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Le chemin de la vérité: la persuasion de la puissance divine dans le Contre Celse d'OrigèneGeorgieva, Elena 14 October 2005 (has links)
Résumé<p><p>de la thèse « Le chemin de la vérité :la persuasion de la puissance divine dans le Contre Celse d’Origène <p><p><p>Les traités du Contre Celse permettent d’aborder la problématique de la persuasion de l’enseignement chrétien en ce qu'ils témoignent de l’affrontement virulent de deux visions du monde, - celle du monde gréco-romain et celle de l’enseignement chrétien. En effet, l’essor du mouvement chrétien devrait beaucoup à la lumière de cette rhétorique, oserons-nous dire cette propagande, qui propose une vision du monde nouvelle en s’appuyant sur une théologie qui s’escrime à dépasser la culture gréco-romaine en l’intégrant dans sa propre vision du monde. En ce, l’École d’Alexandrie en général et Origène en particulier seraient les fondateurs d’une nouvelle lecture théologique tant du point de vue polythéiste que de celui du christianisme.<p>Du point de vue méthodologique, je me suis attelée à ce travail en constatant une insuffisance, pour ne pas dire un manque, d’études consacrées à la pratique rhétorique chez Origène. L’idée d’une rhétorique entendue comme un genre secondaire moins « noble », entre guillemets, que le théologique est sans doute la cause de cette lacune scientifique ;or, force est de constater que les Apologistes ayant précédé le penseurs alexandrin et lui-même sont souvent formés à la rhétorique ce qui ne va pas sans incidence directe sur leurs œuvres attendu que formation et méthodes font souvent un avec l’élaboration de savoirs.<p>L’objet immédiat du travail était de décrire et d’analyser par une lecture centrée sur la rhétorique apologétique les lieux communs et les arguments que celle-ci fournit, et qui affectent la structure de la pensée d’Origène. Pour mieux comprendre le processus de persuasion mis en œuvre par le théologien, j’ai pensé que les topoï qu’il emprunte au savoir classique étaient des éléments tangibles qu’il convenait de prendre au sérieux plutôt que de la ranger au placard des vieilleries scolaires. Somme, mon soupçon, ma seconde approche du corpus, était qu’au travers du plus banal de son œuvre, - son infrastructure scolaire-, je toucherai son originalité. Il restait à prouver si ce paradoxe pouvait s’avérer fécond en analysant le discours d’Origène et en m’efforçant de réévaluer, réinterpréter et intégrer dans les recherches portant sur son œuvre la question négligée de sa pratique rhétorique. Somme toute, j’ai tenté de mieux comprendre comment l’homme de l’Antiquité posait la question du sens. <p>Le plan d’ensemble de ma thèse comprend deux parties. Dans la première partie, j’ai dégagé les grandes lignes de l’approche rhétorique d’Origène en prenant pour fil conducteur la question de la véracité de la révélation qui s’impose comme le thème dominant de son entreprise. Ceci m’a conduit à l’examen de l’idée d’autonomie, que celle-ci agisse sur la pensée comme force centripète ou centrifuge, permettant tantôt de se démarquer en minimisant, voire en gommant les différences, tantôt de les exalter en les proclamant. Dans la deuxième partie, j’ai essayé de démontrer les éléments historiques et philosophiques à partir desquels le modèle de la pensée chrétienne a été configuré. J’ai ainsi dégagé l’idée que le récit évangélique a été élaboré tout à la fois par rapport aux modèles de l’histoire « sainte » biblique et les modèles généalogiques de la tradition gréco-romaine. <p>En premier lieu, j’ai démontré que la démarche apologétique d’Origène consistait à faire se côtoyer la puissance persuasive de la parole transcendante et celle de la parole rhétorique humaine. Or « faire se côtoyer » la puissance persuasive de la parole transcendante et celle de la parole rhétorique ne signifie pas pour autant les mettre sur le même pied. On peut donc affirmer la conjonction de la « rhétorique » ineffable de la puissance divine et de la « bonne rhétorique » dans la méthode apologétique d’Origène.<p><p>L’apologétique chrétienne, s’engageant dans une relation de pouvoir par rapport aux « autres » concurrentiels, est amenée à construire la conception de la vérité chrétienne unique et la plus ancienne par opposition à la diversité des doctrines philosophiques et religieuses de la tradition gréco-romaine, et en continuité avec la doctrine hébraïque perçue comme dépassée. En effet, la vérité chrétienne est identifiée à l’origine, à la pureté et à l’essence. De là les deux arguments apologétiques les plus puissants :démontrer l’unité et l’ancienneté de la doctrine chrétienne et donc construire une généalogie à partir d’une seule source originelle, Dieu. En postulant une « vérité absolue » qu’on identifie avec Jésus Christ, le Logos, l’apologiste interprète les enseignements de ses adversaires comme une déviation de cette vérité ou comme une vérité dépassée. Le double chemin vers l’origine est donc symboliquement barré. Par ailleurs, l’apologiste élabore une forme d’échelle de vérité où les rivaux de l’enseignement chrétien ne sont que des moyens rhétoriques pour démontrer la supériorité chrétienne.<p>L’élaboration de la conception de la vérité absolue chrétienne va de pair avec la constitution discursive de l’« autre ». En tenant compte de la relation discursive intersubjective, je parle d’une constitution discursive de l’« autre ». C’est précisément la finalité apologétique du Contre Celse qui nous permet d’affirmer le caractère construit de la notion de l’« autre » en tant que construction rhétorique. L’« autre », qu’il soit juif ou païen ou gnostique, est constitué à partir du projet chrétien. Mieux, il reçoit sa définition uniquement en fonction de sa différence avec le christianisme. Deux stratégies apologétiques s’imposent ainsi :d’une part minimiser, voire gommer, les différences internes au mouvement chrétien et grossir les différences avec l’« autre » et, d’autre part, grossir les différences en minimisant les ressemblances, en les décrivant comme une imitation ou un vol (le thème du larcin).<p>En second lieu, on peut affirmer que le mythe informe le « récit évangélique » dans la mesure où l’histoire individuelle de Jésus et le mythe du Christ se retrouvent fusionnés d’une manière inextricable dans la narration christologique. Le mythe apparaît ainsi comme une construction symbolique fondée sur les symboles et formes déjà existants ;mais, qui plus est, étant un récit, il reforme et transforme ces symboles dans une nouvelle structure propre à lui. Lorsque je parle du mythe chrétien, j’entends un système dynamique de schèmes qui, sous l’impulsion du schème général mythique de kat‹basiw-Žn‹basiw, tend à se configurer en récit évangélique. Ainsi, le mythe peut traduire l’accumulation d’« essaims » ou de « constellations » de schèmes. C’est en ce sens qu’on parle du message chrétien comme étant exprimé en un langage mythique. J’ai adopté le terme générique de « schème » dans le sens d’un modèle, une « engramme ».<p>L’ingéniosité chrétienne consiste à constituer le schéma mythique de kat‹basiw-Žn‹basiw, sur lequel repose le « mythe fondateur » chrétien. Il est fondé sur la conception d’une histoire sainte articulant expression mythique et expression historique au sein d’un schéma temporel finalisé. J’ai relevé trois modèles principaux de l’histoire sous-tendant les divers types de récits bibliques :l’histoire « blanche », l’histoire-fait, l’histoire-événement. L’histoire « blanche » présente les deux réalités, le « Même » et l’ « Autre », existant chacune pour soi et sans aucun contact entre elles. En revanche, l’histoire-fait présente leur communication en dehors du temps. Enfin, l’histoire-événement présente le passage de Celui qui agit d’un principe à l’autre dans un système où le temps se déroule. On peut retrouver ces modèles de l’histoire concrétisés dans un certain nombre de récits bibliques :le récit de la création, le récit de la séduction ou le récit du péché, le récit de l’alliance ou le récit de la médiation divine.<p>Enfin, j’ai étudié l’élaboration du « récit évangélique » par rapport à un certain nombre de récits qui se transposent et s’entrecroisent entre eux, à savoir le « récit de l’alliance », le « récit messianique » et le « récit généalogique ». La configuration du récit évangélique repose sur le jeu dynamique entre les récits identifiables déjà sédimentés dans des traditions différentes et le récit innovateur d’une déviance réglée. Le « récit évangélique » consiste en la combinaison unique de l’histoire et du mythe, qui se donne comme un récit fondateur mytho-historique. La prédication de Jésus met en place une historicisation du mythe. En même temps, avec les évangiles, on assiste à un processus de mythisation de Jésus qui aboutit à sa divinisation. L’élaboration du « récit évangélique » tire son intelligibilité de l’ensemble des opérations par lesquelles une herméneutique actualisante s’est transposée sur les récits et modèles anciens et les prophéties hébraïques. On peut affirmer que le « récit évangélique » a été configuré à la jonction des représentations bibliques et grecques.<p>L’originalité du christianisme consiste en la perspective universelle que le « récit évangélique » revêt. Ainsi, le devenir est divisé en trois temps qui sont reliés entre eux de manière structurée à travers l’intermédiaire divin de Jésus Christ qui assure les renvois théologiques et contrôle ainsi le monde de tout les temps.<p> / Doctorat en philosophie et lettres, Orientation histoire des religions / info:eu-repo/semantics/nonPublished
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L'atelier d'orfèvrerie de Gilles BeaugrandVaillancourt, Éric 19 April 2018 (has links)
Gilles Beaugrand-Champagne (1906-2005) a été connu dans toute l'Amérique du Nord pour ses vases sacrés et autres objets de culte, à une époque où le monde de l'art religieux a connu un profond renouveau. Beaugrand, par ses études à l'École des beaux-arts de Montréal, puis sa formation en ferronnerie d'art à Paris, connaissait les courants d'avant-garde du monde des arts décoratifs. À partir de 1935-1936, en s'appuyant sur les compétences d'orfèvres expérimentés, il met sur pied un atelier qui se fait rapidement remarquer par sa production d'objets de culte au langage art déco, et par sa capacité à réaliser une grande diversité d'objets métalliques de toutes catégories. Le fonctionnement de l'atelier de Gilles Beaugrand correspond à un modèle fidèle à sa formation académique où le maître d'atelier utilise son personnel pour réaliser de nombreuses oeuvres, tout en étant le seul créateur des objets produits.
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James Tissot, peintre des récits évangéliquesDefoy, Sophie 06 February 2019 (has links)
La présente étude est consacrée au peintre nantais du XIXe siècle, James Tissot, et à son œuvre d'inspiration biblique intitulée la Vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Elle se veut une recherche sur la valeur artistique et historique de l'œuvre. Par diverses façons, James Tissot nous entraîne dans un univers réaliste, basé sur ses recherches archéologiques, typologiques et topographiques. En outre, une connexité s'installe entre les périodes picturales mondaine et biblique de sa carrière artistique, ce qui créera une œuvre teintée d'influences de toutes parts. L'analyse de l'œuvre religieuse se fera par un aperçu de la biographie de l'artiste, une recherche sur sa théorie de l'art biblique, un regard sur le contexte artistique, politique, social et religieux ainsi que sur la fortune critique du peintre, lesquels serviront à cerner les tendances picturales de l'artiste. Enfin, l'influence de l'œuvre religieuse de James Tissot dans le cinéma français et américain se retrouve en postface de ce mémoire. / Montréal Trigonix inc. 2018
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Les formes circulaires sculptées : étude de cas : la frise à médaillons du portail roman de l'église abbatiale de Cluny au XIIe et XIIIe siècles / Formes circulaires sculptéesGenest, Renée 18 April 2018 (has links)
L'abbaye de Cluny a été, jusqu'à la reconstruction de Saint-Pierre de Rome, la plus grande église de la chrétienté en raison de ses dimensions, mais principalement par son influence. Nous nous sommes questionnés sur le peu d'études de certains fragments conservés au musée d'Art et d'Archéologie de Cluny, particulièrement la frise à médaillons de l'avant-nef dont l'absence de recherches sérieuses nous a étonnée. Afin de comprendre cette oeuvre, nous avons dû réfléchir sur l'espace dans lequel elle prit place, soit l'avan-nef : le choix du vocable, sa signification et ses fonctions. La description des fragments conservés de la frise et son emplacement, ainsi qu'une analyse de l'ensemble ont menés à une réflexion sur l'image-lieu, soit la frise à l'intérieur de l'avant-nef. Un dialogue s'installe alors entre ces deux éléments et leur superposition éclaire alors sur le sens qu'a revêtu cet élément sculpté dans son lieu architectural.
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L'Île promise : la figure de l'«insula» chez Bède le VénérableFrigault-Hamel, Patrice 20 April 2018 (has links)
Ce mémoire cherche à approfondir les connaissances actuelles de la médiévistique en matière de notion d'espace pour le haut Moyen Âge. L'étude de la figure de l'insula au sein de l'Historia ecclesiastica gentis Anglorum de Bède le Vénérable demeure au centre de cet approfondissement. Le présent document offre dans un premier temps une analyse de la place et du rôle des îles dans les discours géographiques de l'Antiquité et du haut Moyen Âge. S'y trouve ensuite une analyse des principaux sens du vocable insula de l'Historia ecclesiastica suivi d'une réflexion sur les principaux rapports sociaux mis en exergue et les structures auxquelles ils s'attachent. Finalement, on s'intéresse à la notion d'unitas ainsi qu'aux modalités de sa réalisation, sachant qu'elle est nécessaire à la transformation de la Bretagne en « Île promise ».
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L'iconographie jésuite et ses implications cultuelles dans l'art et la religion des Québécois (1842-1968)Laroche, Ginette 11 April 2018 (has links)
Etudier l'Iconographie des Jésuites des XIXe et XXe siècles, c'est retracer leur influence sur des images dévotionnelles familières aux Québécois d'aujourd'hui. En remettant les pieds au Canada, en 1842, les pères de la nouvelle Compagnie de Jésus ne possédaient plus rien. Tout était à reconstruire. Toujours en suivant un principe préconisé par saint Ignace sur l'utilisation de l'image mentale pour méditer, ce nouveau départ permit la mise en place d'une imagerie religieuse qui, destinée à les soutenir dans un apostolat assez diversifié, s'inscrivait d'emblée dans les courants marquants de l'art religieux du XIXe siècle. En démontant le mécanisme de formation de certaines de ces images, j'ai pu retrouver le sens qu'elles ont pris pour notre collectivité à une époque donnée. Au travail de l'historien de l'art s'est donc ajoutée la démarche de l'ethnologue qui, à partir de l'observation, remonte le réseau des faits, des personnes, des éléments et des événements susceptibles d'apporter une vision globale du sujet. La première partie de la thèse traite uniquement du contexte des années 1840; la seconde, une esquisse historique, permet de montrer comment les Jésuites furent amené à privilégier certains types d'images, certains artistes et même certains moyens d'expression bien adaptés aux contextes. Puis, à travers l'élaboration du programme iconographique du Gesù de Montréal, s'amorce la troisième section, celle des études de cas. Par l'étude de représentations spécifiquement rattachées aux jésuites on peut évaluer la portée de leurs choix, attendu qu'à travers le besoin de s'unir à l'ensemble de la catholicité en même temps que de se singulariser, toujours les Jésuites eurent recours à des images facilement lisibles, peu importe qu'elles se rattachent à l'art savant ou à l'art populaire. Vu sous cet aspect, l'essai sur l'iconographie jésuite s'ouvre donc sur une étude qui devient de plus en plus pressante: celle de l'art industriel. / Québec Université Laval, Bibliothèque 2013
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L’auteur au temps du recueil : repenser l’autorité et la singularité poétiques dans les premiers manuscrits à collections auctoriales de langue d’oïl (1100-1340).Stout, Julien 04 1900 (has links)
Cette thèse entend proposer une analyse originale du phénomène connu mais polémique que constitue l’introduction de la notion d’auteur dans la littérature de langue française au Moyen Âge. Il s’agira d’essayer de contribuer à repenser la signification poétique, culturelle et historique de ce moment particulier où l’auteur – c’est-à-dire l’attribution d’un texte ou d’une série de textes à un nom propre donné – s’est imposé pour la première fois comme un critère structurant et primordial dans la production et surtout la transmission des textes de langue française dans les manuscrits médiévaux. Usant du concept foucaldien de fonction-auteur, des théories de la réception et du paratexte, ainsi que de la « Nouvelle Codicologie », l’approche déployée ici aborde l’auteur en tant que construction textuelle et éditoriale signifiante au sein d’un corpus de recueils littéraires de langue d’oïl où la volonté de construire des figures d’auteurs par les éditeurs de ces ouvrages est à la fois claire et indiscutable. Partie à l’origine d’un examen systématique de la tradition manuscrite d’environ 320 noms de poètes de langue d’oïl actifs entre 1100 et 1340, l’analyse se concentre principalement sur 25 manuscrits contenant des collections auctoriales dédiées à 17 poètes, dont le nom est associé avec insistance à une série de textes copiés les uns à la suite des autres. Parmi ces auteurs, on trouve les célèbres Chrétien de Troyes, Rutebeuf et Adam de la Halle, mais aussi Philippe de Thaon, frère Angier, Guillaume le clerc de Normandie, Pierre de Beauvais, Philippe de Remi, Gautier le Leu, Jacques de Baisieux, Geoffroi de Paris, Jean de l’Escurel, Baudouin de Condé, Jean de Condé, Watriquet de Couvin et Nicole Bozon.
La présente analyse tente de nuancer et de dépasser la lecture répandue selon laquelle ces manuscrits à collections auctoriales individuelles constitueraient, de concert avec les fameuses biographies de troubadours et les chansonniers de trouvères, souvent présentés comme leurs « ancêtres », les débuts balbutiants d’une vaste épopée de l’avènement de l’« auteur moderne », annonciateur tout à la fois d’une « subjectivité littéraire », d’une « esthétique autobiographique » et d’un contrôle accru des auteurs historiques, réels, sur la transmission manuscrite de leurs propres œuvres. Tout en offrant une mise à jour contextuelle et matérielle – données originales à l’appui – concernant la dimension collaborative de la genèse de ces recueils et le caractère modulaire de leur transmission, on montrera qu’ils sont le fruit d’un dialogue nourri avec le modèle livresque latin et pluriséculaire de l’auctor – qui est à la fois un auteur, un garant de la vérité (auctoritas) et un ambassadeur prestigieux de la grammaire –, ainsi qu’avec l’antique exemple d’œuvres dites « biobibliographiques », qui décrivent la vie et l’œuvre d’auteurs illustres et exemplaires, comme le fait le De viris illustribus de saint Jérôme. Les manuscrits étudiés usent à répétition de ce modèle ancestral de la biobibliographie (« la vie et l’œuvre ») pour mettre en scène un face-à-face entre auteurs de langue d’oïl et auctores. Or cette mise en regard s’avère d’autant plus intéressante que, contrairement à ce qu’on observe pour les troubadours, considérés très tôt comme de nouveaux auctores illustres en langue vulgaire, dignes de cautionner l’excellence de la poésie et de la grammaire d’oc, elle ne prend pas uniquement, en français, la forme d’une imitation ou d’une adaptation de modèles anciens. En fait, l’analogie avec les auctores donne lieu à des exercices savants, autoréflexifs et parfois ironiques sur la fabrique éditoriale, poétique et épistémologique du type d’auteur et d’auctoritas qui peuvent (ou non) être bâtis dans des recueils en langue d’oïl, idiome qui était encore dépourvu à l’époque (1100-1340) de véritable grammaire, et où fleurissaient en revanche les genres littéraires de divertissement comme le roman, où l’on explorait la porosité des frontières entre le vrai et le faux, entre le bien et le mal. Plus qu’un pas pris dans la direction d’un sacre inéluctable, l’« invention de l’auteur français » à laquelle procèdent les recueils étudiés est un geste pétri des incertitudes et des interrogations de ceux qui le posaient, et qui en mesuraient la profonde vanité au regard de Dieu et de la mort. / This thesis aims to provide an original analysis on an often studied yet controversial issue: the introduction of the notion of authorship in French language medieval literature. The objective here is to reconsider the poetic, cultural, and historical signification of the particular moment when the author – understood here as the attribution of a text or of a series of texts to a proper noun – first became an essential structuring criteria in the production, and more importantly, in the transmission of French-language texts through medieval manuscripts. Using Michel Foucault’s concept of fonction-auteur, theories of reception and of the paratext, as well as New Codicology, this thesis will consider the author as a signifying textual and editorial construction within several literary collections written in langue d’oïl, in which the editors clearly and undeniably sought to construct figures of the author. Based on the systematic examination of the manuscript tradition of approximately 320 names of langue d’oïl poets, who were active between 1100 and 1340, this analysis will focus primarily on 25 manuscripts containing authorial collections dedicated to 17 poets, whose names are strongly associated with a series of texts that are copied one after the other. Among these authors are the famous Chrétien de Troyes, Rutebeuf and Adam de la Halle, as well as Philippe de Thaon, frère Angier, Guillaume le clerc de Normandie, Pierre de Beauvais, Philippe de Remi, Gautier le Leu, Jacques de Baisieux, Geoffroi de Paris, Jean de l’Escurel, Baudouin de Condé, Jean de Condé, Watriquet de Couvin and Nicole Bozon.
This thesis attempts to question and ultimately discard the common conception according to which the manuscripts containing individual authorial collections constituted – along with the famous biographies of the troubadours and the chansonniers of the trouvères, often considered as their « ancestors » – the timid beginnings of the rise of the « modern author », himself a prequel to « literary subjectivity », « autobiographical aesthetics » and an ever stronger control exerted by actual empirical authors over the manuscript transmission of their own works. While offering contextual and material updates – supported by original data – regarding the collaborative process that went into the creation of these collections, as well as the modular aspect of their reception, this thesis will show that these collections were formed through a rich dialogue with the centuries-old latin model of the auctor – who is at once an author, a guardian of truth (auctoritas) and a prestigious ambassador of grammar –, as well as with the antique tradition of « biobibliographical » texts, dealing with the life and works of famous and exemplary authors, such as De viris illustribus, by saint Jerome. The manuscripts studied here repeatedly used this ancient model of biobibliography (« the life and works ») in order to stage a competition between authors writing in langue d’oïl and auctores. This confrontation is particularly interesting when one considers that – contrary to what may be observed in the case of the troubadours, who were quickly seen as the new illustrious vernacular auctores, worthy of vouching for the excellency of langue d’oc poetry and grammar – , we are not simply dealing here with a form of imitation or adaptation in French of ancient models. In fact, the analogy with auctores allows for autoreflexive and sometimes ironic learned exercises, dealing with the editorial, poetic and epistemological creation of the type of author and auctoritas in manuscript collections in langue d’oïl, an idiom which at the time (1100-1340) lacked a true grammar, yet was used in various literary genres meant for entertainment, such as romance, which explored the evanescent barriers between truth and lies, good and evil. Rather than a small step in the long path towards an inevitable coronation, the « invention of the French author » undertaken by these collections constitutes an action that reflects all the uncertainty and interrogations of those who undertook it, while being fully convinced of its utter vanity in the eyes of God and death.
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