte ? Une technique, prise en elle-même, comporte-t-elle une valeur morale définie ? Pour répondre à ces questions, nous avons retracé l’évolution de cette notion à travers une relecture de ses enjeux théologiques en les fondant sur la circulation de plusieurs pôles de réflexion (Écriture, Tradition, raison, sciences, vécu). Pour dissiper les ambiguïtés liées à cette notion, nous avons estimé qu’il serait préférable d’employer l’expression d’acte injustifiable plutôt que celle d’acte intrinsèquement mauvais. La notion d’acte injustifiable a l’avantage de faire droit à l’herméneutique et à l’exercice de la raison pratique dans le discernement éthique. Ainsi, on peut faire droit à la pluralité et articuler au mieux la temporalité et la complexité systémique dans le jugement moral des actes humains / In its official documents, the Magisterium of the Catholic Church often refers to intra-marital artificial contraception as an intrinsically evil act. The use of this concept seems to consider the biological nature as an imperative index of a moral standard without other considerations. If artificial contraception is wrong in itself, then what place do we give to conscience and freedom of couples in birth control? Is there an irreducible opposition between the natural law and contraceptive techniques? Does a technique, if taken by itself, hold a defined moral value? To answer these questions, we have traced back the evolution of this concept through a rereading of its anthropological-theological issues based on the circulation of several poles of thought (Scripture, Tradition and Reason, Humanities, Experience, etc.). To dispel any equivocities and ambiguities related to this concept, we believe it is better to use the term unjustifiable act rather than that of an intrinsically evil act. The concept of unjustifiable act has the advantage of granting hermeneutics and the use of practical reason in ethical discernment. In this way, we can honor otherness (recognition of particularities and subjectivities, while searching for the universal), grant the plurality of actions, norms and systems of legitimation of standards and allow regulation to better enable the regulation of historicity, temporality and systemic complexity in moral judgment of human actions.
|
95 |
Les femmes disciples dans l'évangile de Luc : critique de la rédactionPaquette, Sylvie January 2008 (has links)
Thèse diffusée initialement dans le cadre d'un projet pilote des Presses de l'Université de Montréal/Centre d'édition numérique UdeM (1997-2008) avec l'autorisation de l'auteur.
|
96 |
La référence du pronom "je" : l'identité personnelle en questionCorbett, Isabelle January 2008 (has links)
Mémoire numérisé par la Division de la gestion de documents et des archives de l'Université de Montréal.
|
97 |
Le langage est un lieu de lutte : la performativité du langage ordinaire dans la construction du genre et les luttes féministes / Language is a place of struggle : performativity of ordinary language in the construction of gender and feminist strugglesGérardin-Laverge, Mona 14 December 2018 (has links)
Comment penser la construction et la déconstruction du genre dans le langage ? Je montre que la philosophie du langage ordinaire — et notamment la théorie austinienne des actes de parole — peut soutenir une approche constructiviste et éclairer le rôle du langage dans la construction sociale du genre. La naturalisation du genre repose à la fois sur une représentation du langage — comme simple reflet du réel et comme « capacité » inégalement partagée — et sur des pratiques linguistiques ordinaires et scientifiques. Penser cela implique de dépasser la stricte dichotomie de l’idéologique et du matériel, pour analyser ensemble la construction et la représentation du genre dans des pratiques discursives et non-discursives. La théorie butlerienne de la « performativité du genre » permet de penser à la fois la construction du genre et sa contingence, sa possible déconstruction. Mais quel est notre pouvoir transformateur ? Si montrer qu’un phénomène n’est pas naturel ne suffit pas à le détruire, analyser sa force ne nous réduit-il pas à l’impuissance ? Pour répondre à ces questions, j’étudie des pratiques discursives de lutte. Je montre le pouvoir transformateur de pratiques de subversions et d’actes de parole insurrectionnels, qui font usage de la performativité du langage pour transformer les conditions sociales encadrant l’efficacité des discours. Je montre que ces pratiques déconstruisent le genre et produisent des collectifs de lutte, pour insister sur ce qu’une approche radicalement constructiviste du genre ouvre comme possibles pour le féminisme et l’action collective. / How is gender constructed and deconstructed in ordinary practices of language? First of all, I demonstrate that ordinary language philosophy – and more specifically the austinian theory of speech acts – can lay the ground for a constructivist approach and help to understand the role of language in the social construction of gender. I show that gender is naturalized both by our representation of language itself – as a mere reflect of reality and as an unequally shared “capacity” – and by ordinary and scientific practices of language. Understanding this idea involves going beyond the dichotomy of ideological and material, in order to analyze construction and representation of gender together in both discursive and non-discursive practices. Butler’s theory of gender performativity makes it possible to understand both construction and deconstruction, or the contingency of gender. But does not highlighting the strength of this construction lead to deny our power and agency? To answer this question, I study feminist discursive practices. I highlight transformative power of subversions and insurrectional speech acts. I analyze discursive practices of denaturalization that challenge both social and discursive orders, and practices that use language performativity to change the social conditions that give power to speech acts. These practices deconstruct gender and produce political and collective subjects: a radical constructivist approach to gender thus opens rich perspectives for feminism and collective activism.
|
98 |
Formalisation des contraintes pragmatiques pour la génération des énoncés en dialogue homme-machine multi-locuteursPopescu, Vladimir 28 November 2008 (has links) (PDF)
Nous avons développé un cadre pour contrôler la génération des énoncés en dialogue homme-machine multi-locuteurs. Ce processus se déroule en quatre étapes : (i) la structure rhétorique du dialogue est calculée, en utilisant une émulation de la SDRT (<< Segmented Discourse Representation Theory >>) ; (ii) cette structure est utilisée pour calculer les engagements des locuteurs ; ces engagements sont utilisés pour piloter le réglage de la force illocutoire des énoncés ; (iii) les engagements sont filtrés et placés dans une pile pour chaque locuteur ; ces piles sont utilisées pour effectuer des ellipses sémantiques ; (iv) la structure rhétorique pilote le choix des connecteurs concessifs (mais, quand même, pourtant et bien que) entre les énoncés ; pour ce faire, les énoncés sont ordonnés du point de vue argumentatif.
|
99 |
Les pouvoirs du langage : la contribution de J.L. Austin à une théorie contextualiste des actes de parole.Ambroise, Bruno 25 March 2005 (has links) (PDF)
J.L. Austin est le promoteur, non pas seulement d'une théorie novatrice, mais aussi, en premier lieu, d'une méthode bien particulière en philosophie : la " phénoménologie linguistique ", qui entreprend de scruter " ce que nous dirions quand ", pour déterminer la manière dont le langage ordinaire, dans toutes ses nuances, est un véritable " révélateur " de la réalité, dans ses moindres détails. Cela est dû au fait qu'ayant passé l'épreuve de l'histoire, il est le plus à même de nous révéler les distinctions importantes, c'est-à-dire celles qui importent dans notre vie humaine. La philosophie d'Austin n'a donc pas tant le langage comme objet que comme méthode.<br /> Or, révélateur de la réalité, le langage est aussi révélateur de l'action, d'une façon beaucoup plus fine que les concepts ordinairement utilisés en philosophie. Il nous donne un concept de l'action, qui nous permet de comprendre que l'identification d'une action est un processus complexe, puisque l'action peut être appréhendée de différentes façons, selon les objectifs visés dans la description. Chaque type de description permet en effet de déterminer une action différente, qui n'est pas réductible à une autre et joue un rôle spécifique, et qui a donc une réalité propre, même si elle n'est pas explicable en termes physicalistes. C'est pourquoi on comprend que l'identification d'une action est toujours relative à une certaine façon d'appréhender le réel, orientée par des valeurs. Mais cette intervention des valeurs dans la description ne remet pas en cause l'objectivité de la description effectuée – elle la rend au contraire possible. Ce que la philosophie du langage d'Austin révèle ainsi en premier lieu, c'est qu'une description objective n'est pas une description qui s'interdit des considérations évaluatives, mais plutôt celle qui utilise les bonnes évaluations. Austin entend ainsi remettre en cause le fétiche de la distinction entre faits et valeurs, comme il remettra plus tard en cause le fétiche de la distinction entre vrai et faux.<br /> Si la description d'une action prend nécessairement en compte des aspects évaluatifs, alors celle-ci n'est saisie qu'en fonction de la pratique qui comporte ces aspects et qui oriente l'action effectuée en lui donnant un objet et une motivation. L'action fait donc toujours partie d'un plan d'action plus global, qui lui donne un sens en l'orientant, et c'est pourquoi elle ne peut pas être saisie indépendamment de son contexte de réalisation. Cela annonce l'idée qu'il en ira de même pour les actes de parole : on ne pourra pas les isoler de leur contexte de réalisation pour étudier abstraitement leurs caractéristiques, mais il faudra toujours identifier les pratiques (non nécessairement discursives) à laquelle ils contribuent plus largement pour comprendre leurs spécificités.<br /><br /> Traditionnellement, on considère que le langage est soit vrai, soit faux, et qu'il peut donc s'évaluer en fonction de conditions de vérité. Si je dis ainsi " Le chat est sur le tapis ", on considère que la signification de la phrase permet de déterminer la situation dans laquelle l'énonciation de la phrase serait vraie ; ici, on pourrait dire que cette phrase serait vraie dans une situation où un chat serait sur un tapis. Toute phrase, en fonction de la signification qu'elle porte, peut donc être évaluée, en situation, en fonction de sa vérité ou de sa fausseté. Mais dès lors que l'on montre que le langage peut échouer pour d'autres raisons que son évaluation en termes de vérité ou de fausseté, on est obligé de poser qu'il a d'autres conditions de réalisation, propres aux actions – des conditions qui ne sont plus des conditions de vérité. Tout le propos d'Austin dans How to do Things with Words est de relever ces conditions de manière la plus exhaustive possible. C'est ainsi qu'il accomplit une véritable révolution en philosophie du langage.<br />La tradition philosophique veut, en effet, que le propre du langage soit de décrire le monde en s'effaçant devant lui et que ce soit sa seule raison d'être. Un énoncé quelconque ne vaudrait ainsi qu'à dire le monde, que cet énoncé soit " Le chat est sur le tapis " ou " Je t' ordonne de te laver les mains ". Ces deux énoncés n'auraient d'usage qu'à avoir une signification identifiable en termes de conditions de vérité (selon le procédé vu précédemment) qui détermineraient la situation du monde dans laquelle ils seraient correctement utilisables. Dès lors, soit le langage dit ce qui est, il représente le monde, et il est vrai ; soit il ne dit pas ce qui est, et il est faux. Un langage sensé est donc soit vrai, soit faux, et tout énoncé qui n'est ni vrai, ni faux n'a pas vraiment de sens (c'est ainsi qu'on range généralement les énoncés de type éthique ou esthétique). Or Austin montre que des énoncés qui ne sont ni vrais, ni faux, sont tout à fait sensés et pertinents. Prenons en effet le maire qui dit devant un couple : " Je vous déclare unis par les liens du mariage ". Cet énoncé n'est pas vrai, car le maire ne décrit pas une réalité (les liens du mariage, qui n'existent pas au moment où l'énoncé est prononcé) ; mais il n'est pas faux non plus, car, dans la bonne situation, cet énoncé sera totalement accepté et aura même une efficacité. Il faut donc poser des énoncés qui ne fonctionnent pas selon une logique représentationnelle et véri-conditionnelle, qui ne cherchent pas à dire ce qui est, mais qui ont une autre fonction.<br /> Parmi ces énoncés tout à faits sensés qui ne disent ni le vrai, ni le faux, il existe une classe d'énoncés qui font véritablement quelque chose – une preuve en étant qu'ils modifient la description que l'on va donner de la réalité. Ces énoncés sont appelés par Austin des énoncés performatifs : ils semblent indiquer ce qu'ils font, mais on ne peut expliquer leur action ni en fonction de ce qu'ils disent, ni par leur caractère auto-référentiel. Ainsi, après que j'ai dit " Je te promets de faire la vaisselle ", je suis véritablement engagé à faire la vaisselle, un nouvel engagement est pris, qui n'était pas présent avant cette énonciation. Or cet engagement ne peut pas être pris par une simple description de la réalité : une description n'engage pas comme le fait une promesse. Dès lors, ce n'est pas parce que ce que je dis a pour signification que je promets de faire la vaisselle, évaluable en termes de vérité ou de fausseté, que je promets de faire la vaisselle. Il faut faire intervenir autre chose pour expliquer la réalisation d'un acte qu'une composante purement sémantique.<br /> Si l'action des énoncés ne peut pas s'expliquer par leurs significations, c'est parce qu'elle résulte de l'établissement de certaines conventions, qui vont définir, de manière arbitraire, certaines procédures linguistiques comme réalisations d'actes aux conséquences déterminées et obligatoires. L'action vient ainsi de la reconnaissance sociale qui est accordée, par convention, à certaines paroles. C'est le caractère conventionnel de l'acte de parole qui explique son caractère normatif, puisque les hommes appartenant à une même communauté linguistique ne peuvent faire autrement que de reconnaître la réalisation d'un acte d'un certain type lors de la profération de certaines paroles.<br /> Ces conventions qui définissent les performatifs sont par ailleurs multiples et ne concernent pas qu'un aspect de la réalité linguistique (l'aspect sémantique). La plupart ne sont d'ailleurs pas linguistiques. Elles impliquent ainsi de prendre en compte des paramètres variés (lieu, moment, personnes, habillement, gestes, statut social, passé, etc.), dont la présence ou l'absence déterminent autant de types de ratages possibles des énoncés. Les performatifs peuvent dès lors réussir en fonction de différents paramètres, qui forment autant de conditions de félicité, et non plus de vérité. On voit donc que le langage ne se met plus en place en fonction seulement de ce qu'il dit, mais aussi en fonction de la situation dans laquelle il est dit. Se met ainsi en place une forte dépendance contextuelle de l'usage du langage.<br /> On remarquera qu'il existe deux types d'énoncés performatifs : des performatifs explicites, dont l'action semble explicitée dans le contenu de l'énoncé, et les performatifs implicites qui n'indiquent pas ce qu'ils font. Mais le fait que certains indiquent ce qu'ils font ne leur donne aucune priorité (en fait, selon Austin, ils suivent des seconds) et leur efficacité ne s'explique pas plus par cette caractéristique. Les performatifs explicites sont simplement plus codifiés que les performatifs implicites et résultent d'un travail historique de clarification et n'ont pas de spécificité autre.<br />Puisque certains performatifs sont explicites, on pourrait, en effet, rechercher des critères linguistiques qui permettent de les identifier, et encore rechercher une explication de type sémantique à leur efficacité (l'efficacité de " Je te promets de " s'expliquerait ainsi par le fait qu'il dit que je promets de faire quelque chose). Mais on ne trouvera en fait aucun critère linguistique qui identifie un performatif, car on va comprendre que des énoncés peuvent réaliser la même chose que des performatifs explicites sans dire en rien ce qu'ils font. C'est donc que les critères de ces énoncés sont pragmatiques, et, en réalité, s'appliquent aussi aux énoncés non performatifs. Mais c'est dire que tout énoncé est relatif, pour son efficacité, au contexte ; dès lors, on peut poser que tout énoncé comporte un aspect performatif : tout énoncé peut alors être requalifié comme acte de parole.<br /> Car il convient, en fait, de distinguer trois niveaux actifs dans tout énoncé. Le premier niveau, celui de ce qui est dit (aspect locutionnaire), comporte lui-même trois aspects. Les deux premiers aspects, celui de la profération de sons et de la formulation d'énoncés grammaticalement corrects n'introduisent pas encore à la parole humaine (un perroquet peut les réaliser). Le troisième niveau de l'acte locutionnaire est celui où l'on dit véritablement quelque chose par l'usage des mots. Tout le problème est de savoir si le contenu porté par l'énoncé à ce niveau de réalisation est purement sémantique et indépendant des conditions pragmatiques de réalisation. Austin montrera qu'il n'est purement sémantique qu'abstraction faite de son aspect d'acte de parole. Ainsi, il est exact que l'énoncé " Je te promets de faire la vaisselle ce soir " est un acte locutionnaire au sens où il dit que je promets de faire la vaisselle ce soir. Mais, en réalité (concrètement), il ne peut le dire que parce qu'il est un acte de parole consistant à promettre, c'est-à-dire uniquement parce qu'il comporte un autre aspect. En effet, l'aspect locutionnaire de l'acte, celui où il porte une signification, n'est qu'une façon de décrire l'activité réalisée par l'acte – celle qui consiste à dire des choses douées de sens. Mais cet acte ne forme pas un énoncé complet, car il ne peut pas advenir indépendamment de l'aspect illocutionnaire, tributaire d'un autre mode de description. (Pour le dire autrement, un acte de parole est toujours complet.)<br /> Le deuxième niveau de l'acte de parole, l'aspect illocutionnaire, correspond à l'aspect performatif – celui où l'on fait en disant. Cet acte est accompli quand l'auditoire reconnaît qu'il est accompli, mais il ne se réduit pas pour autant à un simple effet sur l'auditoire, car il possède une forte objectivité qui oblige à sa reconnaissance. Le caractère promissif de l'énoncé " Je te promets de faire la vaisselle ce soir " dérive ainsi du fait que mon interlocuteur le prend nécessairement, dans cette situation, comme un acte de promesse, et non pas du simple fait qu'il comprend ce que cet énoncé veut dire. L'objectivité, dans ce cas, est forte, car elle est conférée à l'acte de parole par les conventions qui définissent ce deuxième niveau. L'action réalisée n'est pas une action naturelle, mais une action conventionnelle, en ce sens qu'elle est définie arbitrairement par une communauté humaine, qui dote de certains pouvoirs l'énonciation de certains mots dans certaines circonstances. Et lorsqu'une action illocutionnaire est réalisée, alors elle s'évalue de manière spécifique, en fonction de ce qu'elle accomplit et du rapport au réel qu'exige cet accomplissement (par rapport, ici, à ce que j'ai promis). Ce rapport au réel est médiatisé par le contenu locutionnaire, qui spécifie partiellement le réel en rapport avec l'action. On peut alors relever un trait marquant de l'acte illocutionnaire : sa capacité à toujours pouvoir être réalisé en première personne. Cela témoigne de la subjectivité qui s'inscrit dans l'acte et qui, par là, s'engage. Une responsabilité est en effet toujours prise quand un acte illocutionnaire est accompli. Par là, une condition par défaut de la réalisation adéquate de l'acte est de le faire sérieusement, sans arrière-pensée, de manière non-humoristique, non feinte.<br /> Le troisième niveau de l'acte de parole est qualifié de perlocutionnaire par Austin : il concerne les conséquences qui s'ensuivent de la réalisation d'un acte illocutionnaire et qui reprennent en partie les effets rhétoriques analysés par Aristote. Comme conséquences, ceux-ci ne sont pas nécessaires, mais résultent de la manière contingente dont l'auditoire prend l'énoncé, comme par exemple quand la maman est triste en assistant au mariage de son fils. La tristesse de la maman n'est pas logiquement impliquée par l'énoncé de mariage, mais elle en est néanmoins une conséquence directe. Par conséquent, les actions perlocutionnaires ne sont toutefois pas indépendantes de l'action illocutionnaire qui en est la cause, mais elles consistent dans une certaine façon de l'appréhender : du point de vue des effets, des suites, parmi une multitude, que celle-ci est susceptible d'engendrer. Mais ce qui distingue bien l'action perlocutionnaire des deux autres types d'actions, c'est son caractère aléatoire : les effets qui s'ensuivent de l'acte illocutionnaire ne sont pas déterminés par cet acte, car ils ne sont pas réglés par convention. Ils sont plus des effets naturels et, par suite, ils n'engagent pas la responsabilité de l'agent au même titre que l'acte illocutionnaire, qui détermine l'agent à un certain nombre de choses. On peut parfois confondre les conséquences (perlocutionnaires) de l'acte avec ses effets (illocutionnaires) nécessaires, notamment parce que la nature humaine réagit à peu près uniformément aux mêmes actes de parole, de telle sorte que l'éventail des réactions perlocutionnaires n'est pas inattendu. Mais toute la différence réside dans le caractère non-normatif de ces conséquences : l'une n'est pas plus nécessaire qu'une autre.<br /> Une fois caractérisés selon leur trois dimensions, les actes de parole sont alors soumis à plusieurs formes d'échecs, selon le type de conditions conventionnelles qui n'est pas respecté par l'agent. Ces échecs peuvent se cumuler, car ils sont eux-mêmes relatifs au mode de description adopté, au point de vue adopté sur l'acte. Un échec ne l'est en effet qu'en fonction du but considéré et comme un acte peut s'inscrire dans différentes pratiques ou servir plusieurs fins à la fois, on peut considérer qu'il échoue de différentes manières. Toutefois, les échecs ont d'abord été identifiés en tant qu'ils concernaient les performatifs, et ils ne concernent pas vraiment le niveau locutionnaire, même si celui-ci joue un rôle dans la réussite de l'acte de parole total, quant à la détermination du rapport à la réalité exigé. En tout cas, les échecs étant relatifs au respect de règles conventionnelles, ils ne peuvent pas affecter le niveau perlocutionnaire qui n'est pas réglé par des conventions.<br /> Comme les échecs de l'illocution sont alors relatifs à l'application de la convention, on comprend qu'ils s'assimilent essentiellement à des échecs dans la reconnaissance de l'exécution de l'acte. Dans ce cas, on ne parvient pas à faire reconnaître la procédure conventionnelle utilisée, c'est-à-dire qu'on ne parvient pas à faire comprendre ce qu'on a voulu faire et à entraîner les conséquences normatives qui s'ensuivent normalement de cette compréhension ou reconnaissance conventionnellement réglée.<br /> Cependant, les échecs relevés par Austin ne permettent pas d'identifier des règles a priori, qui gouverneraient de manière totalement déterminée l'usage du langage. Celui-ci admet bien des variations et les échecs n'ont lieu que lorsque les variations sont trop importantes par rapport au paradigme d'usage accepté dans la communauté linguistique. Les règles ne sont donc pas des principes rigides qu'il faudrait respecter à la lettre ; elles admettent au contraire une marge d'indétermination, qui est suppléée par une interprétation contextuelle de leur application correcte.<br /> Pour mesurer cette application, il faut toutefois considérer le rapport des énoncés avec le réel où ils s'appliquent. Par conséquent, il convient d'analyser la pertinence des actes de parole eu égard à leur contexte. C'est dire que, contre le positivisme logique qui considère que seuls les énoncés constatifs ont un rapport aux faits sous la modalité du vrai ou du faux, Austin montre que tous les actes de parole entretiennent certains rapports avec les faits, en fonction de leur dimension d'évaluation spécifique et du contenu locutionnaire, qui vient le spécifier. Ainsi, l'énoncé " Je promets de faire la vaisselle " entretient un certain rapport à la réalité en ce que son statut de promesse m'engage à transformer l'ordre de la réalité de manière à la réaliser. Elle ne peut par ailleurs être réalisée qu'en fonction de ce qui est dit au travers de cet acte : il s'agit de faire la vaisselle et non pas de promener le chien. Le contenu locutionnaire de l'acte détermine ainsi le rapport spécifique qu'il doit entretenir avec les faits. Par conséquent, la réussite des actes de parole va dépendre de plusieurs rapports aux faits spécifiques, propres aux différentes règles conventionnelles définissant les actes de parole. Chaque règle détermine en effet un certain rapport aux faits, que ce soit un rapport contextuel, un rapport de présuppositions, un rapport de sincérité, etc.<br /> Austin va alors montrer que, parmi ces rapport aux faits, figurent différents types de présuppositions. Tout acte de parole ne réussit en effet qu'à présupposer un certain nombre de faits, qui déterminent la pertinence de l'usage d'un énoncé. Ainsi, généralement, je ne peux te souhaiter de réussir ton examen que si la réussite à cet examen est quelque chose qui t'apporte quelque chose. Est donc présupposé le fait que cette réussite t'est favorable. Mais les présuppositions austiniennes consistent à poser des conditions réelles relatives aux contextes d'usage et non pas des règles nécessaires et a priori de conversation, qu'il faudrait suivre à la lettre en toute occasion. Il peut en effet s'avérer que la situation demande à ce que telle chose ne soit pas présupposée, ou que soit présupposé autre chose, d'autres faits. La position d'Austin est donc contraire à celle de Grice, puisqu'elle ne permet pas de déterminer a priori la situation d'usage correct des énoncés.<br /> Dans le même ordre d'idée, on a souvent tendance à considérer, avec Searle, qu'une des conditions essentielles de réussite des actes de parole est leur doublure par une croyance ou une intention. On prend généralement comme exemple, pour le montrer, le cas de la promesse, qui ne réussirait qu'à être sincère, c'est-à-dire à correspondre à une intention de tenir la promesse. Si je faisais une promesse sans avoir l'intention de la tenir, alors, en fait, je ne promettrais pas. La réalité de la promesse résiderait donc dans l'acte mental ou l'intention qui la sous-tend. Austin montre que cette explication de la promesse est contre-productive et offre justement la possibilité de ne pas s'engager par la promesse, en alléguant l'absence (toujours possible) de l'intention correspondante. En réalité, il faut poser que la condition de sincérité ne réside pas dans l'état d'esprit accompagnant la promesse, mais, bien plus objectivement, dans la procédure conventionnelle utilisée pour la réaliser. Ce n'est pas qu'un engagement mental doive toujours accompagner l'énonciation d'une promesse, mais c'est simplement que cette énonciation engage conventionnellement à la tenir.<br /> Strawson a lui aussi proposé une analyse des actes de parole qui fait dépendre leur bonne réalisation de la reconnaissance des intentions qu'ils exprimeraient. Mais à supposer même que des actes de parole expriment des intentions, celles-ci n'auraient aucune possibilité d'entraîner la réalisation de l'acte de parole, car elles n'ont aucune contrainte normative. Ce n'est en effet pas parce que j'exprime une intention que je m'oblige à quoi que ce soit en fonction de cette intention. Il faut bien plutôt tout le poids de la convention pour que s'ensuive d'une énonciation un certain nombre de conséquences nécessaires. Par conséquent, il convient de rejeter comme illusoires tout aussi bien l'analyse searlienne que l'analyse strawsonienne.<br /> Grice a, quant à lui, proposé de rendre compte de la signification historique portée par les énoncés en contexte au moyen des intentions du locuteur. C'est ainsi parce que j'aurais l'intention de promettre de faire la vaisselle ce soir qu'il faudrait comprendre que je promets de faire la vaisselle ce soir au moyen de l'énoncé " Je te promets de faire la vaisselle " - le caractère promissif dérivant de la reconnaissance de l'intention exprimée. Mais c'est là encore enlever toute objectivité à ce qui est dit et se priver de son identification, en ajoutant un niveau supplémentaire qui empêche bien plutôt toute saisie de l'engagement. Il convient au contraire de déterminer la signification historique portée par un énoncé à la fois par les conventions linguistiques et le contexte d'énonciation.<br /> La qualification intentionnelle des actes de parole a toutefois un sens : elle répond à des conditions normales d'usage. Généralement, en effet, j'agis bien de manière intentionnelle, au sens où je suis conscient de mes gestes, sauf s'il y a des raisons valables de considérer que je ne le fais pas ou ne peux pas le faire. La qualification intentionnelle est donc en réalité une qualification rétrospective par défaut, qui n'a aucun rôle déterminant, ni explicatif.<br /> Par ailleurs, si on rabat toute la charge de l'explication sur les conventions définissant les actes de parole, on ne peut pas distinguer des actes de parole plus conventionnels que d'autres, et donc plus efficaces que d'autres. Ils sont tous définis par le même type de conventions, même si celles-ci sont plus ou moins explicites, codées et n'ont pas toutes la même importance sociale. Par conséquent, ils ont tous le même type d'efficacité. C'est ce nécessaire caractère conventionnel de l'acte de parole qui vient garantir son objectivité, car c'est uniquement parce que la communauté linguistique contrôle mon usage du langage que celui-ci acquiert une normativité. Les conventions déterminant l'objectivité de l'usage de l'énoncé sont de deux ordres : il y a des conventions descriptives qui donnent un contenu linguistique à une phrase, et des conventions démonstratives qui donnent une référence historique à l'énoncé. Ce sont les conventions démonstratives, et non pas des caractéristiques représentationnelles, qui sont nécessaires pour permettre au langage de renvoyer à la réalité, d'en dire quelque chose, en ce qu'elles fixent des conditions d'usage.<br /> En raison de ces conventions, on comprend qu'un énoncé n'acquiert un sens historique déterminé que s'il est adéquat au contexte d'utilisation, puisque les conventions mettent toujours en rapport l'énoncé avec des types de situation, dont il peut alors parler. C'est dire que la seule valeur sémantique de l'énoncé ne suffit pas à déterminer son application. L'adéquation de l'énoncé n'est en effet pas déterminée a priori par les conventions démonstratives, qui ne prévoient pas leur application. Cela laisse la place à l'intervention d'une faculté humaine, le jugement, qui doit venir évaluer, dans chaque contexte d'usage, la pertinence de l'énoncé et son contenu, et ainsi décider quel usage il est fait de l'énoncé à chaque occasion. Mais cette multiplicité des déterminations permises par les conventions nécessite que, pour dire ou faire quelque chose de déterminé par l'usage d'un énoncé, le locuteur prenne un engagement vis-à-vis de ce qu'il dit et du contexte dans lequel il le dit, qui permette de faire reconnaître de manière objective la partialité du contenu de l'énoncé. Car, ainsi, le locuteur situe l'énoncé et se situe par rapport aux circonstances, ce qui permet à tous les interlocuteurs d'évaluer objectivement l'énoncé dans l'espace des possibles interprétatifs ouvert par les circonstances précises de l'énonciation auxquelles renvoie le locuteur. Car, s'il est possible de dire de multiples choses au moyen de l'usage de conventions données dans un contexte donné, toute interprétation de ce qui est dit n'est pas admise dans ce contexte, puisqu'elle est déterminée par la pratique du langage qui y est mise en œuvre et qui exige la prise en compte de certaines conventions et de certains traits contextuels. En m'engageant vis-à-vis de ce que je dis et de la situation dans laquelle je le dis, je permets ainsi de fixer une compréhension donnée de mon énoncé, d'autres n'étant pas admises par la procédure d'énonciation utilisée en ces circonstances. Autrement dit, en m'engageant à l'occasion de l'usage de mon énoncé, je permets de déterminer l'appréciation qu'il mérite à cette occasion.<br /><br /> En identifiant tout usage de la parole à l'accomplissement de certains actes, Austin opère une véritable révolution en philosophie du langage et s'interdit toute conception représentationnaliste du langage, notamment en ce qui concerne les énoncés de connaissance, qui sont censés dire quelque chose du monde. Il s'inscrit par là dans une tradition anti-représentationnaliste oxonienne, dont le principal représentant est J. Cook Wilson, qui refuse toute conception représentationnaliste de la connaissance pour la ramener bien plutôt à des jugements fondés sur des raisons, se distinguant radicalement des jugements de croyances. Mais Cook Wilson fonde la connaissance sur un concept de certitude circulaire, qui provient du caractère absolu des raisons recherchées, en ce que, selon lui, si je sais, je ne peux pas me tromper, car je sais absolument, ou pour des raisons qui ne peuvent pas être remises en cause. En effet, si ces raisons pouvaient être remises en cause, elles ne seraient pas des raisons fondant un savoir, mais seulement une croyance. Or Austin ne peut pas accepter cela : pour lui, il n'y a rien d'absolu, car cela ne permet plus de rien justifier du tout, et les raisons fondant la connaissance seront toujours des raisons relatives à une occasion d'énonciation.<br /> Il faut en fait comprendre qu'un jugement de connaissance s'exprime nécessairement à travers un acte de parole particulier, un acte de parole descriptif, qui vise à dire des choses à propos du monde. Comme tout acte de parole, celui-ci doit respecter des conditions contextuellement déterminée pour réussir à faire ce qu'il vise. Dès lors, ce qui détermine un énoncé descriptif comme un énoncé de connaissance, et non pas comme un énoncé de croyance, ce sont les conditions particulières qui fondent son emploi, qui sont autant de raisons d'utiliser cet énoncé tel qu'on l'utilise. La connaissance doit alors bien être justifiée, et non plus validée, comme le voulait la tradition empiriste dans une optique qui restait représentationnaliste. Il ne s'agit en effet plus de vérifier si mes énoncés correspondent au réel, mais s'ils sont fondés à dire quelque chose du réel. Dès lors, il convient assurément de préserver l'idée que la connaissance, en tant qu'elle s'exprime dans des énoncés, repose sur des raisons de prononcer ces énoncés. Les énoncés de connaissance sont, en effet, des actes de parole comme les autres, fondés sur des raisons. Mais ces raisons de les prononcer, qui fondent une certaine position prise par cet acte, sont relatives au contexte et non pas absolues, comme le voulait Cook Wilson. On n'utilise en effet un énoncé de connaissance que dans des circonstances précises qu'en fonction de raisons qui valent précisément dans ces circonstances précises et qui fondent mon usage. C'est ainsi que mon énoncé de connaissance gagne une objectivité et une prétention légitime à parler du réel – parce qu'il est contextuellement justifié. On aboutit donc à l'idée d'une conception performative de la connaissance, selon laquelle importe plus les conditions d'usage de l'énoncé que sa teneur représentationnelle.<br /> Or Strawson a voulu réutiliser l'idée austinienne de la performativité pour caractériser les énoncés vrais, et ainsi construire une " théorie performative de la vérité ". Dire que P est vrai, ce ne serait ainsi que s'engager en faveur de ce qui est dit par P, ce qui permettrait d'éliminer le prédicat de vérité de la valeur sémantique de l'énoncé. Austin, paradoxalement, récuse totalement cette idée et soutient qu'un énoncé performatif, par définition, ne peut pas être vrai. Austin considère plutôt que la vérité concerne deux choses particulières : d'une part, ces actes de parole particuliers que sont les affirmations, qui décrivent le réel ; d'autre part, les faits du monde dont parlent ces affirmations, tels qu'ils sont appréhendés dans une certaine situation, et non pas dans l'absolu. Il s'agit donc de mettre en relation un contenu situé avec une situation appréhendée dans une occasion particulière d'évaluation – il s'agit de porter un jugement contextuellement déterminé sur l'adéquation entre un énoncé porteur d'un certain contenu à l'occasion de son énonciation et une situation qui demande à être appréhendée d'une certaine manière à cette occasion. Cela implique que le prédicat de vérité n'est pas éliminable, car son attribution prend précisément en compte une relation entre une affirmation et un état du monde, ce qui n'est pas le cas de la simple affirmation, qui ne prend en compte que le réel. Or ce qui est jugé vrai, c'est l'affirmation, et non pas l'état du monde.<br /> Selon Austin, il faut comprendre la vérité comme une relation conventionnelle entre des types de situations historiques auxquelles on fait référence et des situations-types signifiées par les mots utilisés. Il s'agit d'une relation conventionnelle mais qui laisse, là encore, la place à un jugement, qui doit intervenir pour évaluer la relation de correspondance entre ces deux types. Le jugement ne peut cependant pas juger abstraitement de l
|
100 |
Les femmes disciples dans l'évangile de Luc : critique de la rédactionPaquette, Sylvie January 2008 (has links)
Thèse diffusée initialement dans le cadre d'un projet pilote des Presses de l'Université de Montréal/Centre d'édition numérique UdeM (1997-2008) avec l'autorisation de l'auteur.
|
Page generated in 0.0404 seconds